La requête concernele refus des autorités nationales de permettre au requérant, alors qu’il était détenu à la prison de Jilava, de se rendre au service religieux à l’extérieur de celle-ci en raison des mesures mises en place pendant la pandémie de Covid-19. Le requérant invoque l’article 9 de la Convention.
QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE CONSTANTIN-LUCIANSPÎNU c. ROUMANIE
(Requête no 29443/20)
ARRÊT
Art 9 • Manifester sa religion • Refus ponctuel, en raison du Covid-19, de permettre à un détenu de participer au culte de son Égliseà l’extérieur de la prison ayant ensuite proposé une assistance religieuse en ligne • Protection de la santé et l’intégrité des détenus dans un milieu clos • Caractère imprévisible et inédit de la crise sanitaire • Large marge d’appréciation • Efforts raisonnables des autorités nationales pour contrebalancer les restrictions • Prise en compte par les autorités pénitentiaires de la situation individuelle du requérant et de l’évolution de la crise sanitaire
STRASBOURG
11 octobre 2022
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Constantin-Lucian Spînu c. Roumanie,
La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en une Chambrecomposée de :
Gabriele Kucsko-Stadlmayer, présidente,
Tim Eicke,
Faris Vehabović,
Iulia AntoanellaMotoc,
Yonko Grozev,
Armen Harutyunyan,
Ana Maria Guerra Martins, juges,
et de Ilse Freiwirth, greffière adjointe de section,
Vu :
la requête (no 29443/20) dirigée contre la Roumanie et dont un ressortissant de cet État, M. Constantin-Lucian Spînu (« le requérant ») a saisi la Cour en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention ») le 20 août 2020,
la décision de porter à la connaissance du gouvernement roumain (« le Gouvernement ») le grief concernant l’exercice du droit à la liberté de religion en prison,
les observations communiquées par le gouvernement défendeur et celles communiquées en réplique par le requérant,
les observations reçues des organisations non gouvernementalesCentreeuropéen pour le droit et la justiceet l’Institute for Legal Culture Ordo Iuris, que le président de la section avait autorisées à se porter tierces intervenantes,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 20 septembre 2022,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
INTRODUCTION
1. La requête concernele refus des autorités nationales de permettre au requérant, alors qu’il était détenu à la prison de Jilava, de se rendre au service religieux à l’extérieur de celle-ci en raison des mesures mises en place pendant la pandémie de Covid-19. Le requérant invoque l’article 9 de la Convention.
EN FAIT
2. Le requérant est né en 1973 et est détenu à Jilava. Il a été représenté par Me Balint, avocate.
3. Le Gouvernement a été représenté par son agente, Mme O. Ezer, du ministère des Affaires étrangères.
4. Au moment des faits, le requérant était détenu, depuis le 12 juin 2019, à la prison de Jilava. Il indique qu’il est membre de l’Église adventiste du septième jour. Il ressort du dossier qu’en 2019 et jusqu’au 29 février 2020, il avait été autorisé à quitter l’établissement pénitentiaire et à se rendre au service religieux de l’Église adventiste.
5. Le 8 juillet 2020, l’intéressé demanda par écrit aux autorités pénitentiaires l’autorisation de se rendre au service religieux. Dans cette demande manuscrite, il expliquait qu’il souhaitait participer tous les samedis au service religieux du sabbat (înfiecaresabat (sâmbăta)) organisé dans une église adventiste sise dans le sixième arrondissement de Bucarest.
6. Le directeur de l’établissement refusa la demande et le requérant contesta ce refus devant le juge chargé du contrôle de la privation de liberté (judecătorul de supraveghere a privării de libertate) de Jilava. Le 20 juillet 2020, le juge entendit le requérant.
7. Devant le juge chargé du contrôle de la privation de liberté, l’administration de la prison de Jilava motiva le refus par le contexte sanitaire lié à la pandémie de Covid-19, expliquant que celui-ci avait limité les activités permises à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire. Il ajouta que la collaboration de l’Église adventiste avec l’Administration nationale des établissements pénitentiaires (« ANP ») avait été interrompue en raison de la pandémie, et que la reprise des activités n’avait pas encore été décidée.
8. Par une décision du 23 juillet 2020, le juge chargé du contrôle de la privation de liberté rejeta la contestation du requérant. Il prit en compte l’ingérence subie par le requérant et nota qu’elle était prévue par la loi no 55/2020 portant des mesures pour la prévention et la lutte contre les effets de la pandémie de Covid-19 (« la loi no 55/2020 » ; paragraphes 16-17 ci‑dessous) et qu’elle poursuivait un but légitime conforme aux dispositions de cette loi. Il ajouta que la restriction du droit du requérant était raisonnable et limitée dans le temps et qu’elle ne dépassait pas un niveau supportable (nu depăşeşteprineaînsăşi un nivelsuportabil). Enfin, il nota que, dans le contexte de la pandémie, l’établissement pénitentiaire avait suspendu certaines activités dans les postes de travail (puncte de lucru) à l’intérieur et toutes les activités dans les postes de travail extérieurs, de sorte que la demande du requérant n’avait pas été examinée de manière arbitraire.
9. Le requérant contesta la décision du juge chargé du contrôle de la privation de liberté devant le tribunal de première instance de Bucarest (« le tribunal de première instance »).
10. Par une décision définitive du 11 août 2020, le tribunal de première instance rejeta l’action du requérant, par une décision dont les passages pertinents sont ainsi libellés :
« (…) [le tribunal] constate qu’en raison de la situation engendrée par la pandémie en cours, les conditions d’exercice des activités des personnes privées de liberté ont été modifiées [et que ces modifications] visent en premier lieu à garantir la sécurité et la santé des personnes détenues et de celles qui entrent en contact avec elles. En ce sens, le directeur général de l’ANP a pris deux décisions générales no 28758/09.03.2020 et no 446/14.05.2020 interrompant les activités de réinsertion sociale à l’extérieur de l’établissement pendant toute la durée de maintien en vigueur des mesures imposées par le groupe de soutien technico-scientifique sur la gestion des maladies hautement contagieuses sur le territoire de la Roumanie et restreignant les catégories d’activités pouvant être exercées par les détenus à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire, seules [les activités] absolument nécessaires étant maintenues, à savoir la comparution devant les organes judiciaires, la présence au contrôle médical de spécialité ainsi que le transfert entre les unités pénitentiaires et les activités de production. En outre, la demande du requérant ne pouvait pas être approuvée puisque l’activité des églises avait été suspendue et que l’assistance morale et religieuse dans les établissements du système pénitentiaire avait été interrompue, de sorte que le déroulement des activités auxquelles le requérant souhaitait avoir accès était matériellement impossible. En conséquence, la réponse négative donnée à la demande de l’intéressé est justifiée et la question d’une violation du droit à l’exercice du culte dans des lieux de culte extérieurs à la prison ne se pose pas puisque celui-ci est à présent impossible à organiser. »
LE CADRE JURIDIQUE INTERNE PERTINENT
I. Les normes relatives À la libertÉ de religion
11. Les normes pertinentes en matière de droit à la liberté de religion énoncées dans la Constitution roumaine et la loi no 254/2013 sur l’exécution des peines et des mesures privatives de liberté décidées par les autorités judiciaires au cours du procès pénal (« la loi no 254/2013 ») sont résumées dans l’arrêt Erlich et Kastro c. Roumanie (nos 23735/16 et 23740/16, §§ 9 et 11, 9 juin 2020).
12. De plus, la Constitution roumaine prévoit ce qui suit en sa partie pertinente en l’espèce :
Article 53 – la restriction de l’exercice des droits ou des libertés
« 1. L’exercice des droits ou des libertés ne peut être restreint que par la loi et seulement s’il s’impose, le cas échéant, pour : la défense de la sécurité nationale, de l’ordre, de la santé ou de la morale publique, des droits et des libertés des citoyens ; le déroulement de l’instruction pénale ; la prévention des conséquences d’une calamité naturelle, d’un désastre ou d’un sinistre particulièrement grave.
2. La restriction ne peut être décidée que si elle est nécessaire dans une société démocratique. La mesure doit être proportionnée à la situation qui l’a déterminée et doit être appliquée de manière non discriminatoire et sans porter atteinte à l’existence du droit ou de la liberté. »
13. En outre, le passage pertinent en l’espèce de la loi no 254/2013 est ainsi libellé :
Article 38
« 3. Les personnes condamnées qui purgent leur peine en régime ouvert sont logées en commun, elles peuvent se déplacer non accompagnées dans les zones préétablies à l’intérieur de l’établissement pénitentiaire, elles peuvent travailler et effectuer des activités éducatives, culturelles, thérapeutiques, de consultation psychologique et d’assistance sociale, morales et religieuses, d’instruction scolaire et de formation professionnelle, à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire, sans surveillance, dans les conditions fixées par le règlement d’application de la présente loi. »
II. les normes adoptÉes dans le contexte de la pandémie de covid-19
14. Le 17 mars 2020, la Représentation permanente de la Roumanie auprès du Conseil de l’Europe a informé la Secrétaire générale du Conseil de l’Europe (« la Secrétaire générale ») que la Roumanie entendait appliquer la dérogation prévue à l’article 15 de la Convention (voir également Terheş c. Roumanie (déc.), no 49933/20, §§ 9 et 18, 13 avril 2021). Par la suite, les autorités roumaines ont informé régulièrement la Secrétaire générale des différentes mesures adoptées jusqu’à la cessation de l’état d’urgence, intervenue le 14 mai 2020 à minuit. Une note adressée le 15 mai 2020 par les autorités roumaines précise que les dispositions normatives qui auraient pu déroger aux dispositions de la Convention ont également cessé d’être en vigueur le 14 mai 2020 à minuit.
15. Les dispositions de l’ordonnance d’urgence du gouvernement no 1/1999 sur le régime de l’état de siège et le régime de l’état d’urgence ainsi que celles des décrets et ordonnances militaires pris en Roumanie pendant l’état d’urgence sont décrites dans la décision Terheş (précitée, §§ 20-29).
16. L’état d’urgence a été ensuite remplacé par l’état d’alerte. La loi no 55/2020, entrée en vigueur le 18 mai 2020, comporte les dispositions suivantes pertinentes à cet égard :
Article 1
« La présente loi a pour objet l’adoption, pour la durée de l’état d’alerte déclaré dans les conditions prévues par la loi, en vue de la prévention et de la lutte contre les effets de la pandémie de Covid-19, de certaines mesures temporaires et, le cas échéant, graduelles, destinées à protéger les droits à la vie, à l’intégrité physique et à la protection de la santé, y compris par la restriction de l’exercice de certains droits et libertés fondamentaux. »
17. La loi no 55/2020 contient en outre les dispositions suivantes :
Article 61
« 1. S’agissant de l’exécution des peines et des mesures de privation de liberté décidées par les organes judiciaires pendant le procès pénal, les mesures exceptionnelles suivantes peuvent être adoptées sur décision du directeur général de l’ANP :
(…)
b) l’organisation des activités du programme quotidien auxquelles participent les personnes privées de liberté, telles que les activités et les programmes (…) moraux ou religieux (…), de sorte que le temps minimum prévu par les dispositions légales soit respecté et que [ces activités] se déroulent en groupes restreints de personnes portant l’équipement de protection individuelle et respectant les règles de distanciation sociale ;
(…)
g) le report (amânarea) de l’exercice du droit à la visite intime et de la mise en application des récompenses autorisant la sortie de l’établissement pénitentiaire, dans les cas où l’octroi de ces récompenses affecterait les mesures de prévention et de sécurité médicale ;
(…)
2. Les mesures adoptées en vertu du paragraphe 1 doivent être proportionnées à la situation qui les a motivées et aussitôt communiquées au ministre de la Justice avec les motifs sur lesquels repose leur adoption.
3. Après que la situation ayant entraîné l’adoption des mesures prises en vertu du paragraphe 1 aura cessé, l’administration de l’établissement de détention procédera à l’octroi échelonné des droits dont l’exercice a été suspendu pendant l’état d’alerte ainsi qu’à la mise en application des récompenses, y compris les permissions de sortie de l’établissement pénitentiaire, dans les conditions prévues par la législation en vigueur. »
18. Le 14 mai 2020, le directeur de l’ANP adopta une décision no 446 portant approbation du plan de mesures pour le système pénitentiaire après la cessation de l’état d’urgence. Le point 20 de ce plan, annexé à la décision no 446, détaillait les mesures à prendre lorsque les détenus se déplaçaient à l’extérieur de la prison pour les raisons suivantes : la comparution devant les autorités judiciaires, la présence au contrôle médical de spécialité, le transfert entre les établissements pénitentiaires et la participation aux activités de production. Le point 22 prévoyait la reprise des activités de réinsertion sociale, notamment celles de nature morale et religieuse, à l’intérieur des prisons et dans le respect des règles sanitaires et de distanciation sociale. Plus précisément, le point 27 autorisait la reprise des activités religieuses, notamment les services religieux, dans le respect des règles fixées par les autorités nationales et l’Église orthodoxe. Enfin, selon le point 31, les demandes d’activités de réinsertion sociale se déroulant à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire ne pouvaient être examinées et approuvées que dans des situations dûment justifiées, en fonction de la situation épidémiologique de la commune concernée par le déplacement envisagé, après avis médical et dans le respect des normes médicales, dont celles relatives au port des moyens de protection.
III. LA PRATIQUE DE LA COUR CONSTITUTIONNNELLE
19. Le 25 juin 2020, la Cour constitutionnelle roumaine rendit une décision no 458/2020 statuant sur une exception d’inconstitutionnalité dirigée contre les dispositions de l’article 25 § 2 de la loi no 95/2006 relative à la réforme du domaine de la santé, contre l’article 8 § 1 de l’ordonnance d’urgence du gouvernement no 11/2020 sur les stocks d’urgence médicale et contre certaines mesures relatives à l’instauration de la quarantaine.
20. Cette décision visait les dispositions législatives relatives à la compétence du ministre de la Santé pour adopter des mesures relatives à la gestion des situations d’urgence provoquées par des épidémies, à l’internement obligatoire des personnes atteintes de certaines maladies transmissibles et à la quarantaine des personnes entrant sur le territoire national depuis des zones touchées par une pandémie. La Cour constitutionnelle conclut que l’internement obligatoire et l’instauration de la quarantaine restreignaient les droits fondamentaux et que toute mesure restrictive de cette nature devait être réglementée par la législation primaire. La décision de la Cour constitutionnelle acquit force obligatoire le 2 juillet 2020.
ÉLÉMENTS DE DROIT INTERNATIONAL
I. NATIONS UNIES
21. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (« PIDCP »), auquel la Roumanie est partie depuis son entrée en vigueur le 23 mars 1976, prévoit ceci :
Article 4
« 1. Dans le cas où un danger public exceptionnel menace l’existence de la nation et est proclamé par un acte officiel, les États parties au présent Pacte peuvent prendre, dans la stricte mesure où la situation l’exige, des mesures dérogeant aux obligations prévues dans le présent Pacte, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les autres obligations que leur impose le droit international et qu’elles n’entraînent pas une discrimination fondée uniquement sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou l’origine sociale.
2. La disposition précédente n’autorise aucune dérogation aux articles 6, 7, 8 (par. 1 et 2), 11, 15, 16 et 18. »
Article 18
« 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu’en privé, par le culte et l’accomplissement des rites, les pratiques et l’enseignement.
2. Nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à sa liberté d’avoir ou d’adopter une religion ou une conviction de son choix.
3. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires à la protection de la sécurité, de l’ordre et de la santé publique, ou de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d’autrui.
(…) »
22. Les « Principes de Syracuse concernant les dispositions du PIDCP qui autorisent des restrictions ou des dérogations » (« les Principes de Syracuse ») ainsi que les Observations générales no 29 sur l’article 4 du PIDCP adoptées par le Comité des droits de l’homme des Nations unies le 24 juillet 2001 sont détaillés dans l’arrêt A. et autres c. Royaume-Uni [GC] (no 3455/05, §§ 109-110, CEDH 2009). Les « Principes de Syracuse » comportent notamment les précisions suivantes :
« 25. La santé publique peut être invoquée comme un motif pour restreindre certains droits, afin de permettre à un État de prendre des mesures en cas de menace grave à la santé de la population ou de certains éléments de la population. Ces mesures doivent avoir spécialement pour but de prévenir des maladies ou des accidents et de permettre d’apporter des soins aux malades et aux blessés.
26. Il doit être tenu dûment compte du Règlement sanitaire international de l’Organisation mondiale de la santé.
(…)
58. Même en cas de danger public exceptionnel menaçant l’existence de la nation, aucun État partie ne doit déroger aux garanties prévues par le Pacte (…) du droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ces droits ne sont susceptibles d’aucune dérogation en quelque circonstance que ce soit, même si l’objectif déclaré est de préserver l’existence de la nation. »
II. CONSEIL DE L’EUROPE
23. La Recommandation Rec(2006)2-rev du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe aux États membres sur les Règles pénitentiaires européennes, adoptée le 11 janvier 2006 et révisée et modifiée le 1er juillet 2020 (« les Règles pénitentiaires européennes »), prévoit ce qui suit :
Contacts avec le monde extérieur
« 24.1 Les détenus doivent être autorisés à communiquer aussi fréquemment que possible – par lettre, par téléphone ou par d’autres moyens de communication – avec leur famille, des tiers et des représentants d’organismes extérieurs, ainsi qu’à recevoir des visites desdites personnes.
24.2 Toute restriction ou surveillance des communications et des visites nécessaires à la poursuite et aux enquêtes pénales, au maintien du bon ordre, de la sécurité et de la sûreté, ainsi qu’à la prévention d’infractions pénales et à la protection des victimes – y compris à la suite d’une ordonnance spécifique délivrée par une autorité judiciaire – doit néanmoins autoriser un niveau minimal acceptable de contact.
(…)
24.7 Lorsque les circonstances le permettent, le détenu doit être autorisé à quitter la prison – soit sous escorte, soit librement – pour rendre visite à un parent malade, assister à des obsèques ou pour d’autres raisons humanitaires.
(…) »
Liberté de pensée, de conscience et de religion
« 29.1 Le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion des détenus doit être respecté.
29.2 Le régime carcéral doit être organisé, autant que possible, de manière à permettre aux détenus de pratiquer leur religion et de suivre leur philosophie, de participer à des services ou réunions menés par des représentants agréés des dites religions ou philosophies, de recevoir en privé des visites de tels représentants de leur religion ou leur philosophie et d’avoir en leur possession des livres ou publications à caractère religieux ou spirituel.
29.3 Les détenus ne peuvent être contraints de pratiquer une religion ou de suivre une philosophie, de participer à des services ou des réunions de nature religieuse, de participer à des pratiques religieuses ou bien d’accepter la visite d’un représentant d’une religion ou d’une philosophie quelconque. »
24. Le Commentaire de la Recommandation Rec(2006)2-rev comporte les précisions suivantes ː
Contacts avec le monde extérieur
« La règle 24.5 oblige de manière positive les autorités pénitentiaires à aider les détenus à maintenir des liens avec le monde extérieur. Les autorités pénitentiaires doivent en particulier envisager d’autoriser tout détenu à quitter la prison pour des raisons humanitaires, comme le prévoit la règle 24.7. La Cour européenne des Droits de l’Homme a déclaré que, lorsqu’il n’existe aucun risque de fuite, un détenu doit être autorisé à quitter la prison pour assister aux obsèques d’un proche parent. Les raisons familiales (la naissance d’un enfant par exemple) sont des raisons humanitaires qui justifient la sortie de prison d’un détenu. »
Liberté de pensée, de conscience et de religion
« Les règles pénitentiaires ont considéré jusqu’ici la place de la religion en prison comme non problématique et se sont limitées à formuler des recommandations positives sur les meilleurs moyens d’organiser la vie religieuse en prison. Cependant, l’augmentation dans certains pays du nombre de détenus animés de fortes convictions religieuses nécessite l’adoption d’une approche mieux fondée en principe, ainsi que d’exigences positives.
La règle 29.1 vise à assurer la reconnaissance de la liberté de religion et de la liberté de pensée et de conscience, conformément à l’article 9 de la CEDH.
La règle 29.2 ajoute l’obligation positive pour les autorités pénitentiaires de faciliter la pratique religieuse et le respect des croyances des détenus. Diverses mesures pourront être prises à cet égard. La règle 22 prévoit déjà que les exigences liées à des convictions religieuses soient prises en compte dans le régime alimentaire des détenus. Dans la mesure du possible, des lieux de culte et de réunion doivent être fournis dans chaque prison aux détenus de diverses religions et confessions. Lorsqu’une prison contient un nombre suffisant de détenus appartenant à une même religion, un représentant de cette religion doit être agréé. Lorsque le nombre de détenus le justifie et si les conditions le permettent, la personne désignée devra remplir cette fonction à plein temps. Le représentant qualifié doit être autorisé à tenir des services réguliers, à organiser des activités et à avoir des entretiens en privé avec les détenus appartenant à sa religion. Aucun détenu ne doit se voir refuser l’accès au représentant agréé d’une religion. En cas contraire, il pourrait y avoir violation de l’article 9 de la CEDH. Le principe selon lequel il convient de protéger la liberté de religion des détenus est également énoncé au paragraphe 2 des Lignes directrices à l’intention des services pénitentiaires et de probation concernant la radicalisation et l’extrémisme violent, adoptées par le Comité des Ministres le 2 mars 2016. Il est précisé au paragraphe 23 de ces Lignes directrices que, lorsque cela est possible, les détenus doivent être autorisés à prendre leurs repas à des heures correspondant à leurs exigences religieuses. Les paragraphes 24 et 25 donnent des indications supplémentaires concernant les représentants religieux ainsi que la mise à disposition d’un espace et de ressources adéquats pour qu’ils puissent rencontrer les détenus en privé et organiser des services collectifs.
La règle 29.3 vise à protéger les détenus de toute pression indue en matière religieuse. Le prosélytisme devrait être évité. Ces questions sont abordées dans la section générale afin de souligner que la pratique religieuse ne doit pas être conçue principalement comme un aspect du programme de détention mais comme une question d’intérêt général concernant tous les détenus. »
25. Le 20 mars 2020, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) a fait une Déclaration de principes relative au traitement des personnes privées de liberté dans le contexte de la pandémie de coronavirus (Covid-19). Cette déclaration comporte notamment les passages suivants :
« 1) Le principe de base doit être de prendre toutes les mesures possibles pour protéger la santé et la sécurité de toutes les personnes privées de liberté. Prendre de telles mesures contribue également à préserver la santé et la sécurité du personnel.
2) Les lignes directrices de l’OMS sur la lutte contre la pandémie ainsi que les directives sanitaires et cliniques nationales conformes aux normes internationales doivent être respectées et pleinement appliquées dans tous les lieux de privation de liberté.
(…)
7) S’il est légitime et raisonnable de suspendre des activités non essentielles, les droits fondamentaux des personnes détenues pendant la pandémie doivent être pleinement respectés. Cela comprend notamment le droit de maintenir une hygiène personnelle adéquate (y compris l’accès à l’eau chaude et au savon) et le droit d’accès quotidien à l’air libre (d’au moins une heure). En outre, toute restriction des contacts avec le monde extérieur, y compris les visites, doit être compensée par un accès accru à d’autres moyens de communication (tels que le téléphone ou la communication par protocole de voix sur Internet).
26. Le 9 juillet 2020, le CPT a fait une nouvelle Déclaration relative à la situation des personnes privées de liberté dans le contexte de la pandémie actuelle de Covid-19. Cette nouvelle déclaration comporte notamment le passage suivant :
« (…) Par ailleurs, de nombreuses réponses font référence aux mesures prises pour faciliter les contacts des personnes détenues avec le monde extérieur afin de contrebalancer les restrictions imposées pour des motifs de santé publique. Ces mesures comprennent l’accès à des appels vidéo par internet ou l’accès plus fréquent et plus long à un téléphone tant que les visites demeurent interdites (…)
Fait important, les restrictions provisoires imposées pour contenir la propagation du virus doivent être levées dès qu’elles ne sont plus nécessaires. Il s’agit notamment des limites imposées aux personnes privées de liberté en matière de contacts avec le monde extérieur et de la réduction du nombre d’activités qui leur sont proposées. »
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION
27. Le requérant allègue une atteinte à son droit à la liberté de religion. Il invoque l’article 9 de la Convention, ainsi libellé :
« 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »
A. Sur la recevabilité
28. Constatant que la requête n’est pas manifestement mal fondée ni irrecevable pour un autre motif visé à l’article 35 de la Convention, la Cour la déclare recevable.
B. Sur le fond
1. Arguments des parties
a) Le requérant
29. Le requérant se plaint d’avoir subi une ingérence dans son droit au respect de sa religion. Il estime que cette ingérence n’était pas conforme à la Convention, notamment parce qu’elle n’était pas « prévue par la loi ». Il indique que le refus de l’autoriser à se rendre aux services religieux, qui lui a été opposé par l’administration pénitentiaire, était fondé sur les décisions du directeur de l’ANP, qui ne pouvaient pas, selon lui, être considérées comme « une loi » au sens de la Convention. À cet égard, il se fonde sur l’arrêt no 458 rendu le 25 juin 2020 par la Cour constitutionnelle roumaine (paragraphes 19‑20 ci-dessus), dont il déduit que l’ingérence qu’il dit avoir subie manquait de base légale parce qu’elle ne découlait pas de la législation primaire.
30. De l’avis du requérant, l’article 38 de la loi no 254/2013 (paragraphe 13 ci-dessus) consacre un droit absolu de se déplacer à l’intérieur et à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire et seules les modalités d’exercice de ce droit peuvent être arrêtées par le règlement d’application de la loi.
31. Enfin, le requérant expose que cette ingérence n’était pas nécessaire, proportionnelle et acceptable dans une société démocratique. Il indique que l’Église adventiste qu’il fréquentait continuait à assurer le service religieux avec un nombre restreint de participants qui présentaient un test PCR négatif et que l’accès au service lui était d’autant plus important qu’il lui permettait de trouver un équilibre et de traverser plus facilement la période de détention. Il estime que la pratique d’une activité religieuse contribue à l’amendement des personnes privées de liberté.
b) Le Gouvernement
32. Le Gouvernement expose que la loi no 254/2013 reconnait aux personnes privées de liberté le droit au respect de leur religion. Il précise que la demande faite par le requérant était fondée sur l’article 38 de la loi, mais que cette disposition ne prévoit que la possibilité – et non le droit – de participer à des activités religieuses à l’extérieur des prisons.
33. Le Gouvernement indique que l’administration de l’établissement de Jilava a permis au requérant, en 2019 et jusqu’au 29 février 2020, de participer aux services religieux de l’Église adventiste du septième jour, bien que celui-ci se fût déclaré chrétien orthodoxe au moment de son incarcération, qu’il eût ensuite formulé des demandes particulières en rapport avec d’autres religions et qu’il n’eût pas apporté la preuve de sa conversion ou de son appartenance à l’Église adventiste.
34. Le Gouvernement soutient que le refus d’autoriser le requérant à se rendre aux services religieux, qui lui a été opposé en juillet 2020, n’a pas affecté la substance de son droit et constitue une mesure dépourvue de caractère arbitraire ou discriminatoire prise dans le contexte général de la pandémie. À cet égard, il se réfère notamment à la décision no 446 adoptée par le directeur général de l’ANP le 14 mai 2020 (paragraphe 18 ci-dessus). Selon lui, cette restriction poursuivait un but légitime, consistant notamment à protéger la santé et l’intégrité des détenus et de toute personne susceptible d’entrer en contact avec eux et, plus généralement, la santé publique. Le refus des autorités pénitentiaires aurait dès lors été justifié et nécessaire et aurait cadré avec les autres mesures prises dans le but de prévenir et de combattre la propagation du virus.
35. Le Gouvernement rappelle que la Roumanie a pris la décision d’invoquer le droit de dérogation prévu par l’article 15 de la Convention et que, sur la base de cette dérogation, les autorités internes ont pris des mesures spécifiques après la déclaration de l’état d’urgence.
36. Par ailleurs, le Gouvernement avance que l’état d’alerte avait été instauré après la cessation de l’état d’urgence, et que certaines mesures restrictives avaient été maintenues, les autorités ayant envisagé un allègement progressif desdites mesures en fonction de l’évolution de la situation. Il expose que la décision no 446 prise le 14 mai 2020 par le directeur de l’ANP avait ainsi limité les catégories d’activités auxquelles les détenus pouvaient se livrer à l’extérieur des prisons (paragraphe 18 ci-dessus). Il ajoute que les activités des établissements religieux avaient aussi été affectées puisque l’accès aux lieux de culte avait été réglementé et que des mesures sanitaires spécifiques avaient été adoptées. Il précise que, selon les informations fournies par l’Église adventiste, les services religieux avaient été suspendus pendant certaines périodes (du 13 mars au 20 juin 2020, du 20 novembre au 5 décembre 2020 et du 17 au 24 avril 2021) et la reprise des activités avait été progressive. Il affirme que l’église adventiste que le requérant voulait fréquenter avait ainsi suspendu ses activités pendant certaines périodes en 2020 et 2021, que le nombre de personnes admises dans ce lieu de culte avait été limité à 60 et que la participation au service pouvait être subordonnée à une inscription préalable.
37. Le Gouvernement expose que l’ANP et l’Église adventiste avaient convenu que l’assistance religieuse serait apportée sous d’autres formes et que la prison de Jilava avait été le premier établissement pénitentiaire à proposer une assistance religieuse en ligne. Il ressort des éléments fournis par le Gouvernement que l’Église adventiste a commencé à fournir une assistance religieuse en ligne à la prison de Jilava à compter du 17 octobre 2020. Le Gouvernement précise également que des activités religieuses en ligne y avaient été organisées chaque samedi, entre 8 heures et 16 heures, sous la forme de visioconférences. Il affirme que le requérant avait refusé de participer à ces activités en ligne et n’avait formulé aucune autre demande relative à l’exercice de son droit au respect de la religion.
38. Le Gouvernement soutient qu’il était impossible en pratique d’accéder à la demande d’autorisation de se rendre au service religieux chaque samedi formulée par le requérant, en raison de l’évolution de la situation sanitaire et du caractère vague de cette demande, qui n’avait pas de limite temporelle.
39. Le Gouvernement conclut qu’il n’y a pas eu d’atteinte à la liberté religieuse du requérant.
2. Position des tiers intervenants
a) Le Centre européen pour le droit et la justice
40. Ce tiers intervenant reconnaît qu’en règle générale, l’article 9 de la Convention ne garantit pas aux détenus le droit de manifester leur religion en dehors des établissements pénitentiaires. Il note ensuite que la présente affaire se distingue d’autres affaires déjà jugées par la Cour en ce que le refus d’autoriser le requérant à participer au service religieux à l’extérieur de la prison était fondé non pas sur des raisons disciplinaires, mais sur des raisons sanitaires.
41. Le tiers intervenant estime que les mesures sanitaires prises par les autorités visaient un objectif légitime, à savoir la protection de la santé publique. Toutefois, il considère que le but de protection de la santé publique n’est pas un droit ou une liberté concurrente à la liberté de religion, mais seulement une limite légitime à l’exercice de cette liberté. Selon lui, il convient de distinguer, dans le contexte carcéral, la situation de la présence effective ou au moins potentielle de détenus malades de celle de la présence diffuse de la maladie dans la société.
42. De l’avis du tiers intervenant, les restrictions apportées à la liberté de manifester sa religion doivent être proportionnées, et non générales et absolues. Il estime que lorsque des mesures sanitaires illimitées sont cumulées, leur justification devient difficile. Il ajoute que les spécificités de chaque culte doivent être prises en compte, précisant que la célébration du culte dans certaines églises requiert la présence collective des fidèles, et que les solutions de remplacement offertes pour pratiquer telle ou telle religion doivent être examinées dans ce contexte. À cet égard, il observe que l’Église adventiste ne célèbre pas de sacrements, et que cette circonstance rend envisageable le culte à distance ou en ligne. De manière plus générale, il estime que les activités collectives profanes ne doivent pas être traitées de manière plus favorable que les activités religieuses.
43. Enfin, le tiers intervenant estime que la question de la mise en œuvre de la neutralité et de l’impartialité de l’État doit être soulevée. Il considère que l’épidémie ne pose pas uniquement l’enjeu biologique de freiner les contaminations, mais aussi des enjeux sociaux et spirituels, et que la politique des États n’est pas neutre et impartiale sur le plan religieux.
b) Institute for Legal CultureOrdoIuris
44. Ce tiers intervenant rappelle que toute limitation du droit au respect de la religion doit se conformer aux restrictions prévues par le paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention ou à celles découlant de l’article 15 de la Convention. Il considère que si une mesure est adoptée par voie réglementaire alors que le droit interne exige l’adoption d’une loi, la mesure en question n’a pas de base légale et est, dès lors, contraire à la Convention. De même, s’il admet que la protection de la santé publique peut passer pour un but légitime justifiant la restriction de la liberté religieuse, il affirme que le droit international ne fait pas primer la protection de la santé sur d’autres valeurs protégées par la loi.
45. Le tiers intervenant estime en outre que l’examen de la proportionnalité d’une mesure restrictive est primordial. À cet égard, il soutient que seules les mesures efficaces d’un point de vue scientifique peuvent être considérées comme nécessaires. Il émet des doutes quant à l’efficacité des mesures de confinement qui, selon certains avis scientifiques et médicaux, n’ont pas conduit à une réduction importante du nombre des décès liés au Covid-19.
3. Commentaires du Gouvernement en réponse aux observations soumises par les tiers intervenants
46. Le Gouvernement se rallie à la position du Centreeuropéen pour le droit et la justice dans la mesure où celui-ci sous-entend que la restriction au droit du requérant de manifester sa religion était conforme à la Convention.
47. Le Gouvernement conteste la position adoptée par l’Institute for Legal Culture Ordo Juris, notamment l’argument selon lequel le confinement n’a pas limité de manière efficace la propagation des infections par le virus. Il expose que l’objet de la présente requête ne vise pas les mesures prises par les autorités pour combattre la pandémie de manière générale, mais seulement la restriction au droit du requérant.
4. Appréciation de la Cour
a) Observations préliminaires
48. La Cour note que dans ses observations, le Gouvernement renvoie à la décision prise par les autorités roumaines d’invoquer les dispositions de l’article 15 de la Convention dans le contexte de la crise sanitaire et aux mesures spécifiques liées à la déclaration de l’état d’urgence (paragraphe 35 ci-dessus). Elle note également que la dérogation dont les autorités roumaines ont informé la Secrétaire générale a été appliquée du 17 mars au 14 mai 2020 à minuit (paragraphe 14 ci-dessus). Or, les mesures ici en cause ont été prises à compter du 8 juillet 2020, date à laquelle l’intéressé a demandé aux autorités pénitentiaires l’autorisation de se rendre à l’église adventiste pour célébrer le service religieux du sabbat (paragraphe 5 ci‑dessus). À cette date, la dérogation prise en vertu de l’article 15 de la Convention n’était plus applicable.
49. Il s’ensuit que la Cour prendra en considération pour son examen les seules dispositions de l’article 9 de la Convention.
b) Principes généraux
50. La Cour rappelle que, telle que la protège l’article 9 de la Convention, la liberté de pensée, de conscience et de religion représente l’une des assises d’une « société démocratique » au sens de cet instrument. Cette liberté figure, dans sa dimension religieuse, parmi les éléments les plus essentiels de l’identité des croyants et de leur conception de la vie, mais elle est aussi un bien précieux pour les athées, les agnostiques, les sceptiques ou les indifférents (Centre des sociétés pour la conscience de Krishna en Russie et Frolov c. Russie, no 37477/11, § 37, 23 novembre 2021). Il y va du pluralisme – chèrement conquis au cours des siècles – qui ne saurait être dissocié de pareille société. Cette liberté implique, notamment, celle d’adhérer ou non à une religion et celle de la pratiquer ou de ne pas la pratiquer (S.A.S. c. France [GC], no 43835/11, § 124, CEDH 2014 (extraits), et Erlich et Kastro c. Roumanie, nos 23735/16 et 23740/16, § 28, 9 juin 2020).
51. Si la liberté de religion relève d’abord du for intérieur, elle implique également celle de manifester sa religion individuellement et en privé, ou de manière collective, en public et dans le cercle de ceux dont on partage la foi. L’article 9 de la Convention énumère les diverses formes que peut prendre la manifestation d’une religion ou d’une conviction, à savoir le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites (Cha’are Shalom Ve Tsedekc. France [GC], no 27417/95, § 73, CEDH 2000‑VII ; Leyla Şahin c. Turquie [GC], no 44774/98, § 105, CEDH 2005‑XI ; et Erlich et Kastro, précité, § 29).
52. Dans une société démocratique, où plusieurs religions coexistent au sein d’une même population, il peut se révéler nécessaire d’assortir la liberté de manifester sa religion ou ses convictions de limitations propres à concilier les intérêts des divers groupes et à assurer le respect des convictions de chacun (Kokkinakis c. Grèce, 25 mai 1993, § 33 in fine, série A no 260‑A). Cela découle à la fois du paragraphe 2 de l’article 9 et des obligations positives qui incombent à l’État au titre de l’article 1 de la Convention de reconnaître à toute personne relevant de sa juridiction les droits et libertés définis dans celle-ci (Leyla Şahin, précité, § 106, et Erlich et Kastro, précité, § 30).
53. Il faut également rappeler le rôle fondamentalement subsidiaire du mécanisme de la Convention. Les autorités nationales jouissent d’une légitimité démocratique directe et, ainsi que la Cour l’a affirmé à maintes reprises, se trouvent en principe mieux placées que le juge international pour se prononcer sur les besoins et contextes locaux. Lorsque sont en jeu des questions de politique générale, sur lesquelles de profondes divergences peuvent raisonnablement exister dans un État démocratique, il y a lieu d’accorder une importance particulière au rôle du décideur national. S’agissant de l’article 9 de la Convention, il convient, en principe, de reconnaître à l’État une ample marge d’appréciation pour décider si et dans quelle mesure une restriction au droit de manifester sa religion ou ses convictions est « nécessaire » (S.A.S. c. France, précité, § 129). Cela étant, pour déterminer l’ampleur de la marge d’appréciation dans une affaire donnée, la Cour doit également tenir compte de l’enjeu propre à l’espèce (voir, notamment, Manoussakis et autres c. Grèce, 26 septembre 1996, § 44, Recueildes arrêts et décisions 1996‑IV ; Leyla Şahin, précité, § 110 ; et Erlich et Kastro, précité, § 31).
54. Si la frontière entre les obligations positives et les obligations négatives de l’État au regard de la Convention ne se prête pas à une définition précise, les principes applicables n’en sont pas moins comparables. En particulier, dans les deux cas, il faut prendre en compte le juste équilibre à ménager entre l’intérêt général et les intérêts de l’individu, l’État jouissant en toute hypothèse d’une marge d’appréciation (Eweida et autres c. Royaume‑Uni, nos 48420/10 et 3 autres, § 84 in fine, CEDH 2013 (extraits), et Erlich et Kastro, précité, § 32).
55. Enfin, la Cour a récemment précisé, dans le contexte de l’exemption du service militaire, que lorsqu’une personne sollicite une exemption spéciale sur le fondement de ses croyances ou convictions religieuses, il n’est pas abusif ou fondamentalement contraire à la liberté de conscience de lui demander une preuve du sérieux de ses convictions et, faute d’une telle justification, de parvenir à une conclusion négative (Dyagilev c. Russie, no 49972/16, § 62, 10 mars 2020, avec les références y sont citées).
c) Application en l’espèce des principes généraux susmentionnés
56. La Cour note d’emblée que dans ses observations, le Gouvernement indique que le requérant s’est déclaré chrétien orthodoxe au moment de son incarcération, qu’il a ensuite formulé des demandes particulières en rapport avec d’autres religions et qu’il n’a pas apporté la preuve de sa conversion ou de son appartenance à l’Église adventiste (paragraphe 33 ci‑dessus). Toutefois, elle relève que les autorités nationales n’ont jamais remis en cause l’appartenance religieuse du requérant (paragraphes 8 et 10 ci-dessus). Elle ne discerne en outre aucun élément susceptible de jeter un doute sur l’authenticité des convictions religieuses de l’intéressé (Vartic c. Roumanie (no 2), no 14150/08, § 46, 17 décembre 2013).
57. Le requérant se plaint d’avoir subi une ingérence dans son droit au respect de sa religion (paragraphe 29 ci-dessus). Il expose que cette ingérence résulte du refus opposé par l’administration pénitentiaire de l’établissement de Jilava à sa demande d’autorisation de se rendre dans une église adventiste sise dans le sixième arrondissement de Bucarest pour célébrer le service religieux du sabbat (paragraphe 5 ci-dessus). La Cour note que, avant le début de la crise sanitaire, les autorités pénitentiaires avaient permis au requérant de se rendre à l’église, en application de la règlementation en vigueur (paragraphe 4 ci-dessus). Elle admet donc que les faits dénoncés par l’intéressé sont constitutifs d’une ingérence dans son droit tel que protégé par l’article 9 de la Convention. Elle note que le Gouvernement ne le conteste pas et que ses arguments selon lesquels le refus opposé au requérant n’a pas affecté la substance du droit de celui-ci relèvent plutôt de la justification de cette ingérence (paragraphe 34 ci-dessus).
58. La Cour doit donc examiner si cette ingérence satisfaisait aux conditions énoncées dans le paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention, notamment si elle était « prévue par la loi », si elle poursuivait un « but légitime » et si elle était « nécessaire dans une société démocratique ».
i. L’ingérence était-elle prévue par la loi ?
59. En premier lieu, la Cour observe que le requérant allègue que l’ingérence qu’il a subie n’était pas prévue par la loi (paragraphe 29 ci‑dessus). À cet égard, elle rappelle que les principes pertinents en la matière sont résumés dans l’arrêt Kudrevičius et autres c. Lituanie ([GC], no 37553/05, §§ 108-110, CEDH 2015). La Cour ne partage pas l’avis du requérant selon lequel il a un droit absolu de se déplacer à l’intérieur et à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire (paragraphe 30 ci-dessus). Elle note que l’article 38 de la loi no 254/2013 accorde aux personnes privées de liberté qui purgent leur peine en régime ouvert une possibilité subordonnée à certaines conditions d’effectuer des activités, y inclus des activités religieuses, à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire (paragraphe 13 ci‑dessus). Elle observe par ailleurs que les juges internes ont indiqué que l’exercice des droits des personnes privées de liberté pouvait être restreint pendant la pandémie de Covid-19 (paragraphes 8 et 10 ci-dessus).
60. La Cour note aussi que les juges internes ont estimé que la restriction du droit du requérant de mener des activités à l’extérieur de la prison découlait de la loi no 55/2020 (paragraphes 8 et 16-17 ci-dessus). L’argument du requérant selon lequel la restriction apportée à son droit ne découlait pas du droit primaire doit donc être écarté (paragraphe 29 ci-dessus). Par ailleurs, la Cour constate que l’argument du requérant tiré de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle se rapporte à une décision qui vise une autre situation de fait, et que l’intéressé ne l’a pas soulevé devant les tribunaux internes (voir, mutatis mutandis, Neagu c. Roumanie, no 21969/15, § 36, 10 novembre 2020). La décision de la Cour constitutionnelle étant antérieure aux faits de l’espèce, il était loisible au requérant de soulever devant les juges internes ses arguments tirés de l’absence de base légale de l’ingérence litigieuse.
61. Qui plus est, la Cour ne discerne pas en l’espèce d’élément qui puisse faire douter de l’accessibilité ou de la prévisibilité de la loi en cause, et elle constate par ailleurs que l’intéressé ne met pas en cause la qualité de cette loi. à cet égard, elle observe que l’article 61 de la loi no 55/2020 comporte des dispositions autorisant l’instauration de restrictions aux sorties des établissements pénitentiaires en raison de la pandémie de Covid-19 (paragraphe 17 ci-dessus). Le fait que la loi délègue au directeur général de l’ANP la possibilité de mettre en place de telles mesures (paragraphes 17-18 ci-dessus) ne change rien à ce constat (voir, mutatis mutandis, Barthold c. Allemagne, 25 mars 1985, §§ 45-46, série A no 90).
62. La Cour estime donc que l’ingérence subie par le requérant était prévue par la loi.
ii. L’ingérence poursuivait-elle un but légitime ?
63. Ensuite, la Cour note que le Gouvernement expose que la mesure litigieuse tendait à protéger la santé et l’intégrité des détenus et de toute personne susceptible d’entrer en contact avec eux et, plus généralement, la santé publique (paragraphe 34 ci‑dessus). En effet, la Cour rappelle que la protection de la santé publique figure au paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention comme l’un des buts pouvant justifier une restriction de la liberté de manifester sa religion. Dans une affaire similaire, la Cour a déjà imposé aux autorités pénitentiaires l’obligation d’adopter des mesures visant à prévenir les infections dans le contexte de la pandémie de Covid-19, de limiter la propagation du virus une fois que celui-ci est entré dans une prison et de fournir un traitement médical adéquat en cas de contamination (Fenech c. Malte, no 19090/20, §§ 129-130, 1er mars 2022). Elle souligne que le droit international reconnaît également que la santé publique peut être invoquée comme motif pour restreindre certains droits (paragraphes 21-22 ci‑dessus).
64. En conséquence, la Cour admet que la mesure litigieuse poursuivait les buts légitimes invoqués par le Gouvernement.
iii. L’ingérence était-elle nécessaire dans une société démocratique ?
65. Enfin, la Cour note que le requérant avait demandé aux autorités pénitentiaires l’autorisation de sortir de la prison pour se rendre dans une église adventiste afin d’y célébrer le sabbat (paragraphe 5 ci-dessus). Elle reconnaît que la participation au service religieux est une composante importante de l’exercice du droit à la liberté de religion. Elle rappelle que, selon sa jurisprudence, la liberté de religion implique également celle de manifester sa religion individuellement et en privé, ou de manière collective, en public et dans le cercle de ceux dont on partage la foi (voir la jurisprudence citée au paragraphe 51 ci-dessus). Les observations des parties intervenantes vont dans le même sens (paragraphe 42 ci-dessus).
66. La Cour note ensuite que les autorités ont rejeté la demande de l’intéressé (paragraphe 6 ci-dessus). La restriction du droit du requérant au respect de sa religion ne visait cependant qu’une seule composante de l’exercice de son droit à la liberté de religion. En effet, elle était limitée à la participation du requérant au culte religieux de son Église à l’extérieur de la prison. Le requérant n’a pas allégué avoir été empêché de pratiquer sa religion d’une autre manière pendant sa détention ou avoir formulé d’autres demandes qui auraient été refusées.
67. La Cour ne saurait ignorer le fait que le requérant avait été autorisé à sortir de la prison avant le début de la crise sanitaire (paragraphe 4 ci-dessus) et que rien dans le dossier n’indique que l’usage de cette faculté aurait été problématique pour les autorités pénitentiaires à ce moment-là. Toutefois, elle estime que la restriction du droit du requérant de se rendre au service religieux doit être appréciée à la lumière du contexte en constante évolution de la crise sanitaire (Fenech, précité, § 130 in fine). À cet égard, elle note que le requérant avait formulé sa demande le 8 juillet 2020, alors que l’état d’alerte était en vigueur et que la législation qui le régissait prévoyait un allégement progressif des conditions imposées auparavant (paragraphes 16 et 17 ci‑dessus). La Cour observe que le tribunal de première instance s’est limité à constater, dans sa décision du 11 août 2020, que l’activité des églises a été suspendue (paragraphe 10 ci-dessus) et que ces constats ont un caractère plutôt général dans la mesure où il ne semble pas que le tribunal ait examiné la situation de l’église adventiste en question. Dans ce contexte, elle relève que l’église fréquentée par le requérant n’avait toutefois pas repris ses activités dans des conditions identiques à celles qui étaient en vigueur avant la crise sanitaire. Le requérant indique d’ailleurs que son église continuait à assurer le service religieux pour un nombre restreint de participants justifiant d’un test PCR négatif (paragraphe 31 ci-dessus). Qui plus est, selon les informations fournies par le Gouvernement, et non contestées par le requérant, le service religieux a été suspendu pendant certaines périodes fin 2020 et début 2021 (paragraphe 36 ci‑dessus).
68. La Cour en déduit que, pendant la période ici en cause, l’activité de l’église était affectée par la crise sanitaire puisque l’accès au service religieux a été soumis à des conditions, voire suspendu, pour tous les coreligionnaires du requérant et les représentants du culte. Elle estime également que l’évolution de la situation sanitaire et son imprévisibilité (voir, mutatis mutandis, Fenech, précité, § 130 in fine) ont dû poser un certain nombre de problèmes aux autorités pénitentiaires pour organiser ou surveiller les activités de nature religieuse des détenus. Dès lors, elle est d’avis qu’une large marge d’appréciation doit leur être reconnue (paragraphe 53 ci-dessus), d’autant plus que, en l’espèce, le requérant cherchait à obtenir une autorisation de sortir de la prison et d’entrer en contact avec des personnes extérieures à celle-ci. En effet, l’importance que revêt le principe de la solidarité sociale (voir, mutatis mutandis, Vavřička et autres c. République tchèque [GC], nos 47621/13 et 5 autres, § 279, 8 avril 2021) doit être considérée dans le contexte spécifique du milieu pénitentiaire. Ainsi, le risque de contamination à l’extérieur de la prison et d’introduction du virus dans le cadre fermé de cet établissement a certainement dû avoir un poids important dans la décision des autorités pénitentiaires, à un moment où les mesures de prévention étaient axées sur la prévention des contacts et sur l’isolement ou la quarantaine, entre autres (voir, mutatis mutandis, Terheş, (décision précitée), §§ 20-29 et 39‑40 ; voir aussi Fenech, précité, § 136 sur la disponibilité des vaccins en milieu pénitentiaire). La Cour admet qu’il était difficilement envisageable, pour les autorités, de réagir instantanément à cette situation, et à plus forte raison immédiatement après chaque modification de la situation sanitaire.
69. La Cour tient compte des arguments du Gouvernement tirés de l’application de solutions de remplacement et de la mise en place, dans l’établissement pénitentiaire de Jilava, de visioconférences permettant la pratique du culte adventiste (paragraphe 37 ci-dessus). Elle note que, selon ces affirmations du Gouvernement – non contredites par le requérant, la prison de Jilava, où celui-ci était détenu, avait été le premier établissement pénitentiaire à proposer une assistance religieuse en ligne. Cette solution mise en place par les autorités pénitentiaires cadre avec les pratiques qui se sont développées de manière générale pendant la crise sanitaire, et la recommandation du CPT de compenser toute restriction des contacts avec le monde extérieur par un accès accru à d’autres moyens de communication va dans le même sens (paragraphe 25 ci -dessus). La Cour estime qu’il s’agit là d’un élément important à prendre en considération dans son analyse. Elle observe aussi que l’une des parties intervenantes a abordé cette question dans ses observations et qu’elle a exprimé l’avis qu’une telle pratique pouvait être envisagée (paragraphe 42 ci-dessus). Le requérant n’a pas contesté les affirmations du Gouvernement selon lesquelles il avait refusé de participer à ces activités en ligne et n’a pas expliqué devant la Cour les raisons de son refus. Or, même si de telles mesures ne peuvent pas pleinement remplacer la participation directe au service religieux, la Cour estime que les autorités nationales ont déployé des efforts raisonnables pour contrebalancer les restrictions décidées pendant la pandémie.
70. La Cour note également que le grief du requérant porte sur une situation ponctuelle. Devant la Cour, l’intéressé n’a pas allégué avoir formulé d’autres demandes relatives à l’exercice de son droit au respect de sa liberté de religion et s’être heurté à un refus. La situation qu’il dénonce ne relève donc pas d’une situation continue qui l’aurait exonéré de l’obligation d’exercer les voies de droit mis à sa disposition par le droit interne (voir, mutatis mutandis, Saran c. Roumanie, no 65993/16, §§ 23-24, 10 novembre 2020, pour les recours à exercer ou à renouveler s’agissant de demandes de repas spécifiques aux préceptes religieux) ou, du moins, de renouveler ses demandes en fonction de l’évolution de la pandémie. Compte tenu du caractère imprévisible et inédit de la crise sanitaire, la Cour estime qu’il convient de ménager aux autorités pénitentiaires une large marge de manœuvre, et qu’il leur aurait été difficile de mettre en place de leur propre chef un protocole de réaction immédiate. Elle note d’ailleurs que le requérant n’a pas donné de détails concrets sur sa situation après juillet 2020 et notamment sur la manière dont il a pu exercer sa liberté de religion après cette date.
71. Au vu des éléments qui précèdent, la Cour estime que la décision des autorités pénitentiaires de refuser au requérant l’autorisation d’assister au service religieux de son église à l’extérieur de la prison n’a pas été prise sans que celles-ci n’aient tenu compte de la situation individuelle de l’intéressé (voir, a contrario, Abdullah Yalçın c. Turquie (no 2), no 34417/10, §§ 32-34, 14 juin 2022) et de l’évolution de la crise sanitaire. Eu égard à la marge d’appréciation des autorités nationales dans le contexte spécifique et inédit de cette crise, la Cour conclut que le droit du requérant de manifester sa religion n’a pas été méconnu.
72. Partant, il n’y a pas eu violation de l’article 9 de la Convention.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1. Déclarela requête recevable ;
2. Ditqu’il n’y a pas eu violation de l’article 9 de la Convention.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 11 octobre 2022, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Ilse Freiwirth Gabriele Kucsko-Stadlmayer
Greffière adjointe Présidente
Dernière mise à jour le octobre 11, 2022 par loisdumonde
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