AFFAIRE T.M. c. ITALIE (Cour européenne des droits de l’homme) Requête no 29786/19

La requête concerne l’impossibilité alléguée par le requérant d’exercer son droit de visite dans les conditions fixées par les tribunaux. Il y voit une violation de son droit au respect de sa vie familiale.


PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE T.M. c. ITALIE
(Requête no 29786/19)
ARRÊT
STRASBOURG
7 octobre 2021

Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire T.M. c. Italie,

La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en un comité composé de :

Péter Paczolay, président,
Gilberto Felici,
Raffaele Sabato, juges,

et de Liv Tigerstedt, greffière adjointe de section,

Vu :

la requête (no 29786/19) dirigée contre la République italienne et dont un ressortissant de cet État, T.M. (« le requérant »), a saisi la Cour le 28 mai 2019 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »),

la décision de porter la requête à la connaissance du gouvernement italien (« le Gouvernement »),

les observations des parties,

la décision de ne pas dévoiler l’identité du requérant,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 14 septembre 2021,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

INTRODUCTION

1. La requête concerne l’impossibilité alléguée par le requérant d’exercer son droit de visite dans les conditions fixées par les tribunaux. Il y voit une violation de son droit au respect de sa vie familiale.

EN FAIT

2. Le requérant est né en 1951 et réside à Monforte San Giorgio. Il a été représenté par Me C. Padalino.

3. Le Gouvernement a été représenté par son agent, M. L. D’Ascia, avocat de l’État.

4. Le 21 août 2003, de l’union entre le requérant et A.L.R. naquit une fille, M. En janvier 2007, le requérant et A.L.R. se séparèrent. Pendant la première période de séparation, le requérant fut en mesure d’exercer son droit de visite et de voir l’enfant.

5. Le 4 mai 2007, A.L.R. déposa plainte contre le requérant pour lésions corporelles et menaces. Le 1er juin 2007, quelques jours avant la confrontation prévue avec le requérant, A.L.R. retira sa plainte.

6. À partir du 8 septembre 2008, A.L.R. s’opposa aux rencontres entre le requérant et l’enfant.

7. Le 15 octobre 2008, A.L.R. saisit le tribunal pour enfants de Messine (« le tribunal »). Elle demanda la garde exclusive de l’enfant et la réglementation du droit de visite du requérant. Pendant la procédure, elle demanda de surcroît au tribunal de déchoir le requérant de son autorité parentale.

8. Le requérant se constitua dans la procédure, se plaignant de ne plus pouvoir exercer son droit de visite depuis le 8 septembre 2008. Il demanda en particulier la garde partagée de sa fille, la réglementation de son droit de visite et le placement de sa fille chez le parent le plus apte en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant.

9. Le 28 novembre 2008, A.L.R. déposa plainte contre le requérant pour violation des obligations d’assistance familiale.

10. Par une décision du 10 mars 2009, le tribunal pour enfants, n’ayant constaté aucun préjudice qui serait résulté pour l’enfant de ses rapports avec le requérant, ordonna la garde partagée de l’enfant, fixa la résidence principale de celle-ci chez A.L.R. et accorda au requérant un droit de visite à raison de deux après-midi par semaine et d’un week-end sur deux ainsi que de vingt jours pendant les vacances d’été.

11. Le 8 mai 2009, alléguant qu’A.L.R. entravait l’exercice de son droit de visite, le requérant demanda au tribunal de se prononcer en urgence pour lui permettre de voir son enfant selon les modalités établies par le tribunal dans sa précédente décision.

12. Le 24 juillet 2009, compte tenu de son impossibilité de voir sa fille, le requérant introduisit un recours devant le juge des tutelles de Messine, lui demandant d’intervenir pour lui permettre d’exercer son droit de visite et de rencontrer sa fille.

13. Le 27 juillet 2009, le requérant demanda au tribunal de sanctionner A.L.R. afin qu’elle cessât d’entraver l’exercice de son droit de visite.

14. Le 27 août 2009, le juge des tutelles prit acte de l’accord des parties de suivre une médiation familiale.

15. En septembre 2009, sans avoir obtenu l’autorisation préalable ni du requérant ni du tribunal, A.L.R. déménagea à Milan, à plus de mille kilomètres du domicile du requérant.

16. Le 2 octobre 2009, le requérant saisit à nouveau le tribunal au motif qu’A.L.R. avait déménagé sans son accord et qu’il lui était de ce fait impossible de voir sa fille. Il invita le tribunal à se prononcer de manière urgente, à lui confier la garde de l’enfant et à sanctionner A.L.R. sur le fondement de l’article 709 ter du code de procédure civile.

17. Le 19 novembre 2009, le tribunal de Messine confirma sa précédente décision de mars 2009 et ordonna aux services sociaux de Messine et de Milan de suivre la situation de la famille. Il constata qu’A.L.R., étant opposée au maintien de la relation entre le requérant et sa fille, avait un comportement préjudiciable à celle-ci. Par conséquent, il enjoignit à A.L.R. de se conformer aux décisions du tribunal sous peine de suspension et/ou déchéance de l’autorité parentale.

18. En 2009, pendant les vacances de Noël, le requérant demanda à la police d’intervenir afin de lui permettre de rencontrer sa fille.

19. Le 17 février 2010, les services sociaux de Messine informèrent le tribunal que deux rencontres avaient eu lieu : l’une le 31 décembre 2009 et l’autre le 1er janvier 2010. Lors de la dernière rencontre, l’enfant aurait refusé de sortir avec le requérant.

20. Les services sociaux de Milan entamèrent le suivi de la famille en juillet 2010. Le 3 décembre 2010, après avoir rencontré l’enfant à cinq reprises, ils informèrent le tribunal que les conditions requises pour l’organisation des rencontres avec le requérant et sa fille n’étaient pas réunies en raison de l’opposition manifestée par cette dernière.

21. Le 9 décembre 2010, les services sociaux déposèrent un autre rapport, qui mettait en évidence « la dégradation, désormais ancrée, des relations entre la mère, le père et l’enfant, sans intervention d’un service spécialisé pour identifier clairement les problèmes, les résoudre et mobiliser des ressources utiles pour les surmonter ». Le rapport relevait que le tribunal de Messine, dans sa décision du 19 novembre 2009, n’avait pas chargé les services sociaux d’effectuer une expertise propre à leur permettre d’évaluer l’aptitude psychologique des membres de la famille.

22. Le 9 juin 2011, le requérant demanda auprès du tribunal pour enfants de Milan la reprise immédiate des contacts entre lui et sa fille et un soutien psychologique spécialisé pour les parents et l’enfant.

23. Le 17 novembre 2011, le juge des investigations préliminaires classa la plainte introduite par A.L.R. Il releva que le requérant n’avait pas eu de comportement violent ou préjudiciable à l’intégrité physique ou morale à l’égard de l’enfant et qu’il ne s’était pas dérobé à ses obligations. Il ajouta que les investigations menées n’avaient pas permis de constater que le requérant avait commis des actes de violence contre A.L.R.

24. Le 8 novembre 2011, le tribunal de Milan chargea les services sociaux de procéder au suivi de la famille.

25. Le 15 février 2012, le requérant invita le tribunal pour enfants à ordonner une enquête psychosociale aux fins de vérifier la situation de l’enfant et un suivi psychologique des relations entre celle-ci et ses parents.

26. Le 10 juillet 2012, les services sociaux déposèrent un rapport qui faisait état de la capacité du requérant à exercer son rôle parental. Ils précisèrent qu’ils étaient prêts à œuvrer en faveur d’une reprise de ses relations avec sa fille.

27. Lors de l’audience du 4 décembre 2012, le requérant indiqua qu’il ne rencontrait plus sa fille depuis quatre ans et demanda la reprise des contacts avec elle. Le tribunal reporta l’audience au 14 mai 2013.

28. Le 21 mars 2013, le requérant informa le tribunal que les services sociaux refusaient d’organiser les rencontres en l’absence d’une décision formelle du tribunal.

29. À l’audience du 14 mai 2013, le requérant demanda à nouveau au tribunal de se prononcer en faveur du rétablissement des contacts entre lui et sa fille.

30. Le 31 octobre 2013, le requérant déposa une troisième demande urgente auprès du tribunal de Milan.

31. Le 4 novembre 2013, le tribunal chargea les services sociaux de Milan d’une mission d’accompagnement des deux parents et de l’enfant en vue d’une reprise des contacts entre le requérant et sa fille.

32. Le 7 avril 2014, après avoir rencontré l’enfant à trois reprises (les 8 et 18 février 2014 et le 21 mars 2014), les services sociaux de Milan informèrent le tribunal du refus de l’enfant de voir le requérant.

33. Le 23 mai 2014, cette dernière fut entendue par le tribunal pour enfants. Elle confirma ne pas vouloir rencontrer son père.

34. Le 4 mai 2015, le tribunal attribua la garde exclusive de l’enfant à A.L.R., suspendit les contacts avec le requérant et chargea les services sociaux d’entamer un parcours d’accompagnement psychologique de l’enfant.

35. Le 13 mai 2015, le requérant fit appel de cette décision, demandant l’adoption de mesures urgentes afin d’éviter qu’il ne fût effacé de la vie de sa fille. Il demanda également que l’enfant, lui-même et A.L.R. fussent soumis à une expertise.

36. La cour d’appel fixa la première audience six mois plus tard, le 14 janvier 2016. À cette dernière date, elle reporta encore l’audience à mai 2016 au motif que les services sociaux n’avaient pas encore déposé leur rapport.

37. Le 22 janvier 2016, les services sociaux prirent acte du refus de la mineure de rencontrer le requérant.

38. À l’audience du 20 mai 2016, compte tenu de la volonté que les parties avaient manifestée à l’audience du 12 mai 2016, la cour d’appel leur demanda de suivre un parcours de médiation familiale.

39. Le 17 novembre 2016, le requérant demanda à la cour d’appel de prendre des mesures urgentes pour faire exécuter la décision du 20 mai 2016.

40. Le 9 décembre 2016, les services sociaux de Milan, qui n’avaient pas rencontré le requérant, donnèrent un avis négatif sur la mise en place d’un parcours de médiation familiale.

41. Le 19 janvier 2017, la cour d’appel débouta le requérant du recours dont il l’avait saisie et confirma la décision du tribunal. Elle releva que le requérant et A.L.R. n’avaient pas été en mesure de revoir leur comportement et de profiter de l’aide qui leur avait été fournie par les services sociaux, qu’ils étaient incapables de comprendre leurs besoins réciproques et de décider quel avenir ils souhaitaient pour leur fille. Elle nota que cette dernière avait besoin de travailler sur le refus de la figure paternelle. Elle estima que le requérant et A.L.R. n’avaient pas assumé leur responsabilité éducative. Elle rejeta la demande d’application de mesures coercitives contre A.L.R. et invita les parties à entamer un parcours de réflexion sur leur comportement.

42. Le 22 juin 2017, le requérant se pourvut en cassation. Il se plaignit que le droit de son enfant à la coparentalité avait été violé et allégua qu’aucune mesure coercitive n’avait été adoptée contre A.L.R. pour mettre fin au comportement obstructionniste de celle-ci.

43. Le 28 novembre 2018, la Cour de cassation rejeta le pourvoi du requérant. Elle tint compte du refus de l’enfant de rencontrer son père, de la distance entre les deux lieux de résidence et de l’incapacité des parties à trouver une solution à leur situation conflictuelle. En particulier, elle se référa au fait que le tribunal et la cour d’appel avaient à juste titre suspendu le droit de visite du requérant en attendant les résultats du parcours d’accompagnement psychologique suivi par les parties.

LE CADRE JURIDIQUE INTERNE PERTINENT

44. Le droit interne pertinent se trouve décrit dans l’arrêt Strumia c. Italie (no 53377/13, §§ 73-78, 23 juin 2016).

45. Aux termes de l’article 337 ter, premier alinéa, du code civil, l’enfant mineur a le droit d’entretenir une relation équilibrée et continue avec chacun de ses parents, de recevoir des soins, une éducation et une assistance morale de la part de ses deux parents et d’entretenir des relations significatives avec les ascendants et les parents de chaque branche parentale. D’après le deuxième alinéa du même article, pour atteindre le but indiqué au premier alinéa, dans les procédures visées à l’article 337 bis du code civil, le juge adopte les mesures relatives aux descendants en se référant exclusivement à leurs intérêts moraux et matériels. Le juge donne la priorité à la possibilité pour les enfants mineurs de rester sous la garde des deux parents ou, à défaut, il décide à qui les enfants doivent être confiés et détermine le moment et les modalités de leur présence auprès de chaque parent, ainsi que la mesure et les modalités selon lesquelles chacun des parents doit contribuer à l’entretien, aux soins, à l’éducation et à l’instruction des enfants. Le juge peut modifier les modalités de garde et prendre acte des différents accords intervenus entre les parties.

Le juge du fond est compétent pour la mise en œuvre des décisions relatives aux modalités de garde et peut intervenir également d’office en cas de placement familial. À cet effet, une copie de la décision de placement est envoyée par le procureur de la République au juge des tutelles.

DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 8 DE LA CONVENTION

46. Le requérant se plaint d’une violation de son droit au respect de sa vie familiale, affirmant qu’il n’a pas pu exercer pleinement son droit de visite pendant douze ans, malgré l’existence de plusieurs décisions du tribunal en fixant les conditions d’exercice. Il reproche aux autorités internes de ne pas avoir pris de mesures propres à préserver un lien avec sa fille et d’avoir, par conséquent, laissé à la mère de l’enfant le temps de dresser son enfant contre lui. Il dénonce une inertie des autorités face au comportement d’A.L.R., alléguant que celles-ci n’ont pas déployé d’efforts ni pris de mesures de nature à lui permettre d’exercer son droit de visite, et qu’elles n’ont pas réagi face au non-respect par la mère des décisions qui lui accordaient ce droit de visite. Le requérant se plaint également de la durée, excessive selon lui, des procédures. L’article 8 de la Convention est ainsi libellé :

« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

A. Sur la recevabilité

47. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée ni irrecevable pour un autre motif visé à l’article 35 de la Convention, la Cour la déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

a) Le requérant

48. Le requérant affirme qu’il avait de bons rapports avec son enfant avant qu’A.L.R. n’adopte un comportement obstructionniste et ne s’oppose à toute relation en déménageant notamment à plus de mille kilomètres sans son consentement et en faisant obstacle aux rencontres.

49. Il avance que les services sociaux de Milan, qui auraient dû collaborer avec les services sociaux de Messine, n’ont rencontré l’enfant que trois fois et se sont prononcés contre la reprise des contacts en considération de l’opposition de celle-ci.

50. Il indique qu’à aucun moment de la procédure les autorités n’ont estimé nécessaire de nommer un expert afin d’évaluer l’état psychologique de l’enfant, alors qu’elles auraient reconnu les difficultés que celle-ci avait dans sa relation avec son père. Il ajoute qu’entre 2009 et 2018 (soit pendant une période de neuf ans), les services sociaux de Milan n’ont rencontré l’enfant que huit fois (cinq fois entre septembre et novembre 2010, ainsi que trois fois entre février et mars 2014).

51. Le requérant estime que les services sociaux de Milan n’ont pas correctement exécuté les décisions judiciaires. En effet, d’après lui, les réunions se sont déroulées en retard par rapport aux dates du prononcé des décisions judiciaires (décision du tribunal de Messine du 19 novembre 2009 et décision du tribunal de Milan du 4 novembre 2013) ; le nombre de ces réunions était extrêmement restreint ; les services sociaux n’ont pas concrètement mis en œuvre les mesures recommandées par les autorités judiciaires concernées pour lui permettre de renouer avec sa fille ; ils se sont bornés à reconnaître le refus de l’enfant de rencontrer son père et ont toléré pendant de nombreuses années le refus d’A.L.R. de respecter les deux décisions judiciaires.

52. Le requérant affirme également que les juridictions ont pris un retard, injustifié selon lui, dans la prise de décisions. Il indique en particulier que, nonobstant les demandes urgentes qu’il avait déposées, il y a eu un retard de deux ans devant le tribunal pour enfants de Milan et d’un an et demi devant la cour d’appel. Il estime qu’un surcroît de diligence et de rapidité s’imposait dans l’adoption d’une décision touchant aux droits garantis par l’article 8 de la Convention.

53. Le requérant rappelle enfin qu’il ne voit plus sa fille depuis 2009.

b) Le Gouvernement

54. Le Gouvernement considère qu’il ne peut être reproché aux autorités italiennes de ne pas avoir pris les mesures nécessaires. Il affirme en effet que les services sociaux sont intervenus à plusieurs reprises pour faciliter les contacts entre le requérant et sa fille et qu’ils ont tenu compte du refus de cette dernière de voir le requérant.

55. Il argue en outre que les décisions internes ont été prises dans l’intérêt de l’enfant. Il estime que la cessation soudaine de la relation entre l’enfant et la mère avec laquelle il habite constitue pour un enfant de moins de cinq ans un traumatisme qui ne peut être infligé dans le seul but d’assurer l’efficacité des rencontres avec son père.

56. Compte tenu des circonstances de l’espèce, il n’était pas possible, de l’avis du Gouvernement, d’exiger une attitude différente des autorités internes, eu égard notamment à l’intérêt supérieur de l’enfant et considérant que toutes les mesures prises sont susceptibles d’être modifiées.

57. Le Gouvernement indique que, pendant la période de 2008 à 2011, les services sociaux ont respecté les décisions du tribunal de Messine et il affirme qu’A.L.R. a informé le requérant de son intention de déménager à Milan par deux lettres recommandées. Il ajoute que le requérant ne s’est pas rendu à Milan pour rencontrer l’enfant.

58. Quant aux services sociaux de Milan, le Gouvernement soutient qu’ils sont intervenus afin de rechercher si les conditions requises pour des rencontres étaient réunies et ont examiné l’opposition de l’enfant à des contacts avec son père.

59. Enfin, il expose que, pour protéger l’intérêt supérieur de l’enfant, le 4 mai 2015, le tribunal de Milan a confié la garde exclusive de celle-ci à A.L.R., en chargeant toutefois les services sociaux d’une mission de soutien psychologique en faveur de l’enfant aux fins d’analyser son rapport à la figure du père. Cette décision aurait été prise dans l’intérêt de l’enfant.

2. Appréciation de la Cour

a) Les principes généraux

60. Comme la Cour l’a rappelé à maintes reprises, si l’article 8 de la Convention a essentiellement pour objet de prémunir l’individu contre les ingérences arbitraires des pouvoirs publics, il ne se contente pas de commander à l’État de s’abstenir de pareilles ingérences : à cet engagement plutôt négatif peuvent s’ajouter des obligations positives inhérentes à un respect effectif de la vie privée ou familiale. Celles-ci peuvent impliquer l’adoption de mesures visant au respect de la vie familiale jusque dans les relations des individus entre eux, dont la mise en place d’un arsenal juridique adéquat et suffisant pour assurer les droits légitimes des intéressés ainsi que le respect des décisions judiciaires, ou des mesures spécifiques appropriées (voir, mutatis mutandis, Zawadka c. Pologne, no 48542/99, § 53, 23 juin 2005). Cet arsenal doit permettre à l’État d’adopter des mesures propres à réunir le parent et son enfant, y compris en cas de conflit opposant les deux parents (voir, mutatis mutandis, Ignaccolo-Zenide c. Roumanie, no 31679/96, § 108, CEDH 2000‑I, Sylvester c. Autriche, nos 36812/97 et 40104/98, § 68, 24 avril 2003, Zavřel c. République tchèque, no 14044/05, § 47, 18 janvier 2007, et Mihailova c. Bulgarie, no 35978/02, § 80, 12 janvier 2006). La Cour rappelle aussi que les obligations positives ne se limitent pas à veiller à ce que l’enfant puisse rejoindre son parent ou avoir un contact avec lui, mais qu’elles englobent également l’ensemble des mesures préparatoires permettant de parvenir à ce résultat (voir, mutatis mutandis, Kosmopoulou c. Grèce, no 60457/00, § 45, 5 février 2004, Amanalachioai c. Roumanie, no 4023/04, § 95, 26 mai 2009, Ignaccolo-Zenide, précité, §§ 105 et 112, et Sylvester, précité, § 70).

61. La Cour rappelle également que le fait que les efforts des autorités ont été vains ne mène pas automatiquement à la conclusion que l’État a manqué aux obligations positives qui découlent pour lui de l’article 8 de la Convention (Nicolò Santilli c. Italie, no 51930/10, § 67, 17 décembre 2013). En effet, l’obligation pour les autorités nationales de prendre des mesures afin de réunir l’enfant et le parent avec lequel il ne vit pas n’est pas absolue, et la compréhension et la coopération de l’ensemble des personnes concernées constituent toujours un facteur important. Si les autorités nationales doivent s’efforcer de faciliter pareille collaboration, une obligation pour elles de recourir à la coercition en la matière ne saurait être que limitée : il leur faut tenir compte des intérêts et des droits et libertés de ces mêmes personnes, et notamment des intérêts supérieurs de l’enfant et des droits que l’article 8 de la Convention confère à celui-ci (Voleský c. République tchèque, no 63267/00, § 118, 29 juin 2004).

62. En ce qui concerne la vie familiale d’un enfant, la Cour rappelle qu’il existe actuellement un large consensus – y compris en droit international – autour de l’idée que dans toutes les décisions concernant des enfants, leur intérêt supérieur doit primer (voir, entre autres, Neulinger et Shuruk c. Suisse [GC], no 41615/07, § 135, CEDH 2010). Elle souligne d’ailleurs que dans les affaires dans lesquelles sont en jeu des questions de placement d’enfants et de restrictions du droit de visite, l’intérêt de l’enfant doit passer avant toute autre considération (Strand Lobben et autres c. Norvège [GC], no 37283/13, § 204, 10 septembre 2019). La plus grande prudence s’impose lorsqu’il s’agit de recourir à la coercition en ce domaine délicat (Mitrova et Savik c. l’ex-République yougoslave de Macédoine, no 42534/09, § 77, 11 février 2016, et Reigado Ramos c. Portugal, no 73229/01, § 53, 22 novembre 2005). Le point décisif consiste donc à savoir si, en l’espèce, les autorités nationales ont pris, pour faciliter les visites entre le parent et l’enfant, toutes les mesures nécessaires que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elles (Nuutinen c. Finlande, no 32842/96, § 128, CEDH 2000‑VIII).

b) Application de ces principes à la présente espèce

63. Se tournant vers les faits de la présente cause, la Cour estime que, devant les circonstances qui lui sont soumises, sa tâche consiste à rechercher si les autorités nationales ont pris toutes les mesures que l’on pouvait raisonnablement exiger d’elles pour maintenir les liens entre le requérant et sa fille (Bondavalli c. Italie, no 35532/12, § 75, 17 novembre 2015) et à examiner la manière dont elles sont intervenues pour faciliter l’exercice du droit de visite du requérant tel que défini par les décisions de justice (Hokkanen c. Finlande, 23 septembre 1994, § 58, série A no 299‑A, et Kuppinger c. Allemagne, no 62198/11, § 105, 15 janvier 2015). Elle rappelle aussi que, dans une affaire de ce type, le caractère adéquat d’une mesure se juge à la rapidité de sa mise en œuvre (Piazzi c. Italie, no 36168/09, § 58, 2 novembre 2010), car le passage du temps peut à lui seul avoir des conséquences sur la relation d’un parent avec son enfant.

64. La Cour relève qu’à partir de 2008, quand l’enfant n’avait que cinq ans, le requérant n’a cessé de demander au tribunal que des rencontres fussent organisées, mais qu’il n’a pu exercer son droit de visite que de manière très limitée en raison de l’opposition de la mère.

65. Entre mars 2009 et août 2009, le tribunal de Messine et le juge des tutelles observèrent que le requérant ne pouvait pas avoir accès à sa fille et qu’A.L.R. persistait à s’opposer aux rencontres entre le requérant et l’enfant.

66. À partir d’octobre 2009, après le déménagement de la mère de l’enfant dans une autre ville, à environ mille kilomètres de distance, sans le consentement du requérant et des tribunaux, ce dernier n’a plus pu rencontrer sa fille, en particulier en raison du refus de la mère d’organiser des rencontres et de l’opposition de l’enfant. Aucune expertise sur les capacités parentales d’A.L.R. et du requérant n’a été ordonnée et aucune expertise psychologique concernant la mineure n’a été réalisée.

67. La Cour observe que, le 19 novembre 2009, le tribunal de Messine ordonna aux services sociaux de Messine et de Milan de suivre la situation de la famille et constata qu’A.L.R. avait eu un comportement préjudiciable à l’enfant, en ce qu’elle s’était opposée au maintien de la relation entre le requérant et sa fille. Le tribunal enjoignit à A.L.R. de se conformer aux décisions du tribunal sous peine de suspension et/ou de déchéance de l’autorité parentale.

68. Toutefois, les services sociaux de Milan, qui avaient été chargés par le tribunal de Messine en 2009 de suivre la situation de la famille, ne commencèrent ce suivi qu’en juillet 2010 et ne rencontrèrent l’enfant que cinq fois entre juillet 2010 et novembre 2010.

69. Entre 2011 et 2014, nonobstant les demandes que le requérant forma auprès du tribunal aux fins de l’obtention du droit de visite et de l’exécution des précédentes décisions du tribunal de Messine, l’intéressé ne put jamais rencontrer son enfant. Tout en reconnaissant l’importance du maintien des relations entre le requérant et sa fille, les services sociaux rencontrèrent l’enfant seulement trois fois en 2014 et informèrent le tribunal que celle-ci refusait les rencontres.

70. En 2014, compte tenu du refus de l’enfant, le tribunal de Milan décida, sans avoir évalué la nécessité d’ordonner une expertise psychologique de l’enfant, de confier sa garde exclusive à A.L.R.

71. La Cour note que le requérant interjeta appel le 13 mai 2015, mais que la première audience devant la cour d’appel fut fixée six mois plus tard, en janvier 2016, et reportée ensuite au mois de mai 2016. Les services sociaux de Milan donnèrent un avis négatif sur la nécessité d’un parcours de médiation familiale et, en décembre 2016, après avoir invité les parties à effectuer un parcours de réflexion sur leur comportement, la cour d’appel rejeta le recours du requérant, estimant que les responsabilités étaient partagées entre ce dernier et A.L.R ainsi que la demande d’application de mesures coercitives contre A.L.R. (paragraphe 41 ci-dessus).

72. La Cour rappelle qu’il ne lui appartient pas de substituer son appréciation à celle des autorités nationales compétentes quant aux mesures qui auraient dû être prises, car ces autorités sont en principe mieux placées pour procéder à une telle évaluation, notamment parce qu’elles sont en contact direct avec le contexte de l’affaire et les parties impliquées (Reigado Ramos, précité, § 53). Pour autant, elle ne peut en l’espèce ignorer les faits précédemment exposés (paragraphes 64-71 ci-dessus). En particulier, elle note que le requérant n’a cessé de tenter d’établir des contacts avec sa fille depuis 2008 et, malgré les différentes décisions du tribunal pour enfants et du juge des tutelles, les autorités n’ont pas trouvé de solution pour lui permettre d’exercer régulièrement son droit de visite. Le requérant n’a pu exercer ce droit que de manière très limitée jusqu’en 2008. L’avertissement du tribunal de Messine n’a eu aucun effet sur A.L.R., qui a continué à empêcher le requérant d’exercer son droit de visite et a même déménagé à mille kilomètres de distance sans le consentement de celui-ci et des tribunaux.

73. Certes, la Cour reconnaît que les autorités étaient confrontées en l’espèce à une situation très difficile qui découlait notamment des tensions existantes entre les parents de l’enfant. Elle admet que l’impossibilité pour le requérant d’exercer son droit de visite était au départ surtout imputable au refus manifeste de la mère de l’enfant, puis au refus de l’enfant et à la distance entre le lieu de résidence de l’enfant et celui du requérant. Elle rappelle cependant qu’un manque de coopération entre les parents séparés ne peut dispenser les autorités compétentes de mettre en œuvre tous les moyens susceptibles de permettre le maintien du lien familial (Nicolò Santilli, précité, § 74, Lombardo, précité, § 91, et Zavřel, précité, § 52).

74. La Cour considère que les autorités n’ont pas fait preuve de la diligence qui s’imposait en l’espèce et qu’elles sont restées en deçà de ce qu’on pouvait raisonnablement attendre d’elles. Elle estime en particulier que les juridictions internes n’ont pas pris les mesures appropriées pour créer les conditions nécessaires à la pleine réalisation du droit de visite du père de l’enfant (Bondavalli, précité, § 81, Macready c. République tchèque, nos 4824/06 et 15512/08, § 66, 22 avril 2010, Piazzi, précité, § 61, et Strumia, précité, § 122). Elle constate notamment que, après la transmission du dossier de Messine à Milan, les services sociaux de Milan sont intervenus avec beaucoup de retard et que, entre 2010 et 2016, ils n’ont rencontré l’enfant qu’à huit reprises.

75. La Cour estime que, dès le début de la séparation des parents, quand l’enfant avait seulement cinq ans, les juridictions internes n’ont pas pris de mesures concrètes et utiles visant à l’instauration de contacts effectifs et elle constate qu’elles ont ensuite toléré pendant environ onze ans que la mère, par son comportement, empêchât l’établissement d’une véritable relation entre le requérant et l’enfant. Elle relève que le déroulement de la procédure devant le tribunal fait plutôt apparaître une série de mesures automatiques et stéréotypées, telles que des demandes successives de renseignement, une délégation du suivi de la famille aux services sociaux, assortie de l’obligation pour ceux-ci d’organiser et de faire respecter le droit de visite du requérant (Lombardo, précité, § 92, et Piazzi, précité, § 61). Les services sociaux, de leur côté, ont agi avec retard et n’ont pas correctement exécuté les décisions judiciaires. Or, bien que l’arsenal juridique prévu par le droit italien semble suffisant, aux yeux de la Cour, pour permettre à l’État défendeur d’assurer le respect des obligations positives qui découlent pour lui de l’article 8 de la Convention, force est de constater en l’occurrence que les autorités n’ont entrepris aucune action à l’égard d’A.L.R., lui laissant de surcroît la possibilité de déménager à plus de mille kilomètres du domicile du requérant sans le consentement de celui-ci et des tribunaux ; en particulier, sans avoir convenu au préalable avec le requérant d’un projet de coparentalité ou sans avoir soumis ledit projet au tribunal pour approbation. Après cela, les autorités n’ont adopté aucune mesure visant à empêcher le déménagement et n’ont pas non plus exécuté les précédentes décisions du tribunal de Messine qui accordaient un droit de visite au requérant. En outre, elle note qu’A.L.R. a présenté plusieurs plaintes pénales, qui ont été en partie retirées et en partie rejetées (paragraphes 5, 9 et 23 ci-dessus). Aussi la Cour estime-t-elle que les autorités ont laissé se consolider une situation, qui s’est de fait installée au mépris des décisions judiciaires. Par la suite, lorsque les autorités ont constaté que la mineure refusait de rencontrer le requérant, au lieu d’encourager l’enfant, elles ont suspendu le droit de visite, en laissant l’organisation des rencontres à l’initiative des parties.

76. La Cour note que, dans le cas d’espèce, face à l’opposition de la mère de l’enfant, qui perdurait depuis 2008, et à la difficulté du requérant à exercer son droit de visite, les autorités nationales n’ont pas pris rapidement toutes les mesures nécessaires et qui pouvaient raisonnablement être exigées pour faire respecter le droit de l’intéressé d’avoir des contacts avec sa fille et d’établir une relation (Strumia, précité, § 123).

77. En l’espèce, la Cour observe que, dans leurs dernières décisions relatives à l’exercice des droits parentaux, les juridictions internes se sont fondées exclusivement sur l’avis des services sociaux et sur le refus de l’enfant de rencontrer le requérant, qu’elle ne voyait plus depuis dix ans. La Cour note qu’elles ne se sont pas appuyées sur les rapports d’expertise, demandés à plusieurs reprises par le requérant, et qu’elles n’ont ordonné aucun soutien psychothérapeutique pour l’enfant et ses parents.

78. La Cour relève également le retard avec lequel le tribunal pour enfants de Milan et la cour d’appel ont pris leurs décisions. Elle rappelle à cet égard qu’elle peut prendre en compte, sur le terrain de l’article 8 de la Convention, la durée du processus décisionnel des autorités internes ainsi que celle de toute procédure judiciaire connexe. En effet, un retard dans la procédure risque toujours, en pareil cas, de trancher par un fait accompli le problème en litige. Or un respect effectif de la vie familiale commande que les relations futures entre parent et enfant se règlent sur la seule base de l’ensemble des éléments pertinents, et non par le simple écoulement du temps (W. c. Royaume-Uni, 8 juillet 1987, §§ 64‑65, série A no 121, Covezzi et Morselli c. Italie, no 52763/99, § 136, 9 mai 2003, Solarino c. Italie, no 76171/13, § 39, 9 février 2017, et D’Alconzo c. Italie, no 64297/12, § 64, 23 février 2017).

79. Pour la Cour, un surcroît de diligence et de rapidité s’imposait dans l’adoption d’une décision touchant aux droits garantis par l’article 8 de la Convention. L’enjeu de la procédure pour le requérant exigeait un traitement urgent, car le passage du temps pouvait avoir des conséquences irrémédiables sur les relations entre l’enfant et son père, qui ne vivait pas avec elle. La Cour rappelle en effet que la rupture du contact avec un enfant très jeune peut conduire à une altération croissante de sa relation avec son parent. À cet égard elle note que la Cour de cassation s’est bornée à confirmer les décisions visant à suspendre le droit de visite du requérant sans avoir constaté que le parcours de suivi psychologique auquel elle se référait n’avait pas été ordonné par les juridictions (paragraphe 43 ci-dessus).

80. Eu égard à ce qui précède et nonobstant la marge d’appréciation de l’État défendeur en la matière, la Cour considère que les autorités nationales n’ont pas déployé les efforts adéquats et suffisants pour faire respecter le droit de visite du requérant et qu’elles ont méconnu le droit de l’intéressé au respect de sa vie familiale.

81. Partant, il y a eu violation de l’article 8 de la Convention.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

82. Aux termes de l’article 41 de la Convention :

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage moral

83. Le requérant demande 35 000 euros (EUR) pour le dommage moral qu’il dit avoir subi en raison de l’impossibilité qu’il lui aurait été faite de maintenir une relation avec sa fille depuis 2008.

84. Le Gouvernement conteste les prétentions du requérant et soutient que le dommage moral n’a pas été prouvé.

85. La Cour considère que l’intéressé a subi un dommage moral qui ne saurait être réparé par le seul constat de violation de l’article 8 de la Convention. Elle estime toutefois que la somme réclamée à ce titre est exagérée. Eu égard à l’ensemble des éléments dont elle dispose et statuant en équité, comme le veut l’article 41 de la Convention, elle alloue à l’intéressé la somme 15 000 EUR à ce titre.

B. Frais et dépens

86. Le requérant demande 5 000 EUR pour les frais et dépens qu’il aurait engagés dans le cadre de la procédure menée devant la Cour.

87. Le Gouvernement conteste la demande du requérant.

88. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce, la Cour rejette la demande relative aux frais et dépens, le requérant n’ayant produit aucun justificatif à cet égard.

C. Intérêts moratoires

89. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 8 de la Convention ;

3. Dit,

a) que l’État défendeur doit verser au requérant, dans un délai de trois mois, 15 000 EUR (quinze mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt sur cette somme, pour dommage moral ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 7 octobre 2021, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Liv Tigerstedt                                Péter Paczolay
Greffière adjointe                             Président

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Dernière mise à jour le octobre 7, 2021 par loisdumonde

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