ANTONOPOULOU c. GRÈCE (Cour européenne des droits de l’homme) Requête no 46505/19

PREMIÈRE SECTION
DÉCISION
Requête no 46505/19
Xanthi ANTONOPOULOU
contre la Grèce

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant le 19 janvier 2021 en une chambre composée de :

Ksenija Turković, présidente,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Alena Poláčková,
Péter Paczolay,
Gilberto Felici,
Erik Wennerström,
Lorraine Schembri Orland, juges,
et de Renata Degener, greffièreadjointe de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 26 août 2019,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par la requérante,

Vu les commentaires soumis par la banque Eurobank-Ergasias, que la présidente de Section avait autorisée à intervenir dans la procédure écrite en tant que tierce partie (articles 36 § 2 de la Convention et 44 § 3 a) du règlement de la Cour),

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

1. La requérante, Mme Xanthi Antonopoulou, est une ressortissante grecque née en 1957 et résidant à Thessalonique. Elle est représentée devant la Cour par Me V. Chirdaris et MeA. Nouka, avocats exerçant à Athènes et Thessalonique respectivement.

2. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») est représenté par les déléguées de son agent, Mme S. Charitaki, conseillère au Conseil juridique de l’État, ainsi que Mme Z. Chatzipavlou et Mme A. Magrippi, assesseures au Conseil juridique de l’État.

3. Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

A. La conclusion du contrat de prêt et son remboursement

4. Afin d’acheter un appartement de 63 m², la requérante, qui possédait une petite entreprise d’artisanat, conclut, le 2 janvier 2007, avec la banque Eurobank Ergasias (« la banque »), une société de droit privé, un contrat de prêt pour un montant de 243 225 francs suisses (ce qui correspondait à 150 000 euros (EUR) à la date du décaissement le 10 janvier 2007), en hypothéquant l’appartement. Sur le conseil de la banque, elle accepta de faire le prêt en francs suisses car le cours de change entre le franc suisse et l’euro était très stable pendant de longues années. Le contrat de prêt donnait à la requérante la possibilité de convertir le prêt de francs suisses en euros (clause no 4 de l’annexe I au contrat). Le prêt fut aussi assuré contre le risque du décès ou de l’incapacité totale de la requérante, auprès de la compagnie d’assurance E. (une filiale de la banque), au moyen d’un contrat conclu le 8 janvier 2007. La requérante conclut aussi pour une durée des trois ans une assurance auprès de la banque contre le risque de modification du taux de change.

5. Le contrat de prêt contenait une clause no 7 (γενικοί όροι συναλλαγών – conditions générales) selon laquelle la débitrice du prêt en francs suisses assumait l’obligation de s’acquitter de ses obligations envers la banque soit dans la devise de l’octroi du prêt soit en euros mais sur la base du cours de change de celui-ci avec la devise du prêt à la date du remboursement des mensualités.

6. À la date de l’octroi du prêt, la parité entre le franc suisse et l’euro était de 1/1,6215, mais au 4 février 2015, elle était de 1/1,0175. La requérante versa pendant plusieurs années en euros les mensualités du remboursement du prêt, jusqu’au 26 février 2015[1].

7. En raison de l’incapacité de la requérante d’honorer ses obligations contractuelles, à partir du 24 août 2011, suite à une cécité et la cessation de son activité professionnelle, celle-ci demanda et obtint la conclusion d’une convention réglementant le remboursement du prêt. Au total, quatre conventions de modification du contrat initial furent conclues, respectivement les 29 décembre 2010, 22 août 2011, 2 janvier 2012 et 21 janvier 2015, prévoyant la réduction du montant des versements ou la suspension du paiement de ces versements.

8. La convention du 29 décembre 2010 lui donnait la possibilité de modifier le paiement de la mensualité du prêt, au moyen a) soit d’une réduction de 50%, b) soit d’une augmentation de 100%, c) soit en ne versant pas une mensualité, étant précisé que le taux de change restait celui fixé dans le contrat de prêt.

9. Par la convention du 22 août 2011, il fut convenu que pour une période d’un an (du 1er septembre 2011 au 1er août 2012), la requérante verserait une mensualité réduite de 50%. La convention du 2 janvier 2012 prévoyait la suspension du versement des mensualités pour une durée de six mois, soit jusqu’au 1er juillet 2012. Ces deux conventions entrainèrent une augmentation du capital du prêt pour un montant de 1 450,21 EUR ou 1 725,76 francs suisses.

10. Le 23 mai 2012, la requérante informa la banque d’une incapacité la frappant pour cause de cécité ainsi que de son incapacité de poursuivre son activité professionnelle.

11. Le 18 juillet 2012, le compte de la requérante fut crédité, en vertu du contrat d’assurance susmentionné, de 182 726,31 francs suisses (soit 153 473 EUR) aux fins du remboursement partiel du capital non remboursé du prêt à la date de la survenance de l’incapacité. Le remboursement du capital était partiel car, selon les termes du contrat d’assurance, la somme qui devait être versée par la compagnie d’assurance à la banque en cas d’incapacité totale permanente, équivaudrait au solde non remboursé du montant initial du prêt à la date de la survenance de l’incapacité[2].

1. Version de la requérante concernant certains aspects de la conclusion du contrat

12. La requérante affirme que le versement du prêt eut lieu en euros et son remboursement eut aussi lieu en euros. Le prêt n’était donc pas un prêt intégral en devises mais un prêt exprimé en devises (« denominated loan »). La demande du prêt, le préaccord de la banque et l’accord définitif se faisait en euros. Le document interne de la banque intitulé « procédure du programme immobilier Swiss » précisait que la devise du prêt est le franc suisse, sans référence au montant exact du prêt qui est fixé au stade de la prénotation.

13. La requérante souligne que la banque avait lancé une grande campagne publicitaire pour attirer les emprunteurs potentiels à conclure des prêts immobiliers en franc suisses, ce qui eut pour résultat la conclusion de nombreux prêts entre 2007 et 2009 d’un montant total de 6,5 milliards. Le but de cette campagne, qui utilisait comme appât le bas taux d’intérêt, n’était pas de rendre service à ses clients mais constituait un plan pour s’assurer des gains multiples.

14. La requérante affirme aussi qu’elle n’avait reçu de la banque aucune information pour les risques liés au cours de change avec indication d’exemples et par une lettre spécifique, comme l’exigeait la législation en matière bancaire. D’ailleurs, la banque n’avait jamais allégué devant les juridictions nationales qu’une telle information avait été fournie à la requérante. Ce manque d’information, attitude commune à plusieurs banques, suscita la réaction de l’autorité indépendante du médiateur du consommateur qui adressa des recommandations à diverses banques.

15. La requérante souligne que le contrat prévoyait le remboursement des mensualités en euros et qu’il n’y avait jamais eu conversion des euros en francs suisses. S’il y avait eu conversion en francs suisses, elle était seulement comptable et n’était pas effectuée sur ordre de la requérante.

16. La requérante soutient que son attention n’avait pas été attirée sur la clause no 4 de l’annexe I au contrat qui prévoyait la possibilité de conversion à tout moment des francs suisses en euros. Toutefois, cette possibilité était inapplicable en pratique car en cas de recours à celle-ci, la conversion aurait été effectuée selon la parité des changes au jour de la conversion, c’est-à-dire le cours de change défavorable à l’euro. En outre, une personne comme elle, sans connaissances particulières pour gérer un produit bancaire, n’aurait pas pu suivre au jour le jour la parité des changes pour demander cette conversion à un moment favorable pour elle.

17. La requérante affirme que le relevé bancaire qu’elle recevait tous les mois n’était pas de nature à lui dévoiler le risque du change, car la dette (capital restant à rembourser et intérêts) était libellée en francs suisses, ce qui faisait croire que le capital restant à rembourser diminuait, alors qu’en termes d’euros, ce capital en réalité augmentait.

2. Version de la requérante concernant l’augmentation de la somme à rembourser

18. La requérante souligne que son capital emprunté de 150 000 EUR avait atteint le 4 février 2015 la somme de 239 041,76, compte tenu du fait que la parité 1 EUR/1,6215 francs suisses avait été modifiée à 1 EUR/1,0175 francs suisses. L’augmentation du capital emprunté eut lieu en deux phases et atteignit 75,07%.

19. En premier lieu, le 12 janvier 2007, à la suite de l’obtention de son prêt, la requérante reçut la somme de 150 000 EUR. Le 24 août 2011, date à laquelle fut calculé le capital restant à rembourser aux fins du paiement de l’indemnité d’assurance, le capital s’élevait à 191 502,52 EUR (comme cela ressort d’un document daté du 29 mai 2012 et envoyé par la banque à la compagnie d’assurance). L’augmentation du capital était donc de 41 502,52 EUR. Du 12 janvier 2007 au 24 août 2011, la requérante avait remboursé la somme de 20 397,56 EUR, somme qui finit selon elle par se fondre en raison des modifications continues du cours de change. Au total, du 12 janvier 2007 au 24 août 2011, l’augmentation du capital s’éleva à 61 900,08 EUR (41 502,52 + 20 397,56), ce qui correspondait à 41,26% en quatre ans d’application du contrat.

20. En deuxième lieu, après le paiement de l’indemnisation de l’assurance, le 20 juillet 2012, le montant de la dette non-remboursée s’élevait à 31 359,08 francs suisses (soit 26 330,04 EUR).

En outre, du 24 août 2011 jusqu’à la rédaction de sa demande introductive d’instance devant le tribunal de Thessalonique (voir paragraphe 26 ci-dessous), le 4 février 2015, elle versa la somme de 7 907,40 EUR pour le remboursement du capital, mais la somme précitée de 26 330,04 EUR non seulement ne diminua pas mais fut augmentée à 27 306,97 EUR. Il y eut donc une nouvelle augmentation du capital de 8 904,33 EUR (976,93 + 907,40), ce qui correspondait à 33,81% en deux ans et demi (du 20 juillet 2012 au 4 février 2015).

21. Du 4 février 2015 au 2 janvier 2020, la requérante affirme avoir versé en plus 929,94 francs suisses au titre des intérêts et 7 597,82 francs suisses au titre du capital (soit 867,57 EUR et 7 076,17 EUR respectivement).

3. Version du Gouvernement concernant l’augmentation de la somme à rembourser par la requérante

22. Le Gouvernement confirme que la compagnie d’assurance remboursa 153 473 EUR, somme qui correspondrait au montant du capital qui serait dû à la date de la survenance de l’incapacité de la requérante si le contrat initial n’avait pas été modifié. Par conséquent, le restant du capital qui était encore dû (et dont la requérante demanda aux juridictions internes de reconnaître son inexistence) s’élevait, au 4 février 2015, à 27 784,85 francs suisses ou 27 306,97 EUR.

23. Il en résulte, selon le Gouvernement, que jusqu’au 4 février 2015, une somme de 177 821,91 EUR avait été remboursée au titre du capital du prêt, dont 24 348,91 EUR par la requérante et 153 473 EUR par la compagnie d’assurance. A la même date, le montant du capital du prêt non échu s’élevait à 27 784,85 francs suisses, ce qui correspondait à 27 306,97 EUR selon la requérante ou à 26 962,49 EUR selon la banque.

24. Par conséquent, au 4 février 2015, le total du capital remboursé et du capital non échu s’élevait à 205 000 EUR environ (177 821,91 + 27 306,97). L’augmentation du capital emprunté était donc de 55 000 EUR environ, soit 1/3 de celui-ci et non 60% comme le soutient la requérante.

B. La procédure devant les juridictions nationales

25. Le 18 février 2015, se fondant sur la loi no 2251/1994 relative à la protection des consommateurs, la requérante saisit le tribunal de grande instance de Thessalonique d’une action contre la banque demandant que : a) soit reconnue caduque comme abusive la clause du contrat de prêt prévoyant la possibilité du remboursement de sa dette en euros sur la base de la parité avec le franc suisse au taux de change en vigueur au jour du remboursement ; b) soit reconnue comme seule modalité possible de conversion en euros de la somme due en francs suisses, le cours de change des deux monnaies en vigueur au jour du décaissement du prêt, à savoir la parité 1 euro=1,6215 francs suisses ; c) soit reconnu qu’elle n’était plus débitrice des sommes supplémentaires envers la banque, sur la base du contrat de prêt litigieux, et que la banque n’avait aucune prétention pécuniaire à son encontre au titre de ce contrat. Pour étayer son intérêt pour agir, elle invoquait une surcharge financière excessive due au fonctionnement du contrat de prêt litigieux.

26. Par un jugement no 8713/2016 du 2016, le tribunal considéra ce qui suit :

« (…) le chef de demande sous a) de l’action soulevant la question de la caducité de la clause contractuelle (…) du contrat en question, au motif exclusif de son opposition aux dispositions des articles 2 § 1, 6 et 7 de la loi no 2251/1994 et 281 du code civil, doit être rejeté comme mal fondé en droit. Cela parce que cette clause (…) figure parmi les clauses déclaratoires du contrat, comme la défenderesse le prétend de manière fondée, vu qu’il réitère la disposition de l’article 291 du code civil, sans introduire une dérogation à celle-ci et sans qu’il la complète par des réglementations supplémentaires ; dès lors, il ne peut pas faire l’objet d’un contrôle judiciaire suivant l’injonction expresse de la directive 93/13/UE (…) selon laquelle sont exclues de son champ d’application les clauses contractuelles reflétant les dispositions supplétives de la législation interne mais qui ne modifient pas leur contenu ou leur champ d’application. Dans tous les cas, cette clause n’a pas un caractère abusif et son contenu n’est pas vague, compte tenu du fait que la désignation de la prestation (versement mensuel ou totalité du capital non-remboursé) n’est pas vague en l’occurrence, mais elle est suffisamment définie et que son illustration précise est une question de simple calcul mathématique, étant donné que le taux de change à la vente est une mesure objective susceptible d’être calculée (…). A la lumière de ce qui précède et compte tenu que les demandes sous b) et c) présupposent aussi la nullité de la clause susmentionnée et s’appuient du reste sur cette nullité, laquelle n’a pourtant pas été reconnue, ces demandes doivent être également rejetées pour le même motif, ce qui conduit au rejet de l’action dans son ensemble. »

27. La requérante ne forma pas appel contre le jugement susmentionné, mais, le 3 février 2017, se pourvut directement en cassation. Elle soutenait qu’en admettant que la clause litigieuse du contrat de prêt était déclaratoire et qu’en tant que telle un contrôle de son caractère abusif ne pouvait pas avoir lieu, le tribunal de première instance avait interprété et appliqué de manière erronée les dispositions de la loi no 2251/1994 et avait appliqué à tort l’article 1 § 2 de la directive 93/13/UE qui n’était pas transposé en droit interne. Elle se plaignait aussi de l’interprétation et de l’application erronées de l’article 291 du code civil et de la non-prise en considération des faits qui, selon elle, fondaient son allégation relative à l’abus (manque d’information, violation du principe de transparence etc.)

28. Par une décision no 884/20018, et estimant que l’affaire soulevait une question d’intérêt général, la première chambre de la Cour de cassation la renvoya devant la formation plénière de celle-ci.

29. Une association de protection des consommateurs et deux personnes physiques intervinrent dans la procédure en faveur de la requérante.

30. Par un arrêt no 4/2019, la Cour de cassation rejeta, (par 39 voix contre 5 et par 33 voix contre 11 en fonction des moyens de cassation), le pourvoi de la requérante.

31. La Cour de cassation estima qu’en admettant que l’exclusion des clauses déclaratoires du contrôle de leur caractère abusif se fondait sur une « injonction expresse de la directive 93/13/UE, le tribunal de première instance n’avait pas commis d’erreur car, même si cette exclusion n’était pas transposée dans le droit interne de manière expresse par la loi no 2251/1994, elle y était reflétée dans l’article 2 § 6 de la loi no 2251/1994 par l’effet d’une interprétation du droit communautaire conforme au but de la directive. Elle considéra que le tribunal de première instance, qui avait considéré que la clause litigieuse du contrat de prêt constituait une clause déclaratoire car elle reflétait la disposition de l’article 291 du code civil et avait rejeté l’action de la requérante comme mal fondée, interpréta et appliqua correctement les dispositions pertinentes du droit interne (articles 291, 305 et 306 du code civil et article 2 § 6 de la loi no 2251/1994 combinés avec la directive 93/13/UE).

Plus particulièrement, la Cour de cassation s’exprima ainsi :

« (…) Il ressort de [l’article 1 § 2 de la directive 93/13/UE et du point 13 du préambule de celle-ci] que les clauses contractuelles qui reflètent, c’est-à-dire reproduisent le sens ou sont identiques avec les dispositions d’un État membre, par définition ne tombent pas dans le champ d’application de la directive et, par conséquent, ne sont pas soumises, en tant que condition générales de vente, à un contrôle portant sur leur caractère abusif, car ce qui est prévu comme clause contractuelle serait de toute façon valable, même si cette clause n’existait pas. La raison de cette exclusion consiste dans le fait que les dispositions nationales ne contiennent pas par définition des clauses abusives, puisque le législateur a déjà procédé à une mise en balance des intérêts des parties et une telle pesée ne peut pas être abusive. Au cas contraire, le contrôle du caractère abusif de ces clauses signifierait en réalité un contrôle de l’opportunité du travail législatif par les tribunaux, ce qui est contraire au principe de la séparation des pouvoirs (article 26 de la Constitution). Ces clauses, appelées « déclaratoires », peuvent refléter non seulement des dispositions législatives ou réglementaires impératives, mais aussi des dispositions du droit supplétif, comme il est expressément précisé au point 13 du préambule de sorte que la référence dans l’article 1 § 2 de la directive à des « dispositions législatives ou réglementaires impératives » ne constitue pas une utilisation rigoureuse des termes juridiques employés (…).

En outre, il est vrai que l’exclusion des clauses déclaratoires du contrôle de leur caractère abusif n’a pas été expressément transposée dans le droit interne par la loi no 2251/1994, qui transpose au droit grec la directive 93/13. Toutefois, en dépit de l’absence d’une telle transposition par une disposition spécifique et explicite, il doit être admis qu’elle est reflétée dans l’article 2 § 6 de la loi no 2251/1994 par l’effet d’une interprétation conforme au droit communautaire. (…) Par conséquent, pour qu’une condition générale de vente puisse être considérée comme abusive, il faudrait que celle-ci entraine un « déséquilibre important des droits et obligations des parties au détriment du consommateur ». Au cas cependant où la clause en question reflète une disposition du droit interne, impératif ou supplétif, alors il ne peut pas y avoir rupture d’équilibre entre les parties ni clause contractuelle abusive.

En particulier, le contrat de prêt immobilier en devises conclu entre les parties contient la clause selon laquelle le débiteur est obligé de s’acquitter de ses obligations envers la banque soit dans la devise de l’octroi du prêt soit en euros sur la base du cours de change de celui-ci avec la devise étrangère au jour du remboursement. La question se pose alors de savoir si cette clause est « déclaratoire », c’est-à-dire si elle est identique à des dispositions du droit national ou si elle reflète le contenu de celles‑ci, qu’elles soient impératives ou supplétives. En fait l’article 291 du code civil dispose : (…). Il en résulte que le débiteur (…) a la faculté de s’acquitter de sa dette soit dans la devise étrangère du prêt soit dans la monnaie locale sur la base du cours de change de celle-ci avec la devise étrangère à la date et au lieu du remboursement (…). Par conséquent, dans ce cas, il existe une dette en devise étrangère mais le débiteur a la faculté de (…) s’en acquitter dans la monnaie locale sur la base du cours de change de celle-ci avec la devise étrangère à la date (…) du remboursement. Une telle clause dans un contrat de prêt conclu entre la banque et l’emprunteur (…) reflète le contenu de la disposition de l’article 291 du code civil et, par conséquent, conformément aux motifs susmentionnés, il ne saurait y avoir rupture d’équilibre entre les parties ou clause abusive.

La mention dans cette clause de l’obligation du débiteur de s’acquitter de ses obligations envers la banque soit dans la devise de l’octroi du prêt soit en euros (…) ne constitue pas une alternative obligatoire au sens des articles 205 et suivants du code civil, malgré l’utilisation du terme « obligation » car il ne doit qu’une seule prestation, celle en la devise étrangère, et il a seulement la faculté de choisir de s’en acquitter soit dans cette devise soit en euros mais au cours de change en vigueur à la date du remboursement. (…) »

32. Une minorité de cinq membres de la formation plénière estima que compte tenu du fait que l’exclusion de la clause litigieuse du contrôle de son caractère abusif n’avait pas été expressément transposée dans le droit interne par la loi no 2251/1994, elle ne pouvait pas être considérée, même pas au moyen d’une interprétation, comme étant incluse dans la règlementation prévue par cette loi, car, si le législateur souhaitait la transposer, il l’aurait fait. La minorité souligna aussi que, dans tous les cas, les exceptions à la règle de caractère abusif des clauses de ce type des contrats devaient être interprétées restrictivement. Plus particulièrement, la minorité expliqua ainsi son raisonnement :

« Cela est justifié par le fait que la directive 93/13/UE procéda à une harmonisation partielle des législations nationales en matière de clauses abusives, comme cela ressort du motif 12 de son préambule, et donna pouvoir aux États, par son article 8, d’établir ou de maintenir (…) des dispositions plus sévères conformes au Traité, afin d’assurer une plus grande protection du consommateur. Cela est atteint par la transposition des dispositions de la directive qui limite le champ de protection du consommateur, comme c’est le cas de l’article 1 § 2 de la directive en question, qui n’a pas été transposée dans le droit interne en dépit des amendements successifs de la loi no 2251/1994. Ainsi, comme il y a eu omission délibérée de transposer dans le droit interne l’exception de l’article 1 § 2 de la directive en question, celle-ci (…) ne produit pas d’effet horizontal direct entre particuliers et l’interprétation du droit interne et de l’article 2 § 6 de la loi no 22051/1994 selon l’esprit et le but de la directive n’est pas possible : une telle interprétation provoquerait une diminution de la protection du consommateur à laquelle aspirait le législateur (…) et, par conséquent cela constituerait une interprétation contra legem inadmissible du droit interne. »

Le cadre juridique pertinent

A. Le droit et la pratique internes pertinents

33. Les dispositions pertinentes du code civil se lisent ainsi :

Article 281 (abus de droit)

L’exercice d’un droit est prohibé s’il dépasse manifestement les limites imposées par la bonne foi ou les bonnes mœurs ou par le but social ou économique du droit. »

Article 288

« Le débiteur est tenu d’effectuer la prestation comme l’exige la bonne foi, compte tenu des usages admis dans les affaires. »

Article 291 (prestation en devises)

« Lorsqu’il s’agit d’une dette pécuniaire en devises devant être réglée en Grèce, le débiteur, à moins qu’il ne soit convenu autrement, a le droit de payer en la monnaie du pays sur la base du taux de change actuel de la devise à la date et au lieu du paiement. »

Article 305 (obligation alternative – διαζευκτική ενοχή)

« Si, parmi deux ou plusieurs prestations qui sont dues, une seule doit être fournie (obligation alternative), le droit d’option, dans le doute, appartient au débiteur. »

Article 388 (changement imprévu des circonstances)

« Si les circonstances sur lesquelles, eu égard à la bonne foi et aux usages admis dans les affaires, les parties se sont principalement basées pour la conclusion d’un contrat synallagmatique, ont ultérieurement changé pour des raisons extraordinaires et imprévisibles, et qu’à la suite de ce changement, la prestation du débiteur, eu égard à la contre-prestation, soit devenue démesurément onéreuse, le tribunal peut, à la demande du débiteur, la ramener, suivant son appréciation, à la mesure convenable, ou même décider la résiliation du contrat tout entier ou dans sa partie non encore exécutée.

(…) »

34. Les articles pertinents de la loi no 2251/1994, relative à la protection des consommateurs, prévoient :

Article 2

« 1. Les clauses qui ont été rédigées à l’avance pour les contrats futurs (conditions générales) ne lient pas le consommateur si au moment de l’établissement du contrat, celui-ci les ignorait, sans qu’il en soit responsable, comme notamment lorsque le fournisseur ne lui a pas indiqué leur existence ou il l’a privé de la possibilité d’en prendre effectivement connaissance de leur contenu.

(…)

6. Les conditions générales de transactions ayant pour effet la perturbation considérable de l’équilibre des droits et des obligations des parties contractantes au détriment du consommateur sont interdites et nulles.

Le caractère abusif d’une condition générale incorporée dans un contrat est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou des services relevant du contrat, du but du contrat, de l’ensemble des circonstances spécifiques lors de sa conclusion et de toutes les autres clauses du contrat ou d’un autre contrat dont celui-ci dépend.

7. Dans tous les cas, sont considérées comme abusives les clauses qui :

(…)

b) limitent les obligations assumées par le fournisseur et les responsabilités de celui-ci ;

c) prévoient un délai de dénonciation extrêmement court pour le consommateur ou extrêmement long pour le fournisseur ;

d) impliquent la prolongation ou le renouvellement du contrat pour un laps de temps extrêmement long, si le consommateur ne le dénonce pas dans un délai spécifique ;

e) réservent le droit au fournisseur de modifier ou de mettre fin unilatéralement au contrat sans motif particulier, spécifique et important, indiqué dans le contrat. »

Selon la jurisprudence, les dispositions du paragraphe 6 de l’article 2 constituent une concrétisation du principe général de l’article 281 du code civil. En interprétant le paragraphe 6, les juridictions nationales affirment que les clauses des conditions générales de transactions qui reprennent des règles supplétives ne sont pas abusives. La jurisprudence admet que les conditions générales de transactions qui dérogent aux principes sans raison suffisante et légitime des principes essentiels du droit supplétif sont abusives et, partant, nulles. La fonction de guidage du droit supplétif est entravée lorsque, par leur contenu, les conditions générales de transactions changent la situation formée sur la base du droit supplétif au sujet d’une forme contractuelle précise (arrêts de la Cour de cassation nos 296/2001, 561/2014 et 13/2018). Ainsi, c’est le droit supplétif s’appliquant sur le contrat précis qui sert à chaque fois de mesure pour l’examen de la perturbation de l’équilibre (arrêts de la Cour de cassation nos 1987/2006 et 350/2016).

La Cour de cassation a précisé que les clauses d’un contrat qui reprennent le contenu des dispositions législatives, à savoir les clauses dites « déclaratoires » (naturalia negotii), sont exclues du contrôle du caractère abusif, en application de l’article 2 § 6 de la loi no 2251/1994 lorsqu’une transaction répond pleinement au modèle contractuel réglementé par la loi (vente, location, contrat d’obligation de résultat etc.). Cette interprétation de l’article 2 § 6 découle de l’article 1 § 2 a) et b) de la directive 93/13/UE et du 13e considérant du préambule de celle-ci.

Article 8

« 1. La responsabilité de celui qui fournit des services est engagée pour tout dommage matériel ou moral causé de manière illégale et fautive par son acte ou son omission lors de la prestation de ces services au consommateur. (…)

3. La personne lésée doit établir le dommage et le lien de causalité entre la prestation du service et le dommage.

4. Le prestataire de services a la charge de la preuve concernant le défaut d’illégalité et de faute de sa part. (…) »

Article 9 e) – Omissions trompeuses

« 1. Une pratique commerciale est considérée comme trompeuse lorsque, dans son contexte actuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et circonstances, ainsi que de toutes les restrictions du moyen de communication précis, omet de fournir des informations essentielles requises par le consommateur moyen, en fonction du contexte, afin de pouvoir prendre une décision documentée de transaction, et de ce fait, conduit ou peut conduire ce dernier à prendre une décision qui n’aurait pas prise autrement.

2. L’omission trompeuse est présumée aussi lorsque le fournisseur dissimule des informations essentielles ou qu’il les fournit d’une manière vague, incompréhensible, ambiguë ou intempestive (…) ou lorsqu’il ne précise pas l’objectif commercial de la pratique commerciale, lorsque cet objectif n’est pas déjà manifeste par le contexte précis, et lorsque, dans ces deux cas, cela a ou peut avoir pour effet que le consommateur prenne une décision qu’il n’aurait pas prise autrement. »

35. L’acte du Gouverneur de la Banque de Grèce (no2501, du 31 octobre 2002), intitulé « Information des personnes traitant avec les établissements de crédit sur les conditions régissant leurs transactions » dispose :

« A. Principes généraux

Les établissements de crédit installés en Grèce doivent :

– informer dûment les contreparties sur la nature et les caractéristiques des produits et services proposés et, en général, sur les clauses et les conditions régissant les échanges bancaires ;

– fournir aux contreparties par écrit une mise à jour périodique au cours de la validité et de l’opération des contrats sur le mode d’application des clauses convenues (…)

B. Information minimale requise

Conformément aux principes généraux ci-dessus, les établissements de crédit doivent fournir au minimum les renseignements et informations qui suivent afin de permettre à leurs contreparties de former avant la conclusion du contrat une image claire sur les services et produits offerts, lorsque ces derniers ne font pas l’objet d’une négociation individualisée

(…)

2. Crédits

En ce qui concerne les crédits, l’information minimale comprend :

(…)

x) une information au sujet du risque d’une éventuelle fluctuation du taux de change dans le cas de prêts en devises ou stipulant une clause monétaire.

xi) la possibilité et le coût du recours à des techniques de couverture du risque d’une éventuelle fluctuation du taux de change ou des taux d’intérêt.

(…) »

36. Selon des informations fournies par la banque, jusqu’à la fin de l’année 2019, les juridictions nationales avaient rendu plusieurs décisions la concernant dans des affaires analogues à celle de la requérante : a) 615 jugements des tribunaux de première instance, dont 568 (92,4%) se prononçaient pour la validité du prêt et 47 (7,6%) contre. De ces 47 jugements, 9 ont été infirmés en appel et, en ce qui concerne les autres, des procédures d’appel sont encore pendantes ; b) sur des oppositions contre des injonctions de payer, 119 jugements des tribunaux de première instance ont été rendus dont 110 (92,4%) se prononçaient pour la validité du prêt et 9 (7,6%) contre ; c) 44 arrêts des cours d’appel se sont en outre prononcés en faveur des thèses de la banque et 1 (qui a fait l’objet d’un pourvoi qui est encore pendant) contre. La banque affirme que la situation est analogue quant aux décisions judiciaires rendues sur des actions contre d’autres banques.

37. Le 5 juin 2020, le tribunal de première instance d’Athènes saisit, dans le cadre d’un litige devant lui entre deux personnes physiques et la Banque du Pirée, la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours préjudiciel en vertu de l’article 267 du Traité. Le tribunal posa les questions suivantes :

« 1. L’article 8 de la directive 93/13/CEE,1lequel donne aux États membres la faculté d’adopter des dispositions plus strictes pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur – autorise-t-il un État membre à ne pas transposer dans son droit national l’article 1, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE et à permettre que des clauses qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ou supplétives soient également soumises au contrôle du juge ?

2. Est-il possible de considérer que, bien que l’article 1, paragraphe 2, premier et second alinéas [ce second alinéa, identique à la dernière phrase du considérant 13 de la directive, n’existe que dans la version en langue grecque], de la directive 93/13/CEE n’ait pas été explicitement transposé dans le droit grec, il y a été indirectement incorporé en vertu de la teneur des articles 3, paragraphe 1, et 4, paragraphe 1, de cette directive, telle que cette teneur a été transposée dans l’article 2, paragraphe 6, de la loi 2251/1994 ?

3. La notion de clause abusive et son champ d’application, tels que définis par les dispositions des articles 3, paragraphe 1, et 4, paragraphe 1, de la directive 93/13, englobent-ils la dérogation figurant à l’article 1, paragraphe 2, premier et second alinéas, de la directive 93/13 ?

4. Le contrôle du caractère abusif des conditions générales contractuelles, au sens des dispositions de la directive 93/13/CEE, s’applique-t-il à une clause figurant dans un contrat de crédit conclu entre un consommateur et un établissement de crédit, laquelle reproduit le libellé d’une disposition de droit supplétif de l’État membre, lorsque ladite clause n’a pas fait l’objet d’une négociation distincte ? »

La procédure devant la Cour de justice de l’Union européenne est pendante.

B. Le droit européen pertinent

38. Les dispositions pertinentes de la directive 93/13/UE relatives aux clauses abusives des contrats conclus avec les consommateurs prévoient :

Article 1

« 1. La présente directive a pour objet de rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives aux clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur.

2. Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives (…) ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive. »

Article 3

« 1. Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

2. Une clause est toujours considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle lorsqu’elle a été rédigée préalablement et que le consommateur n’a, de ce fait, pas pu avoir d’influence sur son contenu, notamment dans le cadre d’un contrat d’adhésion.

Le fait que certains éléments d’une clause ou qu’une clause isolée aient fait l’objet d’une négociation individuelle n’exclut pas l’application du présent article au reste d’un contrat si l’appréciation globale permet de conclure qu’il s’agit malgré tout d’un contrat d’adhésion.

Si le professionnel prétend qu’une clause standardisée a fait l’objet d’une négociation individuelle, la charge de la preuve lui incombe.

3. L’annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives. »

Article 4 § 2

« L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

Article 6 § 1

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

Article 8

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé du consommateur. »

Les points 12 et 13 du préambule de la directive précisent :

Point 12

« considérant, toutefois, qu’en l’état actuel des législations nationales, seule une harmonisation partielle est envisageable ; que, notamment, seules les clauses contractuelles n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle font l’objet de la présente directive ; qu’il importe de laisser la possibilité aux États membres, dans le respect du traité, d’assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur au moyen de dispositions nationales plus strictes que celle de la présente directive ; »

Point 13

« considérant que les dispositions législatives ou réglementaires des États membres qui fixent, directement ou indirectement, les clauses de contrats avec les consommateurs sont censées ne pas contenir de clauses abusives; que, par conséquent, il ne s’avère pas nécessaire de soumettre aux dispositions de la présente directive les clauses qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des principes ou des dispositions de conventions internationales dont les États membres ou la Communauté sont parties; que, à cet égard, l’expression « dispositions législatives ou réglementaires impératives » figurant à l’article 1er paragraphe 2 couvre également les règles qui, selon la loi, s’appliquent entre les parties contractantes lorsqu’aucun autre arrangement n’a été convenu ; »

39. Conformément à la jurisprudence constante de la Cour de Justice de l’Union européenne, l’article 1 § 2 de la directive 93/13 prévoit que les clauses d’un contrat réitérant des dispositions législatives ou réglementaires nationales, sans entrainer un changement de leur champ d’application ou de leur contenu au moyen d’une clause contractuelle, ne sont pas soumises aux dispositions de cette directive, c’est-à-dire qu’elles sont exclues du champ d’application de celle-ci car il est présumé qu’elles servent l’équilibre contractuel garanti par le législateur national (arrêt du 21.03.2013, affaire C-92/11, RWE Vertrieb, points 25-28 ; arrêt du 10.09.2014, affaire C-34/13, Kusianova, points 76-80 ; arrêt du 30.04.2014, affaire C-26/13, Árpád Kásler et Hajnalka Káslerné Rábai c. OTP Jelzálogbank Zrt, points 80-85 ; arrêt du 20/09/2017, affaire C-186/16 ; Ruxandra contre Banca Romaneska sa, points 27-29). Le législateur de l’Union a expressément décidé de préserver cet équilibre ainsi qu’il ressort des termes du troisième considérant et de l’article 1 § 2 de la directive (arrêt du 30 avril 2014, affaire C-280/13, Barclays Bank SA, point 41). Il incombe à la juridiction nationale de vérifier si les clauses faisant l’objet du litige dont elle est saisie reflètent les dispositions législatives ou réglementaires impératives et, dès lors, ne sont pas soumises aux dispositions de la directive 93/13 (arrêt du 30 mai 2013, affaire C-488/11, Dirk Frederik Asbeek Brusse et Katarina de Man Grabito, point 33).

40. En matière du devoir d’information du consommateur, la Cour de justice de l’Union européenne a souligné ce qui suit dans l’affaire C-26/13, Kásler et Rábai, précitée :

« 70. Or, s’agissant de cet article 5 [de la directive 93/13], la Cour a déjà jugé que l’information, avant la conclusion d’un contrat, sur les conditions contractuelles et les conséquences de ladite conclusion est, pour un consommateur, d’une importance fondamentale. C’est, notamment, sur la base de cette information que ce dernier décide s’il souhaite se lier contractuellement à un professionnel en adhérant aux conditions rédigées préalablement par celui-ci (voir arrêt RWE Vertrieb, EU:C:2013:180, point 44).

71. L’exigence de transparence des clauses contractuelles posée par la directive 93/13 ne saurait donc être réduite au seul caractère compréhensible sur les plans formel et grammatical de celles-ci. »

41. Dans le même sens, et en ce qui concerne les risques encourus par des particuliers qui empruntaient dans une devise étrangère, la Cour de justice de l’Union européenne se prononça ainsi dans son arrêt du 20 septembre 2018, OTP Bank Nyrt. et OTP Faktoring Követeléskezelő Zrt. c. Teréz Ilyés et Emil Kiss (affaire C-51/17) :

« 78. (…) l’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que l’exigence selon laquelle une clause contractuelle doit être rédigée de manière claire et compréhensible oblige les établissements financiers à fournir aux emprunteurs des informations suffisantes pour permettre à ceux-ci de prendre leurs décisions avec prudence et en toute connaissance de cause. À cet égard, cette exigence implique qu’une clause relative au risque de change soit comprise par le consommateur à la fois sur les plans formel et grammatical, mais également quant à sa portée concrète, en ce sens qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, puisse non seulement avoir conscience de la possibilité de dépréciation de la monnaie nationale par rapport à la devise étrangère dans laquelle le prêt a été libellé, mais aussi évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières. »

De même, ce même arrêt a affirmé que :

« 52. Il convient de rappeler que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, qui vise les clauses reflétant les dispositions législatives ou réglementaires impératives, institue une exclusion du champ d’application de celle-ci. La Cour a déjà jugé que cette exclusion suppose la réunion de deux conditions. D’une part, la clause contractuelle doit refléter une disposition législative ou réglementaire et, d’autre part, cette disposition doit être impérative (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, points 27 et 28 et jurisprudence citée).

53. Cette exclusion de l’application du régime de la directive 93/13 est justifiée par le fait qu’il est, en principe, légitime de présumer que le législateur national a établi un équilibre entre l’ensemble des droits et des obligations des parties à certains contrats (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, point 28).

54. Toutefois, la Cour a également jugé qu’une juridiction nationale doit tenir compte du fait que, eu égard en particulier à l’objectif de ladite directive, à savoir la protection des consommateurs contre les clauses abusives insérées dans les contrats conclus avec ces derniers par les professionnels, l’exception instituée à l’article 1er, paragraphe 2, de la même directive est d’interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C‑186/16, EU:C:2017:703, point 31 et jurisprudence citée). »

42. Dans un autre arrêt du 9 juillet 2020, NG et OH c. SC Banca Transilvania (affaire C-81/19), la Cour de justice de l’Union européenne précisa ce qui suit :

« 23. Il convient de rappeler que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, qui vise les clauses reflétant les dispositions législatives ou réglementaires impératives, institue une exclusion du champ d’application de celle-ci (arrêt du 20 septembre 2018, OTP Bank et OTP Faktoring, C‑51/17, EU:C:2018:750, point 52).

24. Cette exclusion est d’interprétation stricte et son application suppose que deux conditions soient remplies, à savoir que, d’une part, la clause contractuelle doit refléter une disposition législative ou réglementaire et, d’autre part, cette disposition doit être impérative (voir, en ce sens, arrêt du 3 mars 2020, Gómez del Moral Guasch, C‑125/18, EU:C:2020:138, points 30 et 31 ainsi que jurisprudence citée).

25. Ainsi qu’il ressort du treizième considérant de la directive 93/13, l’expression « dispositions législatives ou réglementaires impératives », figurant à l’article 1er, paragraphe 2, de celle-ci, couvre également les règles qui, selon la loi nationale, s’appliquent entre les parties contractantes lorsqu’aucun autre arrangement n’a été convenu (voir, en ce sens, arrêts du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, point 26, et du 3 avril 2019, Aqua Med, C‑266/18, EU:C:2019:282, point 29).

26. La Cour a itérativement jugé que ladite exclusion de l’application du régime de la directive 93/13 est justifiée par le fait qu’il est, en principe, légitime de présumer que le législateur national a établi un équilibre entre l’ensemble des droits et des obligations des parties à certains contrats (voir arrêts du 21 mars 2013, RWE Vertrieb, C‑92/11, EU:C:2013:180, point 28, ainsi que du 20 septembre 2018, OTP Bank et OTP Faktoring, C‑51/17, EU:C:2018:750, point 53).

27. Partant, la circonstance selon laquelle le législateur national a établi un équilibre entre l’ensemble des droits et des obligations des parties à certains contrats constitue non pas une condition pour l’application de l’exclusion visée à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, mais la justification d’une telle exclusion. »

43. Un raisonnement similaire à celui de l’arrêt susmentionné est aussi contenu dans les arrêts suivants de la Cour de justice de l’Union européenne : arrêt du 7 juillet 2019, affaires C-349/18 à C-351/18, Nationale Maatschappij der Belgische Spoorwengen c. Mbutuku Kanyeba, Larissa Niejs, Jean-Louis Anita Dedroog, points 57 et suiv. ; arrêt du 3 octobre 2019, C-260/18, Kamil Dziubak, Justyna Dziubak c. Raiffeisen International AG, points 45, 48 et 59 ; arrêt du 20 septembre 2017, affaire C-186/16, Ruxandra c. Banka Romaneska SA, points 27-29 et 32 ; arrêt du 20 septembre 2018, affaire C-51/17, OTP Bank Nyrt et OTP Faktoring Követeléskezelő Zrt. c. Terez Ilyés, points 20, 52, 53, 63,64, 70 et 77 ; arrêt du 23 octobre 2014, affaires C-359/11 et C-400/11, Alexandra Schultz et Technische Werke Schussental GmbH und Co. et Josef Egbringhoff c. Stadtwerke Ahaus GmbH, point 51 ; arrêt du 10 septembre 2014, affaire C-34/13, Monika Kusionnova c. Smart Capital a.s., points 76 et 79 ; arrêt du 30 avril 2014, affaire C-26/13, Árpád Kásler et Hajnalka Káslerné Rábai c. Jelzalogbank Zrt, points 80,82 et 85 ; arrêt du 21 mars 2013, affaire C-92/11, RWE Vertrieb AG c. Verbraucherzentrale Nordhein-Westfalen, points 26-28 ; arrêt du 30 avril 2014, Barclays Bank SA c. Sara Sánchez García, Alejandro Chacón Barrera, points 41-42.

GRIEF

44. Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, la requérante se plaint qu’elle a été obligée de rembourser à la banque une somme en euros bien supérieure à celle qu’elle avait empruntée en francs suisses.

EN DROIT

45. La requérante se plaint que l’obligation qui lui a été faite de rembourser le capital de son prêt immobilier conclu en francs suisses, augmenté de 60%, afin d’éviter de perdre son appartement hypothéqué, combiné avec le refus des tribunaux d’examiner le caractère abusif de la clause du contrat relative à cette augmentation, constitue une ingérence disproportionnée dans son droit au respect de ses biens. Elle allègue une violation de l’article 1 du Protocole no 1, qui se lit ainsi :

« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. »

46. En premier lieu, le Gouvernement soutient que la requérante n’a pas respecté le principe de subsidiarité et n’a pas épuisé les voies de recours internes. D’abord, à aucun stade de la procédure devant les juridictions internes, et notamment dans son pourvoi devant la Cour de cassation (paragraphe 11 ci-dessus), la requérante n’a invoqué, ni même en substance, une violation de l’article 1 du Protocole no 1 ou d’une disposition analogue de la Constitution ou de la législation interne. Elle a choisi de ne pas introduire un appel contre le jugement de première instance mais de saisir directement la Cour de cassation qui, elle, ne peut pas se prononcer à nouveau sur les faits de l’affaire. Le Gouvernement allègue aussi que la requérante a omis d’invoquer, dans son pourvoi en cassation, d’autres bases légales qui auraient été plus efficaces que celles qu’elle a invoquées (paragraphe 11 ci-dessus), à savoir les articles 288 et 388 du code civil (paragraphe 17 ci-dessus). Le Gouvernement affirme, en outre, que la requérante n’a pas non plus introduit une action en dommages-intérêts sur le fondement de l’article 8 de la loi no 2251/1994.

47. En deuxième lieu, le Gouvernement soutient que la requérante ne saurait se prétendre victime au sens de l’article 34 de la Convention car, en contractant son prêt en francs suisses, elle a eu un avantage significatif entre 2007 et 2012 : en fait, jusqu’à 2012, la requérante avait remboursé à la banque la somme totale de 41 954,60 EUR alors que si elle avait contracté le prêt en euros, elle aurait remboursé, pendant la même période, la somme de 46 688,71 EUR.

48. En troisième lieu, le Gouvernement allègue que la requérante n’avait pas un intérêt patrimonial protégé par l’article 1 du Protocole no 1. Le litige qu’ont dû trancher les juridictions internes en l’espèce avait pour objet la détermination du montant de la dette de la requérante à l’égard de la banque. Le Gouvernement souligne en outre que la procédure judiciaire en cause n’a aucun rapport direct ou indirect avec le droit de propriété de la requérante sur l’appartement pour l’acquisition duquel elle a conclu le prêt. Le rejet de son action a eu pour effet l’obligation de la requérante de continuer de rembourser le prêt selon les modalités convenues.

49. La Cour n’estime pas devoir se prononcer sur les exceptions préliminaires susmentionnées du Gouvernement car, de toute manière, elle conclut à l’irrecevabilité de la requête pour les motifs suivants.

A. Sur l’objet du litige

50. Le Gouvernement soutient qu’il n’y a pas eu ingérence dans le droit de propriété de la requérante.

D’une part, le Gouvernement soutient qu’il n’y a pas eu majoration de 60 % du capital dû (en euros) comme le prétend la requérante. Le 4 février 2015, le total du capital remboursé (177 821,91 EUR) et du capital non remboursé (27 306,97 EUR) en francs suisses correspondait à 205 000 EUR environ (177 821,91 + 27 306,97). Par conséquent, la majoration du capital initial (lors de sa conversion en euros) s’élevait à 55 000 EUR environ, soit à 1/3 de ce capital et non à 60 %. En outre, comme le contrat a été conclu pour une longue durée, la somme totale en euros qui sera exigée pour le paiement des mensualités devra être calculée à la fin du contrat.

D’autre part, le Gouvernement affirme qu’il n’y a pas eu refus de la part des juridictions nationales d’examiner le caractère abusif de la clause litigieuse du contrat, mais reconnaissance que cette clause n’était pas abusive parce qu’elle reflétait une règle de droit supplétif qui s’appliquait en l’occurrence : tant le tribunal de première instance que la Cour de cassation ont conclu que la clause précitée était déclaratoire car elle reflétait l’article 291 du code civil, disposition qui réglementait la relation contractuelle de la requérante.

51. La requérante soutient que la présente affaire constitue un cas de disproportion économique considérable entre un risque pratiquement inexistant pour la banque et les obligations assumées en méconnaissance des risques. Cela est dû au fait que l’inclusion dans le contrat par la banque d’une clause non transparente a causé un déséquilibre dramatique entre les parties contractantes dans la mesure où la requérante a assumé en totale ignorance un risque qui l’a obligée par la suite à rembourser un prêt par une somme qui est sans commune mesure avec la somme empruntée. L’augmentation du montant du capital emprunté n’était pas purement comptable mais réelle car le capital initialement emprunté de 150 000 EUR a entièrement été remboursé.

52. La Cour note que la requérante, estimant qu’elle devait rembourser une somme bien supérieure à celle qu’elle avait empruntée, a saisi les juridictions internes d’une demande tendant à faire reconnaître caduque la clause no 7 du contrat de prêt et à faire reconnaître aussi qu’elle n’était plus débitrice des sommes supplémentaires à l’égard de la banque. Le tribunal de première instance et en dernier lieu la Cour de cassation ont estimé que la clause en vertu de laquelle la requérante s’était vue dans l’obligation de rembourser certaines sommes supérieures à celles empruntées n’était pas abusive.

53. La Cour note également qu’il y a eu augmentation du capital emprunté, leur seul désaccord étant quant au montant réel de cette augmentation.

54. Cette augmentation du capital ainsi que l’obligation faite à la requérante en application de la clause 7 du contrat de rembourser certaines sommes supplémentaires, combinées avec l’interprétation du droit interne par les juridictions saisies de manière à exclure tout contrôle du caractère abusif de la clause 7 pourraient constituer une ingérence dans le droit de l’intéressée au respect de ses biens. Une telle éventuelle ingérence ne serait en l’espèce cependant nullement le fait d’une quelconque intervention étatique mais plutôt le résultat d’un litige entre parties privées (la requérante et la banque tierce intervenante).

55. Dans des circonstances telles que celles de l’espèce, la Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle, dans certaines circonstances, l’article 1 du Protocole no 1 peut imposer « certaines mesures nécessaires pour protéger le droit de propriété (…), même dans les cas où il s’agit d’un litige entre des personnes physiques ou morales » (Sovtransavto Holding c. Ukraine (no 48553/99, § 96, CEDH 2002‑VII). Ce principe a été largement appliqué dans le contexte de procédures d’exécution dirigées contre des débiteurs privés (Fuklev c. Ukraine, no 71186/01, §§ 89-91, 7 juin 2005, Kesyan c. Russie, no 36496/02, 19 octobre 2006, et Kotov c. Russie [GC], no 54522/00, § 112, CEDH 2012 , voir également Kin‑Stib et Majkić c. Serbie, no 12312/05, § 84, 20avril 2010, et Marčić et autres c. Serbie, no 17556/05, § 56, 30 octobre 2007).

56. Dans ses arrêts Blumberga c. Lettonie (no 70930/01, § 67, 14 octobre 2008 et Kotov (précité, § 113), la Cour a dit : « [t]oute atteinte au droit au respect des biens commise par un particulier fait naître pour l’État l’obligation positive de garantir dans son ordre juridique interne que le droit de propriété sera suffisamment protégé par la loi et que des recours adéquats permettront à la victime de pareille atteinte de faire valoir ses droits, notamment, le cas échéant, en demandant réparation du préjudice subi ». Il s’ensuit que l’État peut être tenu de prendre en pareilles circonstances soit des mesures préventives, soit des mesures de réparation.

57. Parmi les mesures de réparation que l’État peut être tenu de prendre dans certaines circonstances, il y a la mise en place de voies de droit adéquates permettant à la partie lésée de se prévaloir effectivement de ses droits. L’existence d’obligations positives de nature procédurale sur le terrain de l’article 1 du Protocole no 1, malgré le silence de cette disposition sur ce point, a été reconnue par la Cour aussi bien dans des affaires concernant des autorités de l’État (Jokela c. Finlande, no 28856/95, § 45, CEDH 2002‑IV ; voir également Zehentner c. Autriche, no 20082/02, § 73, 16 juillet 2009) que dans des affaires portant, comme en l’espèce, sur un litige opposant uniquement des particuliers. Ainsi, dans une affaire relevant de la seconde catégorie, la Cour a jugé que l’État avait l’obligation de prévoir une procédure judiciaire offrant les garanties procédurales nécessaires et permettant ainsi aux tribunaux nationaux de trancher efficacement et équitablement tout litige éventuel entre particuliers (Sovtransavto Holding, précité, § 96 ; voir aussi Anheuser-Busch Inc.c. Portugal [GC], no 73049/01, § 83, CEDH 2007‑I, et Freitag c. Allemagne, no 71440/01, § 54, 19 juillet 2007).

58. Enfin, la Cour rappelle que sa tâche consiste à apprécier si la manière dont les juridictions nationales ont tranché un litige relatif à des droits de propriété entre particuliers était conforme au droit interne ainsi qu’à s’assurer que les décisions de celles-ci n’étaient pas arbitraires ou manifestement déraisonnables (voir, en dernier lieu, Kanevska c. Ukraine (déc.), no73944/11, § 45 in fine, 17 novembre 2020).

59. La Cour examinera donc l’affaire sous l’angle des obligations positives exigées par l’article 1 du Protocole no 1, ceci à supposer même qu’une telle disposition est applicable en l’espèce, question qu’elle réitère n’estimer pas nécessaire d’examiner (paragraphe 44 ci-dessus).

B. Sur le respect par l’État de ses obligations positives en la matière

1. Arguments des parties

a) Le Gouvernement

60. Le Gouvernement souligne que la modification de la parité entre deux monnaies peut être considérée certaines fois comme petite ou grande mais jamais inattendue. Le risque synallagmatique a été une conséquence normale du choix de la requérante dans le cadre de sa liberté contractuelle. Il est admis que le choix de contracter un prêt en francs suisses, tant en Grèce que dans d’autres pays, était dû au taux d’intérêt plus attrayant offert par les banques pour les prêts de ce type (2,0633%) par rapport au taux d’intérêt pour les prêts en euros (3,612%). Il est aussi admis que les emprunteurs en francs suisses ont considérablement profité de ce taux d’intérêt plus bas.

61. Le Gouvernement précise que de 2007 à 2012, la requérante a versé la somme de 21 334,93 EUR pour le capital et celle de 20 619,67 EUR pour les intérêts, soit 41 954,60 EUR au total. Si la requérante avait contracté le prêt en euros, elle aurait versé 19 897,77 EUR pour le capital et 26 790,94 EUR pour les intérêts (soit 46 688,71 EUR), une somme supérieure (de 15%) à celle qu’elle a effectivement versée.

62. Le Gouvernement soutient que les emprunteurs en francs suisses, comme la requérante, étaient informés par les banques au sujet du risque synallagmatique avec l’indication d’exemples et par un courrier spécifique. Le Gouvernement souligne que le fait que 90,4% des prêts immobiliers ont été contractés en euros, en dépit du taux d’intérêt plus élevé, démontre que les emprunteurs en francs suisses ont préféré, en connaissance de cause, l’effet immédiat du taux d’intérêt plus bas sans se soucier du risque d’une modification future de la parité. Du reste, il est évident que la requérante était au courant de ce risque car elle a pris des dispositions pour se protéger : ainsi, elle s’était assurée pendant trois ans contre le risque d’augmentation de ses mensualités de remboursement due à une éventuelle hausse du taux de change et avait la possibilité de prolonger cette assurance ; elle s’est assurée contre le risque de décès et celui d’une incapacité totale ; elle savait aussi que dans le contrat de prêt, il y avait une clause lui permettant de demander la conversion de la devise du prêt en euros. Enfin, elle a eu la possibilité de négocier quatre modifications du contrat initial par lesquelles elle a obtenu des extensions des délais et des arrangements quant au remboursement.

63. Le Gouvernement souligne aussi que ce n’était pas le capital emprunté par la requérante qui était fluctuant mais la somme de la mensualité de remboursement en euros en fonction de la fluctuation de la parité. En effet, pendant la durée du prêt, en l’occurrence 25 ans, des faits imprévus peuvent avoir lieu qui entrainent une fluctuation considérable de la parité et ainsi le préjudice patrimonial éventuel du débiteur. Par ailleurs, ni les autorités nationales, ni la banque ne pouvaient prévoir à l’avance la modification du cours de change.

64. Le Gouvernement précise qu’afin de prêter en francs suisses, la banque empruntait elle-même cette devise sur le marché interbancaire en assumant l’obligation de rembourser ses propres prêts au cours du change en vigueur à la date du remboursement. Si la thèse de la requérante devant les juridictions internes de rembourser son prêt au taux en vigueur à la date du décaissement était accueillie, cela causerait un préjudice à la banque. Par ailleurs, le rejet de l’action de la requérante avec les motifs développés par la Cour de cassation ne signifie pas que si les juridictions internes avaient considéré que la clause no 7 n’était pas déclaratoire, elles l’auraient jugée par la suite abusive.

b) La requérante

65. La requérante souligne que la devise du prêt était l’euro et non le franc suisse. Le contrat signé était libellé en euros, car la somme de 150 000 EUR était imprimée dans le contrat à la date de la signature (2 janvier 2007). La case destinée à indiquer la somme en franc suisse est restée vide et a été remplie à la main ultérieurement, à savoir à la date du décaissement de la somme (12 janvier 2007). Tant le décaissement de la somme que le remboursement des mensualités avaient lieu en euros, comme cela était prévu dans le contrat du prêt. En outre, il n’y a jamais eu conversion en francs suisses par la banque des sommes en euros versées pour les mensualités du remboursement.

66. La requérante soutient que la clause litigieuse ne respectait pas le principe de la transparence des conditions générales car elle ne révélait pas son fonctionnement au sein du contrat et la variabilité des remboursements et du capital même. Elle affirme qu’elle n’a jamais été informée par la banque des risques liés au cours des changes, qu’elle n’a jamais reçu de courrier à cet égard et qu’elle n’a pas été informée avant la conclusion du contrat de la possibilité et du coût pour compenser ces risques, comme l’exigent la législation bancaire et le médiateur du consommateur. Elle affirme aussi que les employés de la banque étaient formés seulement pour promouvoir auprès des emprunteurs les avantages du prêt. Les conditions de transparence de la clause litigieuse et le devoir d’information des emprunteurs ont d’ailleurs été soulignés dans plusieurs arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne.

67. La requérante argue que le Gouvernement ne produit aucun document qui prouve que la banque a elle-même emprunté des francs suisses sur le marché interbancaire. La banque n’a jamais décaissé des francs suisses et n’a pas non plus été exposée à un risque lié aux variations du change. En revanche, elle a développé un « jeu » spéculatif par le biais d’un prêt toxique. De manière générale, les banques qui offraient des prêts en francs suisses dans plusieurs pays d’Europe avaient conçu un tel produit bancaire et n’ont pas prévenu ceux qui étaient intéressés par ces prêts de véritables dangers liés au changement de la parité euro/franc suisse. Les banques n’avaient aucune raison de promouvoir ce type de prêt, si elles n’avaient pas prévu de la hausse du cours du franc suisse et le gain spéculatif qui s’ensuivrait pour elles.

2. Observations du tiers intervenant

68. Le tiers intervenant, la banque Eurobank-Ergasias, souligne que le capital que la requérante a emprunté n’a jamais été augmenté en raison du changement du cours de change euro/franc suisse ou pour une autre raison. En revanche, il a été réduit par le remboursement des mensualités qui a été avantagé par le faible taux d’intérêt du franc suisse. Se fondant sur un choix que lui avait donné la banque, la requérante tente de convertir unilatéralement le prêt en francs suisses en prêt en euros, et ainsi d’éviter le risque de change et de profiter du bas taux d’intérêt du franc suisse. Par conséquent, l’allégation selon laquelle le capital du prêt, en tant que prêt en euros, a été augmenté de 60% en raison de la modification du cours de change ne correspond pas à la réalité. La banque souligne aussi qu’elle avait expliqué à la requérante les alternatives que s’offraient à elle, ainsi que les risques liés au change si elle empruntait dans une devise étrangère. Les statistiques de la Banque de Grèce montrent qu’entre 2006 et 2015, 90,4% des prêts immobiliers étaient faits en euros et 9,6% seulement en francs suisses, en dépit du bas taux d’intérêt du franc suisse. Cela constitue une preuve claire de ce que les emprunteurs étaient informés par les banques des risques que comportaient les prêts en francs suisses.

69. Le tiers intervenant soutient que les décisions de justice en l’espèce portaient sur le prêt et non sur la propriété de la requérante, de sorte qu’il ne saurait être soutenu que les tribunaux ou l’État ont porté atteinte à cette propriété. L’article 1 du Protocole no 1 ne permet pas de dégager un débiteur de ses dettes découlant d’un contrat signé avec une entité privée, telle une banque. La dévaluation d’une monnaie locale (en l’occurrence de l’euro) par rapport à une devise (en l’occurrence le franc suisse) ne peut pas être attribuée à un État en particulier, et encore moins à la Grèce qui est un petit pays dont l’économie a peu d’effet sur la valeur de l’euro par rapport à d’autres devises. En outre, les juridictions grecques n’avaient pas le choix de décider différemment car elles ont appliqué la législation européenne, soit la directive 93/13/UE, et les arrêts de la Cour de justice. Par ailleurs, la Cour de cassation a considéré que la clause no 7 du contrat de prêt reflétait l’article 291 du code civil et que pour cette raison elle ne pouvait être abusive. Enfin, l’article 291 ne peut pas être considéré comme étant compatible avec l’article 1 du Protocole no 1 lorsque le taux de change est favorable au débiteur et incompatible lorsqu’il lui est défavorable. Après tout, le prêteur – dans le cadre du système bancaire international – est un débiteur envers ses propres créanciers dont il a emprunté en devises étrangères pour prêter ensuite en devises étrangères.

3. Appréciation de la Cour

70. Afin de se prononcer sur la question de savoir si l’État défendeur a respecté ses obligations positives en l’espèce, la Cour estime opportun de rappeler le contexte dans lequel les faits de la cause ont eu lieu. Ainsi, elle note que notamment entre 2006 et 2010 les banques accordaient aux particuliers des prêts immobiliers en francs suisses. En particulier, l’emprunteur recevait le prêt en euros, à la suite de la conversion du franc suisse en euros, au taux de change en vigueur à la date du décaissement. Ces contrats de prêt contenaient une clause stéréotypée qui prévoyait que le remboursement du prêt par le débiteur aurait lieu soit en devises, soit en euros mais au taux de change, par rapport au franc suisse, en vigueur à la date du remboursement. Cette obligation faite par le contrat aux débiteurs s’est avérée défavorable pour eux. Tandis qu’en 2007, la parité euros/franc suisse était de 1 : 1,61 environ, en 2015, en raison de la revalorisation du franc suisse, elle a atteint 1 : 1,20 environ. Cela signifiait qu’à la date du remboursement de son prêt, l’emprunteur devait rembourser une somme en euros supérieure à celle qu’il avait reçue avec le prêt.

71. C’est ce qui a été aussi le cas de la requérante.

Le 2 janvier 2007, la requérante a conclu avec la banque Eurobank‑Ergasias un contrat de prêt pour un montant de 243 225 francs suisses, ce qui correspondait à 150 000 EUR à la date du décaissement le 10 janvier 2007. À la date de l’octroi du prêt, la parité entre le franc suisse et l’euro était de 1/1,6215, mais au 4 février 2015, elle était de 1/1,0175. La requérante a versé pendant plusieurs années les mensualités du remboursement du prêt en euros, jusqu’au 26 février 2015, mais, s’estimant lésée par l’augmentation du cours de change, elle a décidé de saisir les tribunaux.

72. Ainsi, le 18 février 2015, se fondant sur la loi no 2251/1994 relative à la protection des consommateurs, la requérante a saisi le tribunal de grande instance de Thessalonique d’une action contre la banque demandant notamment que soit reconnue caduque comme abusive la clause du contrat de prêt prévoyant la possibilité du remboursement de sa dette en euros sur la base de la parité avec le franc suisse au taux de change en vigueur au jour du remboursement.

73. En premier lieu, le tribunal de première instance a débouté la requérante. Il a considéré, d’une part, qu’il ne pouvait pas examiner cette clause sous l’angle de la directive 93/13/UE car elle était déclaratoire du contenu de l’article 291 du code civil, et d’autre part, qu’elle ne pouvait pas passer pour abusive ou vague (paragraphe 26 ci-dessus). En deuxième lieu, la Cour de cassation, siégeant en formation plénière en raison de l’importance de la question juridique à trancher, a considéré qu’en admettant que l’exclusion des clauses déclaratoires du contrôle de leur caractère abusif se fondait sur une « injonction expresse de la directive 93/13/UE, le tribunal de première instance n’avait pas commis d’erreur car, même si cette exclusion n’était pas transposée dans le droit interne de manière expresse par la loi no 2251/1994, elle y était reflétée dans l’article 2 § 6 de la loi no 2251/1994 par l’effet d’une interprétation du droit communautaire conforme au but de la directive (paragraphe 31 ci-dessus).

74. La Cour note qu’une grande partie des arguments de la requérante et du Gouvernement devant elle est consacrée à l’interprétation de la législation nationale et des textes de l’Union européenne tant par les juridictions grecques que par la Cour de justice de l’Union européenne.

75. La Cour rappelle à cet égard que dans des affaires issues d’une requête individuelle, la Cour n’a point pour tâche de contrôler dans l’abstrait la législation litigieuse; elle doit se borner autant que possible à examiner les problèmes soulevés par le cas dont on l’a saisie (Les saints monastères c Grèce, arrêt du 9 décembre 1994, série A no 301-A, § 55).

76. La Cour note que la modification du taux de change entre l’euro et le franc suisse est intervenue à une période de crise financière qui a touché toute l’Europe, et particulièrement la Grèce, et qui n’a cessé de s’aggraver pendant une longue période. Un tel changement des circonstances était sans doute imprévisible tant pour les banques que pour les emprunteurs et pour ces derniers a atteint un degré tel qui dépassait le risque assumé par un emprunteur lorsque celui-ci, à l’occasion d’un prêt immobilier dans des circonstances normales, fait un choix entre un prêt à taux fixe ou à taux variable. Face à une crise financière d’une telle envergure, l’État se doit prendre des mesures afin d’éviter que des milliers de personnes ayant contracté des prêts immobiliers aient à subir, sans qu’ils en soient responsables, une charge disproportionnée au risque de perdre leurs biens.

77. Toutefois, en l’espèce, la Cour estime que la requérante n’a pas été dans l’ignorance quant aux risques liés à la conclusion d’un contrat de prêt en francs suisses et à la fluctuation vers le haut d’une devise aussi forte que le franc suisse pendant la durée du remboursement du prêt qui s’élevait à 25 ans.

78. Ainsi la Cour relève que la requérante s’était assurée pendant trois ans contre le risque d’une augmentation des mensualités de ses remboursements due à une éventuelle hausse du taux de change (paragraphe 4 ci-dessus) et avait la possibilité de prolonger cette assurance, ce qu’elle n’a pas fait.

79. En outre, le contrat de prêt prévoyait la possibilité pour la requérante de demander à tout moment la conversion de la devise du prêt en euros (paragraphe 62 ci-dessus), ce qu’elle n’a pas fait non plus.

80. Enfin, quatre conventions de modification du contrat initial furent conclues entre la requérante et la banque, respectivement les 29 décembre 2010, 22 août 2011, 2 janvier 2012 et 21 janvier 2015, prévoyant la réduction du montant des versements, des extensions des délais de paiement, voire la suspension provisoire du paiement de certaines mensualités (paragraphes 7-9 ci-dessus).

81. La Cour note, enfin, que de 2007 à 2015, la requérante a payé ses mensualités sans invoquer l’impossibilité de s’acquitter de ses obligations en raison de la fluctuation du taux de change. Or, si elle estimait que ses capacités de remboursement étaient diminuées en raison d’un fait imprévu indépendant d’elle ou de la banque, telle la modification brutale sur le plan international de la parité euro/franc suisse, l’article 388 du code civil (paragraphe 34 ci-dessus) lui offrait la possibilité de demander en justice la renégociation du prêt voire la résiliation du contrat. Or, ce que n’a pas demandé la requérante s’est finalement produit soudainement par la survenance de l’incapacité de celle-ci, ce qui a fait intervenir l’assurance souscrite à cet effet par elle.

82. En bref, la Cour constate que le droit interne offrait à la requérante des voies de recours adéquates pour faire valoir ses droits relatifs au respect des biens : le recours en annulation devant les juridictions civiles de la clause du contrat de prêt qu’elle estimait abusive, voie qu’elle a d’ailleurs utilisée ; la possibilité de demander en justice la renégociation ou même la résiliation du contrat sur le fondement de l’article 388 du code civil. À cela s’ajoutent les possibilités offertes par le contrat lui-même, d’une part, de demander à tout moment à la banque la conversion de la devise du prêt en euros et de s’assurer contre le risque de l’augmentation des mensualités des remboursements. Quant à l’effectivité de la voie de droit pour laquelle elle a opté, la Cour note que la requérante a eu l’opportunité de développer tous ses arguments devant les juridictions compétentes et d’obtenir un arrêt motivé de manière détaillée et rendu par la formation plénière de la Cour de cassation.

83. Enfin, la Cour note que la Cour de cassation, sans se référer explicitement à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, a interprété le droit interne de manière conforme à l’interprétation que fait du droit européen pertinent la Cour de Justice de l’Union européenne. En particulier, dans son arrêt récent NG et OH c. SC Banca Transilvania (paragraphe 42 ci-dessus) mais aussi dans toute une série d’arrêts portant sur les mêmes questions (paragraphe 43 ci-dessus), la Cour de Justice a en effet considéré que l’article 1, paragraphe 2, de la directive 93/13/UE (paragraphe 38 ci-dessus) doit être interprété comme signifiant qu’une clause contractuelle qui n’est pas négociée individuellement, mais qui reflète une règle laquelle, selon le droit interne, s’applique aux parties contractantes, n’est pas couverte par cette directive. Plus précisément, la Cour de justice, a-t-elle souligné, que cette clause ne peut pas être soumise à un examen quant à son caractère abusif car la législation nationale a déjà établi un équilibre entre les droits et obligations des parties dans ce type de contrats.

84. Il s’ensuit que le cadre légal mis en place par l’État offrait à la requérante un mécanisme lui permettant de faire respecter les droits que lui garantissait l’article 1 du Protocole no 1. Dès lors, la Cour conclut que l’État défendeur a satisfait aux obligations positives découlant pour lui de cette disposition, et ceci à supposer même que cette dernière s’appliquait en l’espèce.

85. Au vu de tout ce qui précède, la Cour estime que la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Déclare la requête irrecevable.

Fait en français puis communiqué par écrit le 11 février 2021.

Renata Degener                                   Ksenija Turković
Greffière adjointe                                    Présidente

______________

[1] Le mécanisme du déboursement et du remboursement des prêts en francs suisses fonctionne comme suit : le déboursement du prêt à l’emprunteur a lieu en créditant la somme en francs suisses sur un compte en francs suisses de l’emprunteur. Par la suite, afin d’utiliser le prêt (achat d’un appartement par la requérante) les francs suisses sont convertis en euros au moyen de la vente des francs à la banque et de l’acquisition d’euros. Comme le contrat précise que le prêt se fait en francs suisses, le calcul des mensualités se fait aussi en francs suisses. La banque se procure les francs suisses sur le marché interbancaire pour les prêter ensuite aux particuliers. Le remboursement du prêt se fait en francs suisses. Si l’emprunteur n’a pas de francs suisses, il peut payer la somme équivalente en euros, que la banque changeait alors en francs suisses. Le compte du prêt est crédité en francs suisses.
[2] La somme versée par la compagnie d’assurance ne correspondait pas au montant initial du prêt mais à celui qui était dû au moment de la survenance de l’incapacité de la requérante, si elle n’avait pas bénéficié des conventions de modification du contrat initial. L’assurance aurait remboursé la totalité du capital restant dû du prêt si ces conventions de modifications n’avaient pas été conclues.

Dernière mise à jour le février 11, 2021 par loisdumonde

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