AFFAIRE IATRIDIS ET AUTRES c. GRÈCE (Cour européenne des droits de l’homme) Requête no 25993/17 et 2 autres – voir liste en annexe

PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE IATRIDIS ET AUTRES c. GRÈCE
(Requête no 25993/17 et 2 autres – voir liste en annexe)
ARRÊT
STRASBOURG
19 novembre 2020

Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Iatridis et autres c. Grèce,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en un comité composé de :
Aleš Pejchal, président,
Pauliine Koskelo,
Tim Eicke, juges,
et de Renata Degener, greffière adjointe de section,

Vu :

les requêtes (nos 25993/17, 32048/17 et 32053/17) dirigées contre la République hellénique et dont un ressortissant de cet État, M. Andreas‑Xanthippos Iatridis, un ressortissant bulgare, M. Tihomir Mitsovski, et un ressortissant roumain, M. Daniel Stefan Manolea (« les requérants ») ont saisi la Cour en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention ») aux dates indiquées dans le tableau joint en annexe,

la décision de porter à la connaissance du gouvernement grec (« le Gouvernement ») les griefs concernant les articles 3 et 13 de la Convention quant aux conditions générales régnant dans la prison de Larissa et de déclarer irrecevables les requêtes pour le surplus,

les observations des parties,

le fait que les gouvernements Bulgare et Roumain n’ont pas usé de leur droit d’intervenir dans la procédure (article 36 § 1 de la Convention)

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 20 octobre 2020,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

INTRODUCTION

1. La requête concerne les conditions de détention des requérants dans la prison de Larissa, ainsi que l’absence de recours effectif à cet égard.

EN FAIT

2. Les informations relatives aux requérants figurent en annexe. Ceux-ci ont été représentés par Mes C. Lampakis et I. Pipertzi, avocats au barreau de Thessalonique.

3. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par la déléguée de son agent, Mme S. Papaioannou, auditrice auprès du Conseil juridique de l’État.

4. Les gouvernements bulgare et roumain n’ont pas usé de leur droit d’intervenir dans la procédure (article 36 § 1 de la Convention).

I. Les conditions de détention selon les requérants

5. Tous les requérants se plaignent des conditions de détention qui ont été ou sont les leurs à la prison de Larissa. Ils décrivent leurs conditions de détention comme suit.

6. Le requérant de la requête no 25993/17 expose qu’il a d’abord été détenu avec neuf autres personnes dans la chambrée no 4 du rez-de-chaussée de l’aile B, d’une superficie de 25 m2 (incluant les toilettes). Selon lui, l’espace personnel disponible pour chacun des détenus était de 2,2 m2. Ce requérant a par la suite été placé dans la chambrée no 9 de l’aile E, où quinze personnes au total étaient incarcérées. Dans le meilleur des cas, chaque détenu y disposait de 1,2 m2 d’espace personnel.

7. Le requérant de la requête no 32048/17 expose qu’il a d’abord été détenu, avec de neuf à quinze autres personnes, dans la chambrée no 10 de l’aile E, ainsi que dans les chambrées nos 5 et 7 de l’aile B, d’une superficie de 25 m2 (incluant les toilettes) chacune. Il a par la suite été placé dans la chambrée no 1 de l’aile D. Dans le meilleur des cas, chaque détenu y disposait de 2,1 m2 d’espace personnel.

8. Le requérant de la requête no 32053/17 expose qu’il a d’abord été détenu avec neuf autres personnes dans la cellule no 4 de l’aile B, d’une superficie de 10 m2 sans les toilettes. Chaque détenu y disposait de 1 m2 d’espace personnel. L’intéressé ajoute que par la suite il a été placé dans la cellule no 3 de l’aile E.

9. Selon les requérants, les cellules ne disposent ni d’eau chaude, ni de lumière artificielle suffisante, ni de linge de lit, ni d’étagères. Les murs sont abîmés par l’humidité, et la présence de détritus et de restes de nourriture jetés dans la cour de l’établissement engendre des odeurs insupportables. En effet, les détenus prennent leurs repas dans leurs cellules et n’ont pas d’autre choix que de jeter les restes par la fenêtre ; plusieurs heures, voire plusieurs jours, s’écoulent avant qu’il ne soit procédé à l’enlèvement de ces restes. Outre les odeurs qu’ils dégagent, ces détritus attirent rats, cafards, puces et divers autres insectes. Les requérants exposent que, comme il ressort d’un document du 6 octobre 2017 établi par la prison et soumis par le Gouvernement, c’est le surpeuplement de la prison qui est la cause de la prolifération des cafards et d’autres insectes dans le bâtiment. Les désinfections et les dératisations ne résolvent pas les problèmes d’hygiène.

10. Les cellules sont dépourvues de tables et d’armoires de rangement pour les vêtements. L’état des matelas, vieux et crasseux, est déplorable. La poussière et la vétusté des matelas ainsi que du linge de lit exacerbent le risque pour la santé respiratoire des détenus. Ceux-ci ne reçoivent aucun produit d’hygiène personnelle. Les détenus en bonne santé ne sont pas séparés des détenus malades, séropositifs ou toxicomanes. Les locaux de la prison ne disposent pas de poubelles ; la prison fournit aux détenus des paniers qui permettent de collecter les ordures qui seront ensuite jetées dans les poubelles de la cour.

11. En hiver, la situation devient encore plus difficile ; le chauffage étant insuffisant, les fenêtres restent fermées et les locaux de la prison ne sont donc pas correctement aérés, ce qui augmente le risque d’infection et de maladie. Les requérants se plaignent également de ce que la prison ne dispose pas d’un médecin permanent et ils allèguent que, faute de personnel, les programmes éducatifs et les activités ne sont pas toujours disponibles.

12. Les requérants éprouvent un sentiment d’enfermement du fait de la répétitivité fastidieuse de leurs gestes et de leur inactivité pendant le temps où ils sont obligés de rester dans leurs cellules. Les repas sont de mauvaise qualité, ils sont servis en portions modestes et ils ne comprennent de la viande qu’une fois par semaine. Ils sont de plus préparés à base de produits surgelés. Depuis 2010, les portions sont réduites. Des fruits sont distribués seulement quatre jours par semaine et ils sont de mauvaise qualité.

13. Les requérants ajoutent que la situation dans la prison ne s’est pas améliorée après l’application de la loi no 4322/2015 relative au désengorgement des prisons (« la loi no 4322/2015 »), que l’établissement, d’une capacité théorique de 450 à 554 détenus, en accueille en réalité 650, et que le problème de surpeuplement persiste. Ils précisent que, selon un document établi par la prison de Larissa, celle-ci était destinée à accueillir des prévenus, des condamnés pour dettes ainsi que des personnes devant purger des peines de quelques mois d’emprisonnement. Toutefois, du fait du surpeuplement, les détenus ne sont plus sélectionnés.

II. Les conditions de détention selon le Gouvernement

14. Le Gouvernement expose que les requérants ont été ou sont détenus dans les conditions précisées dans les tableaux ci-dessous. Il soumet des documents préparés par le directeur de la prison de Larissa, qui contiennent des informations détaillés sur les cellules où les requérants ont été détenus.

15. Ces tableaux indiquent pour chaque cellule la surface hors sanitaires (d’après le Gouvernement), qui n’est pas contestée par les requérants.

A. Requête no 25993/17

No de cellule Période de détention Nombre total de détenus Surface totale

en m2

Espace personnel
en m2
Chambrée no 4, au rez-de-chaussée de l’aile B  21/03/2016 – 30/09/2016 6-7 23,5 3,9-3,3
Chambrée no 2 de l’aile E  30/09/2016 – 17/10/2016 9-11 34,5 3,8-3,1
Cellule no 6 de l’aile E 17/10/2016 – 12/01/2017 2-3 12,2 6,1-4
Chambrée no 1 de l’aile E 12/01/2017 – 03/05/2017 9-11 37 4,1-3,3
Cellule no 4 de l’aile E 03/05/2017 – 26/07/2017 2-3 12,2 6,1-4
Cellule no 7 de l’aile E 26/07/2017 – 03/08/2017 2-3 12,2 6,1-4
Cellule no 4 de l’aile E 03/08/2017 2-3 12,2 6,1-4

B. Requête no 32048/17

No de cellule Période de détention Nombre total de détenus Surface totale

en m2

Espace personnel
en m2
Chambrée no 5, au premier étage de l’aile B 14/06/2011 – 11/08/2011 8-10 23,5 2,9-2,3
Chambrée no 4, au premier étage de l’aile B 11/08/2011 – 30/09/2011 8-10 23,5 2,9-2,3
Chambrée no 5, au premier étage de l’aile B 30/09/2011 – 20/09/2012 8-10 23,5 2,9-2,3
Chambrée no 1 (réservée aux détenus exerçant une activité dans la prison) 20/09/2012 – 11/07/2013 81 314,62 3,9
Chambrée no 5, au premier étage de l’aile B 11/07/2013 – 19/01/2014 8-10 23,5 2,9-2,3
Chambrée no 1 (réservée aux détenus exerçant une activité dans la prison) 19/01/2014 – 21/04/2015 81 314,62 3,9
Chambrée no 7, au rez-de-chaussée de l’aile B 21/04/2015 – 22/04/2015 8-10 23,5 29,9-2,35
Chambrée no 7, au premier étage de l’aile B  22/04/2015 – 28/01/2016 6-8 23,5 3,9-2,9
Cellule no 7 de l’aile E 28/01/2016 – 06/06/2016 3 12,2 4
Chambrée no 1 de l’aile E 06/06/2016 – 06/02/2017 9-11 37 4,1-3,3
Chambrée no 2 de l’aile E 06/02/2017 – 05/05/2017 9-11 34,56 3,8-3,1

C. Requête no 32053/17

No de cellule Période de détention Nombre total de détenus Surface totale

en m2

Espace personnel
en m2
Chambrée no 4, au premier étage de l’aile B 22/07/2011 – 30/07/2015

(Selon le Gouvernement, depuis mai 2015 le requérant disposait de plus de 3 m2)

7 (maximum) 23,5 3,3
Chambrée no 4, au rez-de-chaussée de l’aile C 30/07/2015 – 26/10/2015 7 23,5 3,3
Cellule no 3 de l’aile E 26/10/2015 – 16/08/2017 3 (maximum) 12,2 4
Chambrée no 4, au premier étage de l’aile B 16/08/2017 7 (maximum) 23,5 3,3

16. Le Gouvernement indique que la prison de Larissa a été conçue pour accueillir 554 personnes, si l’on compte au moins 4 m2 par détenu. Il ajoute que de 2011 jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi no 4322/2015, c’est-à-dire au deuxième semestre de 2015, 900 personnes y étaient détenues, ce qui engendrait des problèmes de surpeuplement. En conséquence, chacune des chambrées de l’aile B, d’une superficie de 23,5 m2, accueillait jusqu’à dix détenus. Le Gouvernement ajoute cependant qu’à partir du mois d’avril 2015 et de l’application de la loi no 4322/2015 le nombre de détenus dans cet établissement a considérablement diminué, et qu’il oscillait entre 575 et 650 personnes. Il expose qu’une superficie totale de 2 216 m2 était consacrée aux cellules et aux chambrées, de sorte que chaque détenu disposait de plus de 3 m2 d’espace personnel. Il considère dès lors que la prison ne se trouvait pas dans une situation de surpeuplement pendant la période de détention des requérants.

17. Le Gouvernement indique que les chambrées des ailes B et C sont équipées de cinq lits superposés, de literie, d’une télévision, de deux à trois tables à manger et du nombre correspondant de tabourets, de tables de chevet, d’un petit réfrigérateur et de cintres. Les chambrées sont aussi dotées de deux fenêtres de 1,4 m x 1,5 m chacune ainsi que d’un éclairage artificiel suffisant. Des espaces indépendants d’une superficie de 5,05 m2 chacun, comportant des toilettes et une douche, sont adjoints aux chambrées.

18. Le Gouvernement ajoute que les chambrées de l’aile E sont équipées de six lits superposés, de literie, d’une télévision, de deux à trois tables à manger et du nombre correspondant de tabourets, de tables de chevet et de cintres. Les chambrées sont aussi dotées de trois fenêtres de 1,1 m x 1,1 m chacune ainsi que d’un éclairage artificiel suffisant. Deux WC d’une superficie de 1,6 m x 0,9 m chacun sont adjoints aux chambrées, et deux lavabos et deux douches sont installés dans un espace indépendant attenant, d’une superficie de 2,2 m x 1,85 m.

19. Les cellules de l’aile E sont équipées de deux lits superposés, de literie, d’une télévision, d’une table à manger et du nombre correspondant de tabourets, de tables de chevet et de cintres. Les cellules sont aussi dotées d’une fenêtre de 1,1 m x 1,1 m ainsi que d’un éclairage artificiel suffisant. Un espace indépendant, d’une superficie de 1,8 m2, comportant des toilettes, un lavabo et une douche, est adjoint aux cellules.

20. La chambrée no 1, occupée par des détenus exerçant une activité en prison, dans laquelle les requérants ont été placés, dispose de quarante-cinq lits superposés, de literie, d’une télévision par lit superposé, de tables de trois à quatre places avec le nombre correspondant de tabourets, d’une table de chevet pour chaque détenu, d’un réfrigérateur, d’un réfrigérateur-congélateur et de cintres. Elle est dotée de neuf fenêtres de 1,55 m x 1,65 m chacune ainsi que d’un éclairage artificiel suffisant. Dans un espace indépendant se trouvent neuf WC de 1,2 m x 0,9 m chacun, six douches et six lavabos. Dans le même espace sont aménagés cinq débarras de 1,2 m x 0,9 m chacun.

21. La prison comporte des cours de promenade de superficies variables : 1 425,5 m2 pour l’aile A ; 1 242 m2 pour l’aile B ; 1 852,5 m2 pour l’aile C ; 580 m2 pour les ailes TE1 et TE2, et 399 m2 pour l’aile E.

22. La prison dispose d’un certificat de protection active contre l’incendie. En hiver, les locaux sont chauffés par des radiateurs qui sont installés tant à l’intérieur des chambrées et des salles de bain que dans les espaces communs et le chauffage est adapté aux conditions météorologiques qui règnent dans la région. L’eau chaude est disponible tous les jours pendant la majeure partie de la journée. Le ménage dans les cellules est effectué quotidiennement et un nettoyage général a lieu une à deux fois par semaine. Les cours sont nettoyées une à deux fois par mois. Les ordures sont collectées trois fois par jour et les détenus ont accès à des poubelles. Les détenus ont aussi accès à une machine à laver et à des détergents pour laver leur linge de lit. Une entreprise extérieure procède régulièrement à des désinfections et à des dératisations et les services sanitaires contrôlent l’établissement. Les détenus reçoivent du papier hygiénique et du savon. En collaboration avec des organisations caritatives, le service social de la prison leur fournit en outre des produits d’hygiène corporelle.

23. L’établissement prend financièrement en charge les soins médicaux prodigués aux détenus. Deux médecins généralistes extérieurs assurent des visites à la prison, laquelle dispose d’un dentiste et de huit aides-soignants permanents. En cas de besoin, les détenus sont transférés immédiatement ou sur rendez-vous dans l’un des hôpitaux de la ville de Larissa. Tout nouveau détenu est conduit à l’hôpital pour y subir un dépistage des maladies contagieuses. Les détenus atteints d’une maladie contagieuse ne sont pas placés dans la même cellule que les autres. Deux psychologues permanents réalisent 1 100 consultations par an au sein de la prison.

24. Le Gouvernement indique que les détenus reçoivent trois repas par jour et qu’un médecin vérifie les menus et supervise la qualité de la nourriture. Il a versé au dossier à titre d’exemple plusieurs menus hebdomadaires ainsi que le programme journalier des détenus. Pour se distraire, ceux-ci peuvent regarder la télévision, pratiquer certains sports (basketball, football) ou encore faire de l’exercice dans l’une des cours de promenade de la prison ou dans la salle de sport, qui est dotée d’équipements d’haltérophilie et d’un sac de boxe. En outre, au deuxième étage de chaque aile se trouve une table de tennis de table. Des activités culturelles sont régulièrement organisées par des associations dans l’enceinte de la prison, et les détenus peuvent aussi suivre des cours à l’école de la « deuxième chance » et fréquenter la bibliothèque.

25. Le Gouvernement indique que le requérant de la requête no 25993/17 a participé aux expositions de peinture, ainsi que, en tant qu’élève de l’école de la « deuxième chance », aux activités organisés par cette dernière. Qui plus est, les détenus ont la possibilité de travailler au sein de la prison en contrepartie d’une réduction de leur peine. Ainsi, le requérant de la requête no 25993/17, qui a participé à l’école de la « deuxième chance » et a travaillé en tant qu’agent d’entretien, a bénéficié du « calcul avantageux » de 352 jours environ. Le requérant de la requête no 32048/17 a travaillé en tant que cuisinier et agent d’entretien et le requérant de la requête no 32053/17 a travaillé en tant que serveur et agent d’entretien. Ils ont bénéficié du « calcul avantageux » de respectivement 1 121 et 1 258 jours environ.

LE CADRE JURIDIQUE ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

26. Les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) ainsi que les dispositions du droit interne pertinents en l’espèce sont décrits dans les arrêts Christodoulou et autres c. Grèce (no 80452/12, §§ 45-47, 5 juin 2014), et Ali Cheema et autres c. Grèce (no 7059/14, §§ 41-44, 7 avril 2016).

EN DROIT

I. JONCTION DES REQUÊTES

27. Eu égard à la similarité de l’objet des requêtes, la Cour juge opportun de les examiner conjointement dans un seul arrêt.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION

28. Les requérants se plaignent des conditions de détention qui ont été ou sont les leurs dans la prison de Larissa. Ils invoquent l’article 3 de la Convention, qui est ainsi libellé :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

A. Sur la recevabilité

1. Arguments des parties

29. Le Gouvernement soutient que les requérants des requêtes nos 32048/17 et 32053/17 n’ont pas respecté le délai de six mois. Il estime qu’un changement du régime de détention d’un requérant, fût-ce au sein de la même prison, met un terme au caractère continu de la détention, et qu’un nouveau délai de six mois commence à courir à partir de la date du transfert dans le nouveau lieu de détention.

30. En l’occurrence, il considère qu’à la suite de l’entrée en vigueur de la loi no 4322/2015 le nombre de détenus dans la prison de Larissa a considérablement diminué et que l’établissement n’a plus connu de problèmes de surpeuplement (paragraphe

16 ci-dessus).

31. Ainsi le Gouvernement estime-t-il que les requérants des requêtes nos 32048/17 et 32053/17 auraient dû introduire leurs requêtes dans un délai de six mois à partir du mois d’avril 2015, date de l’entrée en vigueur de la loi no 4322/2015, et, en tout état de cause, à partir du 28 janvier 2016 et du 30 juillet 2015 respectivement, dates à compter desquelles ils ont bénéficié de conditions de détention compatibles avec l’article 3 de la Convention. Il considère qu’à partir de ces dates, les requérants ont bénéficié de plus de 3 m2 d’espace personnel et que les conditions dans lesquelles ils étaient détenus étaient différentes, de sorte que l’on ne pouvait plus parler de situation continue.

32. Les requérants rétorquent que les conditions de détention dans la prison de Larissa n’ont pas changé après l’entrée en vigueur de la loi no 4322/2015 et que, depuis leur placement dans cette prison jusqu’à leur mise en liberté, ou, selon le cas, jusqu’à la date de leurs observations, ils ont été détenus dans des conditions contraires à l’article 3 de la Convention. Ils arguent que la loi no 4322/2015 n’a apporté qu’un « soulagement provisoire » au système pénitentiaire et que le problème de surpeuplement persiste. Ils estiment que l’exception de non-respect du délai de six mois soulevée par le Gouvernement concerne en réalité le fond de l’affaire et que, avant de se prononcer sur cette question, la Cour doit d’abord déterminer si les conditions en cause constituent ou non une violation de l’article 3 de la Convention. Ils invitent la Cour à rejeter l’exception du Gouvernement.

2. Appréciation de la Cour

33. La Cour rappelle l’approche qui est la sienne concernant l’application de la règle des six mois aux griefs relatifs aux conditions de détention : la période totale pendant laquelle un requérant a été détenu peut être considérée comme une « situation continue » pour autant que la détention a eu lieu dans un même type d’établissement pénitentiaire et dans des conditions essentiellement similaires. Les courtes périodes pendant lesquelles le requérant a dû quitter cet établissement, par exemple pour les besoins d’une audience ou d’autres actes procéduraux, n’ont pas d’incidence sur le caractère continu de la détention. Toutefois, la mise en liberté du requérant ou son assujettissement à un autre régime de détention, que ce soit à l’intérieur de l’établissement ou à la suite de son transfert, met fin à la « situation continue » (Fetisov et autres c. Russie, nos 43710/07 et 5 autres, § 78, 17 janvier 2012).

34. En l’espèce, la Cour constate que les requérants des requêtes nos 32048/17 et 32053/17 ont passé toute leur détention dans la prison de Larissa, et que leur régime de détention est resté le même. En effet, le Gouvernement n’allègue pas que le régime de détention de ces requérants a changé respectivement le 28 janvier 2016 et le 30 juillet 2015, mais uniquement qu’à partir de ces dates l’établissement ne connaissant plus de situation de surpeuplement, les intéressés ont bénéficié de conditions de détention compatibles avec l’article 3 de la Convention.

35. Par conséquent, la Cour estime que les requérants peuvent se prévaloir d’une situation continue. Dès lors, elle rejette l’exception de non‑respect du délai de six mois soulevée par le Gouvernement.

36. Constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 de la Convention et qu’il ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Arguments des parties

37. Les requérants se réfèrent à leur version des conditions de détention dans la prison de Larissa (paragraphes 5-13 ci-dessus). Se plaignant principalement d’une surpopulation au sein de cette prison, ils renvoient aux arrêts Kanakis c. Grèce (no 2) (no 40146/11, 12 décembre 2013), Bouros et autres c. Grèce (nos 51653/12 et 4 autres, § 77, 12 mars 2015), Ali Cheema et autres (précité, § 54), et Kalandia c. Grèce (no 48684/15, §§ 68 et 74, 6 octobre 2016) ainsi qu’aux constats dressés par le CPT (paragraphe 26 ci‑dessus), et soutiennent qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention. Ils indiquent que, selon le rapport du CPT, les cellules de 23 m2 contiennent cinq lits superposés. Ils estiment que ces cellules sont donc conçues pour accueillir dix détenus chacune. Ils considèrent par conséquent qu’ils ont été et qu’ils continuent d’être détenus dans des cellules offrant 2,3 m2 d’espace personnel par détenu.

38. Le requérant de la requête no 25993/17 expose que, selon les observations du Gouvernement, du 21 mars 2016 au 30 septembre 2016 il a été détenu dans la chambrée no 4 du rez-de-chaussée de l’aile B, où il disposait d’un espace personnel de 3,3 m2. Il ajoute que la situation n’était pas différente dans les autres chambrées où il a été placé. À titre d’exemple, il indique que du 30 septembre 2016 au 17 octobre 2016 il a séjourné dans la chambrée no 2 de l’aile E, où il disposait de 3,1 m2 d’espace personnel. Il considère que l’espace personnel qui lui a été accordé était à la limite du tolérable selon la jurisprudence de la Cour.

39. Le requérant de la requête no 32048/17 expose que, selon les observations du Gouvernement, du 14 octobre 2011 au 28 janvier 2016 l’établissement connaissait un important problème de surpeuplement. Il ajoute que par la suite la situation n’a pas changé. Ainsi, il indique que du 22 avril 2015 au 28 janvier 2016 il a séjourné dans la chambrée no 7 du premier étage de l’aile B, où il disposait d’un espace personnel de 2,9 m2. Il ajoute que la situation n’était pas différente dans les autres chambrées où il a été placé. À titre d’exemple, il indique que du 6 juin 2016 jusqu’à la date de sa mise en liberté il a été détenu dans des chambrées de l’aile E, où il disposait de 3,1 à 3,3 m2 d’espace personnel. Il considère que l’espace personnel qui lui a été accordé était à la limite du tolérable selon la jurisprudence de la Cour.

40. Le requérant de la requête no 32053/17 expose que, selon les observations du Gouvernement, du 22 juillet 2011 au 30 juillet 2015 l’établissement connaissait un important problème de surpeuplement. Il ajoute que par la suite la situation n’a pas changé. Ainsi, il indique que du 30 juillet 2015 au 26 octobre 2015 il a séjourné dans la chambrée no 4 du rez-de-chaussée de l’aile C, où il disposait d’un espace personnel de 3,3 m2. Il ajoute que la situation n’était pas différente dans les autres chambrées où il a été placé. À titre d’exemple, il avance que depuis le 16 août 2017 il est détenu dans la chambrée no 4 de l’aile B, où il dispose de 3,3 m2 d’espace personnel. Il considère que l’espace personnel qui lui a été accordé est à la limite du tolérable selon la jurisprudence de la Cour.

41. Les requérants ajoutent que, selon la jurisprudence de la Cour, d’autres facteurs tels que l’accès aux sanitaires, la ventilation, le chauffage et l’éclairage des cellules ainsi que l’hygiène doivent être pris en considération lorsqu’il s’agit d’évaluer la conformité à l’article 3 de la Convention.

42. Le Gouvernement se réfère à sa propre version des conditions de détention des requérants dans la prison de Larissa (paragraphes 14-25 ci‑dessus) et estime que, même dans l’hypothèse où elles ne seraient pas considérées comme satisfaisantes, ces conditions ne dépassent pas le seuil de gravité requis pour que l’on puisse les assimiler à un traitement inhumain ou dégradant. En ce qui concerne le requérant de la requête no 25993/17, le Gouvernement estime que celui-ci a toujours disposé de plus de 3 m2 d’espace personnel. Quant au requérant de la requête no 32048/17, le Gouvernement soutient qu’il disposait de plus de 3 m2 d’espace personnel pendant son séjour dans la chambrée no 1 réservée aux détenus exerçant une activité ainsi que dans les chambrées et cellules qu’il a occupées après le 22 avril 2015 et jusqu’à sa libération. Enfin, en ce qui concerne le requérant de la requête no 32053/17, le Gouvernement expose qu’après mai 2015 celui-ci disposait de plus de 3 m2 d’espace personnel. Il ajoute que dans leurs observations les requérants ne précisent pas si les conditions de détention dans la prison de Larissa les ont affectés personnellement.

2. Appréciation de la Cour

43. En ce qui concerne les conditions matérielles dans les lieux de détention, la Cour renvoie aux principes ressortant de sa jurisprudence et notamment à l’arrêt Muršić c. Croatie ([GC], no 7334/13, §§ 96-141, 20 octobre 2016).

C. Quant aux requérants des requêtes nos 25993/17, 32048/17 (en dehors des périodes comprises entre le 14 juin 2011 et le 20 septembre 2012 et entre le 11 juillet 2013 et le 19 janvier 2014) et 32053/17

44. La Cour note qu’il n’est pas contesté par les requérants dans leurs observations que, comme le Gouvernement le soutient, tous les intéressés, hormis le requérant de la requête no 32048/17 pour les périodes comprises entre le 14 juin 2011 et le 20 septembre 2012 et entre le 11 juillet 2013 et le 19 janvier 2014, ont été placés dans des cellules où leur espace personnel était supérieur à 3 m2. Eu égard à la jurisprudence de la Cour, un tel espace personnel ne saurait être constitutif, à lui seul, d’une violation de l’article 3 de la Convention (Muršić, précité, §§ 96-141).

45. Quant aux autres griefs des requérants, la Cour relève que les intéressés ne précisent ni comment ni dans quelle mesure ils ont été personnellement affectés par ces problèmes, que le CPT a également constatés dans cette prison (paragraphe 26 ci-dessus). La simple référence au rapport du CPT ne suffit pas à réfuter les allégations précises faites sur ce point par le Gouvernement en réponse aux griefs vagues et généraux soulevés par les requérants sur les différents aspects de la détention. La Cour note par ailleurs que tous les requérants travaillaient au sein de la prison.

46. Dans ces circonstances, elle estime que les conditions de détention des requérants susmentionnés ne sauraient, à la lumière des informations qui lui ont été fournies, être considérées comme contraires à l’article 3 de la Convention, notamment sous l’angle des effets de la surpopulation carcérale. Il s’ensuit qu’il n’y a pas eu violation de cette disposition à leur égard.

D. Quant au requérant de la requête no 32048/17 (pour les périodes comprises entre le 14 juin 2011 et le 20 septembre 2012 et entre le 11 juillet 2013 et le 19 janvier 2014)

47. Selon les informations fournies par le requérant et le Gouvernement, l’espace personnel octroyé à l’intéressé pour les périodes comprises entre le 14 juin 2011 et le 20 septembre 2012 et entre le 11 juillet 2013 et le 19 janvier 2014 oscillait entre 2,3 et 2,9 m2. Il est donc arrivé par moments que l’espace personnel mis à la disposition de l’intéressé fût inférieur à 3 m2. Il est à noter sur ce point que, selon le rapport du CPT publié après sa visite de la prison de Larissa en 2013, jusqu’à douze détenus séjournaient dans certaines cellules de l’aile A (paragraphe 26 ci-dessus), de sorte que l’espace personnel pour chacun d’eux n’excédait pas 2 m2.

48. Il y a donc eu violation en l’espèce de l’article 3 de la Convention à raison de l’absence d’espace personnel suffisant pour le requérant de la requête no 32048/17 pendant les périodes comprises entre le 14 juin 2011 et le 20 septembre 2012 et entre le 11 juillet 2013 et le 19 janvier 2014. Cette conclusion dispense la Cour d’examiner les autres griefs formulés par l’intéressé concernant d’autres aspects de sa détention.

III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 13 DE LA CONVENTION

49. Les requérants soutiennent n’avoir disposé d’aucun recours effectif pour se plaindre de leurs conditions de détention. Ils invoquent l’article 13 de la Convention, qui est ainsi libellé :

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (…) Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »

A. Sur la recevabilité

50. Constatant que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 de la Convention et qu’il ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Arguments des parties

51. Les requérants considèrent qu’ils ne disposaient d’aucun recours pour se plaindre de leurs conditions de détention. Ils répètent pour l’essentiel leurs arguments concernant la recevabilité au regard de l’article 3 de la Convention (paragraphe 32 ci-dessus). Ils ajoutent qu’ils sont uniquement tenus d’épuiser les recours qui sont suffisamment certains, tant en théorie qu’en pratique, faute de quoi les recours manqueraient de l’effectivité et de l’accessibilité requises. Ils plaident que dans l’arrêt Nisiotis c. Grèce (no 34704/08, 10 février 2011) la Cour a déjà considéré que les voies de recours suggérées par le Gouvernement ne constituaient pas des recours effectifs. Quant à la saisine du médiateur de la République, les requérants estiment qu’il ne s’agit pas d’un recours puisque, selon eux, le médiateur a uniquement des devoirs de recherche et de supervision.

52. Le Gouvernement allègue que les requérants ne formulent pas de griefs défendables sous l’angle de l’article 3 de la Convention. Il ajoute que, pour réclamer une amélioration de leurs conditions de détention, ils auraient pu saisir le conseil de la prison ou demander une audience auprès du procureur-superviseur, comme le permettaient selon lui les dispositions de la loi no 1756/1988 et l’article 572 du code de procédure pénale. Il soutient en outre que les requérants auraient pu s’adresser au médiateur de la République, qui ferait office de mécanisme national de prévention dans le cadre du Protocole facultatif à la Convention des Nations unies contre la torture (OPCAT).

2. Appréciation de la Cour

53. En ce qui concerne les conditions de détention, la Cour a, dans certaines affaires (Vaden c. Grèce, no 35115/03, §§ 30-33, 29 mars 2007, et Tsivis c. Grèce, no 11553/05, §§ 18-20, 6 décembre 2007), conclu que les requérants n’avaient pas épuisé les voies de recours internes, faute d’avoir utilisé les recours prévus à l’article 572 du code de procédure pénale (saisine du procureur chargé de l’exécution des peines et de l’application des mesures de sécurité) et à l’article 6 de la loi no 2776/1999 (saisine du procureur-superviseur de la prison et saisine du conseil disciplinaire de la prison). Dans ces affaires, les requérants se plaignaient de circonstances particulières qui les auraient affectés personnellement en tant qu’individus et auxquelles ils estimaient que les autorités pénitentiaires pouvaient mettre un terme en prenant les mesures appropriées. En revanche, la Cour a affirmé à plusieurs reprises que, dans la mesure où un requérant allègue être personnellement affecté par les conditions générales de détention dans la prison, les recours prévus à l’article 6 de la loi no 2776/1999 et à l’article 572 du code de procédure pénale ne seraient d’aucune utilité (voir, parmi beaucoup d’autres, Papakonstantinou c. Grèce, no 50765/11, § 51, 13 novembre 2014).

54. Quant à la saisine du médiateur de la République, la Cour considère que, dans les circonstances de la présente affaire, ils sont inefficaces ou non adaptés à la violation alléguée de l’article 3 de la Convention étant donné que les constats du médiateur n’engagent pas les autorités internes (Zabelos et autres c. Grèce, no 1167/15, § 92, 17 mai 2018).

55. La Cour ne voit aucune raison de s’écarter dans la présente affaire de sa jurisprudence constante à cet égard. Il y a donc eu violation de l’article 13 combiné avec l’article 3 de la Convention.

IV. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

56. Aux termes de l’article 41 de la Convention :

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

57. Les requérants réclament pour préjudice moral 15 000 euros (EUR) chacun à raison d’une violation alléguée de l’article 3 de la Convention et 8 500 EUR chacun à raison d’une violation alléguée de l’article 13. Ils demandent que ces sommes soient versées sur les comptes bancaires de leurs représentants.

58. Le Gouvernement estime que les sommes réclamées sont excessives et qu’elles ne sont pas étayées par des justificatifs. Il propose de tenir compte d’une amélioration selon lui considérable des conditions dont auraient bénéficié les requérants des requêtes nos 32048/17 et 32053/17 pendant leur détention. Il indique que les requérants ont travaillé dans la prison et que le requérant de la requête no 25993/17 a suivi des cours à l’école de la « deuxième chance ». Il estime en outre que le constat de violation constituerait une satisfaction suffisante et invite la Cour à rejeter la demande des requérants de verser les sommes en cause sur les comptes bancaires de leurs représentants.

59. La Cour octroie 9 500 EUR au requérant dans la requête no 32048/17 et 2 000 EUR à chacun des requérants dans les requêtes nos 25993/17 et 32053/17.

B. Frais et dépens

60. Les requérants réclament 1 000 EUR pour chacun de leurs représentants au titre des frais et dépens qu’ils disent avoir engagés dans le cadre de la procédure menée devant la Cour. Ils demandent que cette somme soit versée sur les comptes bancaires de leurs représentants.

61. Le Gouvernement estime que la somme réclamée n’est pas raisonnable et que les requérants ne produisent aucun élément de nature à justifier le niveau de cette prétention.

62. La Cour rappelle qu’un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. Sur cette base, elle alloue conjointement aux requérants la somme de 1 000 EUR et consent à ce que la somme de 1 000 EUR soit versée directement sur le compte indiqué par les avocats des requérants.

C. Intérêts moratoires

63. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Décide de joindre les requêtes ;

2. Déclare les requêtes recevables ;

3. Dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention quant au requérant de la requête no 32048/17 (pour les périodes comprises entre le 14 juin 2011 et le 20 septembre 2012 et entre le 11 juillet 2013 et le 19 janvier 2014) de la Convention ;

4. Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 3 de la Convention quant aux requérants des requêtes nos 25993/17, 32048/17 (en dehors des périodes comprises entre le 14 juin 2011 et le 20 septembre 2012 et entre le 11 juillet 2013 et le 19 janvier 2014) et 32053/17 ;

5. Dit qu’il y a eu violation de l’article 13 de la Convention combiné avec l’article 3 ;

6. Dit,

a) que l’État défendeur doit verser aux requérants, dans un délai de trois mois les sommes suivantes :

i. 9 500 EUR (neuf mille cinq cents euros) au requérant dans la requête no 32048/17 et 2 000 EUR (deux mille euros) à chacun des requérants dans les requêtes nos 25993/17 et 32053/17, plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii. 1 000 EUR (mille euros) conjointement aux requérants, plus tout montant pouvant être dû sur cette somme par eux à titre d’impôt, pour frais et dépens, somme à verser sur le compte bancaire indiqué par leurs représentants ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

7. Rejette le surplus de la demande de satisfaction équitable.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 19 novembre 2020, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Renata Degener                           Aleš Pejchal
Greffière adjointe                          Président

 

ANNEXE

No No de requête Date d’introduction 1. Nom du requérant

2. Date de naissance

3. Nationalité

25993/17 29/03/2017 1. Andreas-Xanthippos IATRIDIS

2. 18/09/1983

3. Grecque

32048/17 25/04/2017 1. Tihomir MITSOVSKI

2. 02/10/1970

3. Bulgare

32053/17 25/04/2017 1. Daniel Stefan MANOLEA

2. 11/05/1976

3. Roumaine

Dernière mise à jour le décembre 3, 2020 par loisdumonde

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