AFFAIRE STETSOV c. UKRAINE (Cour européenne des droits de l’homme) Requête no 5170/15

La présente affaire concerne l’interdiction de quitter le territoire qui fut imposée au requérant en raison du défaut de remboursement d’une dette constatée par jugement. Le requérant se plaint d’une violation de l’article 2 du Protocole no 4 à la Convention.


CINQUIÈME SECTION
AFFAIRE STETSOV c. UKRAINE
(Requête no 5170/15)
ARRÊT

Art 2 P4 • Interdiction de quitter le territoire en raison du défaut de remboursement d’une dette constatée par jugement • Mesure qui n’était pas suffisamment justifiée et qui ne pouvait pas être reconsidérée, ni réexaminée jusqu’à l’échéance constituée par le paiement intégral

STRASBOURG
11 mai 2021

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention . Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Stetsov c. Ukraine,

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant en une Chambre composée de :

Síofra O’Leary, présidente,
Mārtiņš Mits,
Ganna Yudkivska,
Stéphanie Mourou-Vikström,
Jovan Ilievski,
Lado Chanturia,
Mattias Guyomar, juges,
et de Victor Soloveytchik, greffier de section,

Vu :

la requête (no 5170/15) dirigée contre l’Ukraine et dont un ressortissant de cet État, M. Oleg Nikolayevich Stetsov (« le requérant ») a saisi la Cour en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention ») le 19 janvier 2015,

la décision de porter la requête à la connaissance du gouvernement ukrainien (« le Gouvernement »),

les observations des parties,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 30 mars 2021,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

INTRODUCTION

1. La présente affaire concerne l’interdiction de quitter le territoire qui fut imposée au requérant en raison du défaut de remboursement d’une dette constatée par jugement. Le requérant se plaint d’une violation de l’article 2 du Protocole no 4 à la Convention.

EN FAIT

2. Le requérant est né en 1969 et réside à Dergatchi (Ukraine). Il a été représenté par Me Y.L. Boychenko, avocat.

3. Le Gouvernement a été représenté par son agent, M. I. Lishchyna.

4. Le 23 juin 2008, le requérant se porta garant d’un contrat de prêt conclu le même jour entre la banque U. et la société S. pour un montant de 1 500 000 dollars américains (USD) (soit l’équivalent de 961 538,46 euros (EUR)).

5. Le 26 septembre 2013, à la suite d’un défaut de remboursement du prêt par la société S., la banque U. introduisit une demande en justice contre le requérant afin d’obtenir le recouvrement de la dette restant due et le paiement de pénalités de retard.

6. Le 5 février 2014, la Cour d’appel régionale de Kharkiv accueillit la requête dirigée par la banque U. contre le requérant, et elle ordonna à l’intéressé de verser à la banque U. la somme de 979 583,48 USD (soit l’équivalent de 713 150,46 EUR) au titre de la dette restant due, ainsi que 7 413,16 hryvnias ukrainiennes (UAH) (soit l’équivalent de 477,66 EUR) à titre de pénalités de retard et 5 161,50 UAH (soit l’équivalent de 686,04 EUR) pour frais et dépens. Cette décision fut confirmée le 24 avril 2014 par la Cour supérieure d’Ukraine spécialisée dans les affaires civiles et pénales.

7. Le 30 octobre 2014, le tribunal d’arrondissement de Chevtchenkivskiy à Kyiv examina la demande dont l’huissier K., du service des huissiers de l’État, l’avait saisi aux fins d’obtenir que le requérant fût frappé d’une interdiction de quitter le territoire jusqu’au paiement intégral de la dette constatée par le jugement rendu le 5 février 2014, et il la rejeta au motif que l’huissier n’était pas parvenu à prouver que le requérant s’était soustrait à l’exécution du jugement.

8. Le 17 décembre 2014, la cour d’appel de Kyiv infirma la décision de la juridiction de première instance et accueillit la demande de l’huissier K. Elle nota que le requérant avait été informé de la procédure d’exécution dirigée contre lui et que pendant plus de quatre mois, il n’avait fait aucun effort pour rembourser, même partiellement, la dette. Cette décision devint définitive.

9. En mai-juin 2015, à deux reprises le requérant saisit les juridictions internes aux fins d’obtenir la levée de l’interdiction de quitter le territoire qui avait été prononcée à son encontre. Ses demandes furent rejetées par le tribunal d’arrondissement de Chevtchenkivskiy à Kyiv et la cour d’appel de Kyiv au motif qu’en vertu du droit applicable, les tribunaux nationaux n’étaient pas compétents pour lever une interdiction de quitter le territoire, et que l’interdiction en question ne pourrait être levée qu’une fois la dette intégralement remboursée.

10. Le 20 juillet 2015, le requérant demanda au service des huissiers de l’État de lever l’interdiction de quitter le territoire qui avait été prononcée contre lui et de mettre en place un prélèvement mensuel sur son salaire aux fins du remboursement de la dette.

11. Le 10 août 2015, le service des huissiers de l’État émit une ordonnance de prélèvement mensuel d’un montant correspondant à 20 % du salaire du requérant en vue du remboursement de la dette constatée par jugement, sans toutefois ordonner la levée de l’interdiction de quitter le territoire.

12. Le 1er juin 2017, le requérant demanda de nouveau au service des huissiers de l’État de lever l’interdiction de quitter le territoire qui avait été prononcée contre lui.

13. Le 27 juillet 2017, le directeur adjoint du service des huissiers de l’État répondit au requérant que l’interdiction en question ne pourrait être levée qu’à l’issue de la procédure d’exécution. Sa demande fut par conséquent rejetée.

14. D’après la dernière communication du requérant datant du 16 mars 2018, l’interdiction de quitter le territoire est toujours en vigueur.

LE CADRE JURIDIQUE INTERNE PERTINENT

I. La procédure d’exécution des jugements

15. L’article 11, paragraphe 3, alinéa 18 de l’ancienne loi sur la procédure d’exécution des jugements, qui fut en vigueur jusqu’au 2 juin 2016, prévoyait que si un débiteur se soustrayait aux obligations qui lui avaient été imposées par une décision de justice, les huissiers de justice de l’État étaient en droit de saisir le tribunal aux fins d’obtenir que fût prononcée contre le débiteur une interdiction temporaire de quitter le territoire courant jusqu’à ce que celui-ci se fût acquitté des obligations nées de la décision en question.

16. Depuis le 2 juin 2016, la loi susmentionnée n’est plus en vigueur : elle a été abrogée et remplacée par la nouvelle loi sur la procédure d’exécution des jugements. À l’heure actuelle, l’article 18, paragraphe 3, alinéa 19 de cette nouvelle loi contient une disposition similaire à celle décrite dans le paragraphe qui précède.

II. La procédure d’entrée dans le territoire ukrainien et de sortie de ce territoire pour les ressortissants ukrainiens

17. L’article 6 de la loi sur la procédure d’entrée dans le territoire ukrainien et de sortie de ce territoire pour les ressortissants ukrainiens, qui prévoit des restrictions à la circulation des ressortissants ukrainiens à l’étranger, a fait l’objet de plusieurs modifications au cours de la période considérée. Cependant, le manquement aux obligations imposées par une décision de justice a toujours figuré parmi les motifs de restriction du droit de quitter le territoire ukrainien. Cette restriction était imposée à titre provisoire, jusqu’à l’exécution desdites obligations.

18. Le 1er février 2013, la Cour suprême s’est livrée à une analyse de la pratique judicaire dans des affaires impliquant une restriction temporaire du droit de quitter le territoire ukrainien. La juridiction suprême a indiqué que comme il s’agissait de porter atteinte à un droit de nature constitutionnelle, l’huissier devait rapporter la preuve que le débiteur s’était soustrait volontairement au paiement des sommes qu’il devait.

Ainsi, il peut en être déduit que la preuve du non-paiement n’est pas suffisante à elle seule. Elle doit s’accompagner de la preuve de la volonté du débiteur de ne pas s’acquitter de ses obligations pécuniaires, alors qu’il ne peut pas se prévaloir de circonstances qui l’en déchargeraient, comme par exemple la maladie ou la perte soudaine de son emploi.

III. LE CODE DE PROCEDURE CIVILE

19. Le 15 décembre 2017, le Code de procédure civile a été modifié pour inclure un nouvel article 441, qui prévoyait que les tribunaux pouvaient imposer aux débiteurs une interdiction temporaire de quitter le territoire pour la période allant jusqu’au paiement intégral de la dette.

20. Le 3 juillet 2018, le Parlement ukrainien a modifié l’article 441 et a ajouté de nouveaux paragraphes selon lesquels les tribunaux pouvaient annuler l’interdiction temporaire de voyager suite à la demande motivée du débiteur, que cette demande devait être examinée dans un délai de dix jours; que la décision prise à la suite de cette demande pourrait faire l’objet d’un recours et que le refus d’annuler l’interdiction de voyager ne devrait pas empêcher le débiteur de déposer une nouvelle demande si les circonstances avaient changé. Ces modifications sont entrées en vigueur le 28 août 2018.

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 2 DU PROTOCOLE No 4

21. Le requérant se plaint d’une atteinte à son droit de circuler librement et de quitter le territoire national. Il invoque l’article 2 du Protocole no 4, qui est ainsi libellé en ses parties pertinentes :

« 2. Toute personne est libre de quitter n’importe quel pays, y compris le sien.

3. L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au maintien de l’ordre public, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

A. Sur la recevabilité

22. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 de la Convention et qu’elle ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour la déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

23. Le requérant reconnaît que l’ingérence litigieuse a un fondement en droit interne et peut être considérée comme poursuivant un but légitime. Toutefois, il en réfute la nécessité et la proportionnalité. Il précise que les huissiers n’ont pas exploré toutes les possibilités d’exécution du jugement du 5 février 2014 avant de solliciter une restriction à son droit de quitter le territoire. Il conteste par ailleurs les conclusions des autorités nationales selon lesquelles il s’était soustrait à l’obligation qui lui incombait de rembourser la dette. Enfin, il argue que la restriction qui lui a été imposée n’est pas susceptible de réexamen par les juridictions internes et ne peut être levée pour aucun autre motif que le remboursement intégral des sommes dues, et qu’elle n’est donc pas proportionnée. Il en déduit que dans la pratique, l’interdiction de quitter le territoire qui lui a été imposée a été et reste une mesure automatique de durée indéterminée n’offrant aucune possibilité de réexamen périodique de sa nécessité et de sa proportionnalité.

24. Le Gouvernement reconnaît que l’interdiction de quitter le territoire s’analyse en une entrave à la liberté de circulation du requérant. Il estime que l’interdiction de quitter le territoire a été imposée dans le respect de la législation en vigueur, et que cette mesure visait la protection des droits d’autrui et était nécessaire dans ce cadre. Il soutient que le requérant s’est soustrait à l’obligation de rembourser une dette qui avait été constatée par jugement, et que les autorités ont donc dû restreindre sa liberté de circulation. Selon lui, les autorités ont d’abord tenté d’exécuter le jugement contre le requérant sans recourir à une telle restriction. Il en déduit que la mesure litigieuse n’est ni de longue durée ni automatique. Il argue que les autorités nationales sont les mieux placées pour apprécier la nécessité de prendre des mesures de ce type au niveau national.

2. Appréciation de la Cour

25. La Cour rappelle que l’article 2 du Protocole no 4 à la Convention garantit à toute personne le droit de circuler à l’intérieur du territoire dans lequel elle se trouve ainsi que de le quitter, ce qui implique le droit de se rendre dans le pays de son choix, pour autant qu’elle soit autorisée à y entrer. Il en résulte qu’une mesure susceptible de porter atteinte à ce droit ou d’en restreindre l’exercice n’est conforme à l’article 2 du Protocole no 4 que si elle est prévue par la loi, poursuit l’un des buts légitimes visés au troisième paragraphe de la disposition en question et peut passer pour « nécessaire dans une société démocratique » à la poursuite dudit objectif (Ignatov c. Bulgarie, no 50/02, § 32, 2 juillet 2009).

26. En l’espèce, le requérant s’est vu imposer une interdiction de quitter le territoire d’une durée de quatre ans au moins. La Cour considère que la restriction ainsi imposée au droit de l’intéressé de circuler librement s’analyse en une ingérence au sens de l’article 2 du Protocole no 4 (Ignatov, précité, § 33).

27. La Cour observe également que les parties ne contestent pas que l’ingérence litigieuse était prévue par la loi, à savoir l’article 6 de la loi sur la procédure d’entrée dans le territoire ukrainien et de sortie de ce territoire pour les ressortissants ukrainiens, et qu’elle poursuivait un but légitime, à savoir la protection des droits d’autrui. La Cour est du même avis.

28. En revanche, les avis des parties divergent sur la proportionnalité de cette ingérence. À cet égard, la Cour rappelle qu’une mesure restreignant la liberté de circulation d’une personne, fût-elle justifiée au départ, peut devenir disproportionnée si elle se prolonge automatiquement pendant une longue période (Riener c. Bulgarie, no 46343/99, § 121, 23 mai 2006; Földes et Földesné Hajlik c. Hongrie, no 41463/02, § 35, CEDH 2006‑XII).

29. En ce qui concerne plus particulièrement les restrictions imposées en raison de dettes impayées, la Cour souligne que de telles mesures ne se justifient que tant qu’elles tendent à l’objectif poursuivi de garantir le recouvrement des dettes en question (Napijalo c. Croatie, no 66485/01, §§ 78-82, 13 novembre 2003). Dès lors, les autorités ne peuvent les prolonger longtemps sans réexaminer périodiquement si elles sont justifiées (Riener, précité, §§ 122 et 124).

30. En l’espèce, il n’est pas contesté que le jugement du 5 février 2014 n’a pas été exécuté volontairement. Étant donné cependant que le requérant conteste les conclusions des juridictions nationales selon lesquelles il s’était soustrait à l’exécution dudit jugement, la Cour réaffirme qu’il ne lui incombe pas normalement de se substituer aux juridictions internes. Elle a pour tâche, aux termes de l’article 19 de la Convention, d’assurer le respect par les États contractants des engagements résultant pour eux de la Convention. Eu égard au caractère subsidiaire du système de la Convention, il ne lui appartient pas de connaître des erreurs de fait ou de droit prétendument commises par une juridiction, sauf si et dans la mesure où elles pourraient avoir porté atteinte aux droits et libertés sauvegardés par la Convention, et si l’appréciation à laquelle se sont livrées les juridictions nationales est manifestement arbitraire (Vasiliauskas c. Lituanie [GC], no 35343/05, § 160, CEDH 2015, et les références citées). Les tribunaux nationaux ont fait droit à la demande de l’huissier et ont prononcé une interdiction de quitter le territoire à l’encontre de requérant, après avoir constaté qu’il avait failli dans le remboursement des sommes d’argent (voir paragraphe 15, ci-dessus). Même si leurs conclusions peuvent faire l’objet de réserves à la lumière des explications de la Cour suprême (voir paragraphe 18, ci-dessus), ils ne sont pas manifestement déraisonnables et sont conformes à la lettre du droit. Ainsi, l’interdiction de quitter le territoire qui a été imposée au requérant a satisfait aux exigences du droit interne.

31. Toutefois, la Cour considère, à la lumière du principe de proportionnalité, que l’intention du débiteur en cas de non-paiement de la dette judiciaire, en plus d’être difficile à établir et de laisser une large place à la subjectivité, ne peut être le seul motif justifiant la restriction contestée lorsqu’elle se prolonge au-delà d’une courte période initiale. Le service compètent doit être en mesure d’expliquer comment l’interdiction de voyager pourrait servir à recouvrer la dette, en tenant compte de la situation individuelle du requérant et d’autres circonstances conjoncturelles de l’affaire. Or, en l’espèce, d’après les autorités nationales qui sont à l’origine de cette mesure et l’ont autorisée, ni le tribunal ni l’huissier n’étaient compétents pour lever l’interdiction ou pour en réexaminer l’opportunité et l’efficacité. Il ressort du droit interne de l’époque et de la position adoptée par les autorités nationales dans le cas du requérant qu’une fois l’interdiction imposée, celle-ci ne pouvait être levée qu’une fois la dette intégralement remboursée par l’intéressé. De l’avis de la Cour, une telle règlementation est contraire à l’article 2 du Protocole no 4 de la Convention.

32. La Cour prend acte de la réforme de la procédure civile qui permet à tout débiteur d’engager une procédure de levée des restrictions de voyage (voir paragraphes 19 et 20, ci-dessus). Toutefois, cette réforme est intervenue après les faits qui ont donné lieu à la présente requête. Eu égard à ces considérations, la Cour estime que le requérant a été soumis à des mesures qui n’étaient pas suffisamment justifiées et qui ne pouvaient pas être reconsidérées, ni réexaminées jusqu’à l’échéance constituée par le paiement intégral (comparer avec Riener, précité, § 127). Elle en conclut que les autorités ukrainiennes ont manqué à l’obligation, née de l’article 2 du Protocole no 4 à la Convention, de veiller à ce que toute atteinte portée au droit d’une personne de quitter son pays soit, dès le départ et tout au long de sa durée, justifiée et proportionnée au regard des circonstances.

Partant, il y a eu violation du droit du requérant à la liberté de circulation garanti par l’article 2 § 2 du Protocole no 4 à la Convention.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

33. Aux termes de l’article 41 de la Convention :

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

34. Le requérant demande 10 000 euros (EUR) au titre du dommage moral qu’il estime avoir subi.

35. Le Gouvernement conteste cette demande, qu’il estime infondée et excessive.

36. La Cour considère que le requérant a dû subir un dommage moral que le seul constat de violation de la Convention dans le présent arrêt ne suffit pas à réparer. Statuant en équité, elle lui alloue 1 000 EUR pour dommage moral, plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt.

B. Frais et dépens

37. Le requérant réclame 850 EUR au titre des frais et dépens qu’il a engagés dans le cadre de la procédure menée devant la Cour.

38. Le Gouvernement estime que le requérant n’a pas fourni assez d’éléments et de justificatifs à l’appui de sa demande.

39. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce, compte tenu des documents en sa possession et des critères susmentionnés, la Cour juge raisonnable d’allouer au requérant la somme demandée au titre de la procédure menée devant elle, plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt.

C. Intérêts moratoires

40. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 2 du Protocole no 4 ;

3. Dit

a) que l’État défendeur doit verser au requérant, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur au taux applicable à la date du règlement :

i. 1 000 EUR (mille euros), plus tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii. 850 EUR (huit cent cinquante euros), plus tout montant pouvant être dû sur cette somme par le requérant à titre d’impôt, pour frais et dépens ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

4. Rejette le surplus de la demande de satisfaction équitable.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 11 mai 2021, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Victor Soloveytchik                             Síofra O’Leary
Greffier                                                  Présidente

Dernière mise à jour le mai 17, 2021 par loisdumonde

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